Prix L’Oréal-Unesco : l’excellence scientifique au féminin

Doctorantes ou postdoctorantes ont été récompensées par le Prix Jeunes Talents L’Oréal-Unesco pour les femmes et la science, qui encourage les filles à s’engager dans des parcours scientifiques. Les Antilles-Guyane ont intégré ce cercle prestigieux.

« Recevoir ce prix, c’est comme une validation de notre projet, de nos travaux par des membres de l’Académie des sciences », se réjouit Jordane Corbeau, docteure spécialisée en géophysique et en sismologie, à l’Observatoire Volcanologique et Sismologique de Martinique. Jordane Corbeau est l’une des 35 chercheuses françaises (23 doctorantes et 12 postdoctorantes) à avoir reçu, le 1er octobre 2020, le prix Jeunes Talents France L’Oréal-Unesco pour les femmes et la science. Une récompense prestigieuse qui vise à promouvoir la parité dans le secteur de la recherche scientifique et à faire émerger une nouvelle génération de chercheuses d’excellence.

Avec à la clé, une bourse de recherche de 15 000 euros pour les étudiantes en fin de thèse et de 20 000 euros pour les docteures. Ces scientifiques prometteuses, en médecine, biologie, astronomie, biodiversité, physique ou encore informatique, bénéficieront aussi d’un programme de formation en leadership. Elles sont 3000 doctorantes ou postdoctorantes dans des filières scientifiques à avoir reçu cette distinction, depuis 1998. Et depuis deux ans, le concours récompense aussi les chercheuses aux Antilles et en Guyane. Parmi les lauréates de 2020, on compte deux Antillaises et deux chercheuses qui ont concentré leurs travaux en Martinique et en Guyane.


Briser le plafond de verre

« Cette bourse m’a permis d’ouvrir les yeux sur la place des femmes dans la science, raconte Lorène Jeantet. Aujourd’hui, je me sens investie d’une mission, celle de donner envie aux jeunes filles de s’engager dans la recherche. » La thésarde de 26 ans mène des recherches sur trois espèces de tortues marines dont elle étudie les stratégies énergétiques et les comportements en Martinique et en Guyane. « Les filles ne sont pas encore encouragées à étudier les mathématiques », relève Lorène Jeantet, jeune Strasbourgeoise, passionnée par cette matière.

Jordane Corbeau a connu quelques remarques misogynes au cours de son parcours. « C’est compliqué quand on essaie de fonder une famille, car en début de carrière, il faut participer à des congrès donc être capable de bouger facilement. On ne compte pas ses heures », explique Jordane Corbeau, chercheuse de 31 ans. « Dans le domaine de la biologie marine, c’est la question du plafond de verre qui est en jeu », observe, Aurélie Boisnoir. Postdoctorante à l’Ifremer Martinique, Aurélie Boisnoir étudie les microalgues présentes en mer des Caraïbes, responsables de la ciguatera. « On n’a aucun problème à recruter des femmes, mais il faut qu’on leur donne l’opportunité d’accéder à des postes à responsabilité comme celui de directrice de labo », poursuit la chercheuse de 30 ans.
Aurélie Boisnoir cite en exemple une ancienne lauréate du Prix L’Oréal-Unesco, Daniela Zeppilli, responsable du laboratoire Environnement Profond de l’Ifremer de Brest.


« La route est encore longue… »

La crise du Covid-19 a creusé un peu plus cet écart de valorisation et d’égalité entre les hommes et les femmes. Selon une étude du CSA, la part des expertes dans les médias (radio et télévision) est passée de 38% sur l’année 2019 à 20% pendant le confinement. La prise de parole reste dominée par les hommes « Dans la recherche aussi, les femmes ont été globalement plus impactées dans leur productivité, en particulier celles en début de carrière et celles avec un jeune enfant à leur charge, contraintes de réduire de près de 20 % le temps qu’elles pouvaient consacrer à leurs travaux », souligne Alexandra Palt, directrice générale de la Fondation L’Oréal, dans un communiqué. En France, les femmes représentent aujourd’hui 28% des chercheurs et 30% au niveau mondial. En Europe 86% des hautes fonctions académiques en sciences sont exercées par des hommes. Et, seulement 3% des Prix Nobel scientifiques sont des femmes. 

« C’est hyper important d’avoir le soutien de la communauté scientifique. C’est un bon tremplin », reconnaît Jordane Corbeau. Mais, « le chemin est encore long, on a encore des post-docs à faire plutôt à l’étranger, explique Lorène Jeantet, avant d’espérer un poste fixe dans un laboratoire ou encore au CNRS. J’ai l’impression que cette bourse va me permettre de réaliser ces projets. »Comme ses consœurs chercheuses, Aurélie Boisnoir espère aussi décrocher un CDI, si possible en Martinique, pour faire avancer les études sur les microalgues dans les Caraïbes « en retard par rapport à l’Océan Pacifique ».

Sélène Agapé. Photo : Fondation L’Oréal

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