Politique. Eau, RSA, valorisation des sites patrimoniaux : le Département prend le taureau par les cornes

Trois thèmes ont constitué le menu des discussions au palais du Conseil départemental, ce vendredi matin : l’eau, le RSA, la valorisation des sites patrimoniaux.

C’était plénière, deux heures denses qui ont permis d’avancer sur des dossiers sensibles : l’accès à l’eau potable et agricole, les enjeux d’une insertion professionnelle durable, le développement culturel et touristique.

Le président Guy Losbar a rappelé l’urgente nécessité de réformer la conduite des politiques publiques en Guadeloupe.

« La marche du monde, les atouts dont nous disposons doivent nous conduire à avoir une ambition propre. »

Il a martelé : identité, puissance guadeloupéenne… projet partagé pour notre pays… regard différent sur nous-mêmes, être moins pessimiste, moins fataliste. La Guadeloupe doit avoir un comportement moins tutélaire… » (voir plus bas)

Pour ceci il faut, a-t-il dit, se rassembler autour de la plateforme lancée après les émeutes de la fin de l’année 2021, 29 mesures pour la Guadeloupe, pour un cout d’objectif total de 948 M€, dont une part contributive de l’État estimée à 458 millions d’euros et celle des collectivités à 366 millions d’euros.

« Nous l’avons expliqué au président de la République en février 2022, nous l’avons réitéré lors de l’Appel de Fort-de-France. Le 7 septembre dernier, nous l’avons redit au président de la République. »

« Cette nouvelle méthode, qui constitue un ambitieux chantier, peut se décliner en trois volets :
– La réalisation d’un état des lieux par politiques publiques ;
– Établir la liste des problématiques et des leviers dont nous avons besoin afin de lever ces freins, notamment au niveau juridique ;
– Considérer la nécessité d’engager une évolution institutionnelle ou statutaire pour une meilleure efficacité de nos politiques publiques.

C’est l’esprit de la proposition de méthode sur laquelle j’ai échangé avec les plus hautes autorités de l’Etat et qui a été confirmée par la correspondance reçue des ministres Gérald Darmanin et Jean-François Carenco, le 24 octobre dernier. »

Le président Losbar poursuivait, donnant deux dates : « La commission ad hoc chargée de la préparation des travaux du Congrès se réunira le 14 novembre. Cette commission pourra ainsi piloter les travaux, particulièrement denses, qui nous mobiliseront durant les 6 prochains mois avant la tenue d’un premier Comité Interministériel des Outre-Mer placé sous la présidence de la Première Ministre. Cette commission pourra à ce titre prendre appui sur la formidable contribution que constituent les propositions de la plateforme des élus mobilisés. Et dans ce cadre, nous poursuivrons donc nos travaux en étroite collaboration avec la Région, les parlementaires et l’Association des Maires de Guadeloupe, chantier par chantier, en suivant la méthodologie que je viens de vous exposer. »

L’eau sera confiée à une société privée

Le rapport sur l’eau a été présenté par Ferdy Louisy, ancien président du SIAEAG.

Trois dossiers ont été exposés par les présidents des commissions en charge avant un vote-approbation à l’unanimité

Premier point : l’alimentation en eau potable. Il fallait réaffirmer l’engagement solidaire du Département aux côtés de la SMGEAG, de la Région, de l’Etat.

Les maîtres mots :
. Redire notre solidarité
. Poursuivre les travaux
. Assurer la maîtrise d’ouvrage pour la réparation et la reconstruction
. Mobiliser 50 millions chaque année
. Avoir une feuille de route partagée sur les 5 prochaines années.
. Continuer d’œuvrer sur les réseaux d’eau potable et l’irrigation

« Il nous faut délibérer sur la délégation de service public ».

Ce rapport sera présenté par Ferdy Louisy.

Le Département ne dispose pas de l’expertise, ni des ressources humaines et financières pour assurer la régie.

Le recours à un tiers permettrait d’assurer une maîtrise sans assumer les risques financiers.

Qu’attend le Département ?
. De l’eau pour l’irrigation
. De l’eau brute pour eau potable et usage industriel.
. Des travaux divers et la renouvellement du matériel tournant
. Le renouvellement des branchements, compteurs des abonnés, etc.
. La facturation et le recouvrement
. La fourniture au Département de conseils, avis, mise en garde …

Le Département conservera la maîtrise des travaux.

La proposition retenue est de confier la gestion de l’eau à une société privée, par une délégation de service public avec un contrat sur 10 ans. Valeur du contrat 42 millions d’euros sur 10 ans.

La valorisation des sites
patrimoniaux passera par un EPIC

Sabrina Robin a une parfaite maîtrise du dossier touristique. Valoriser les sites patrimoniaux est essentiel.

Deuxième point, le tourisme et l’attractivité du territoire, par le renforcement de l’attraction touristique et de l’attraction culturelle des sites patrimoniaux.

Un dossier confié à Sabrina Robin (présidente de la commission Tourisme ) et Michel Mado (président de la commission Culture et patrimoine).

Il s’agit, rappelle Sabrina Robin, de la valorisation touristique des sites patrimoniaux du Conseil départemental : habitations, moulins, forts, musées, etc.

Ces sites, très visités, sont entretenus, font l’objet, pour certains, d’une valorisation.

Ils sont gérés en régie et fonctionnent avec du personnel départemental, sauf Beauport

Que veut faire le président Losbar ? Mettre en avant le tourisme mémoriel et le tourisme vert.

Il s’agit d’être rationnel et cela passe par la création d’un EPIC départemental.

Le Pays de la canne sera la tête de pont d’un projet d’envergure.

Un EPIC sera créé, doté de 650 000 euros pour débuter.

La collectivité versera une dotation de fonctionnement d’1 million d’euro pour la première année, dégressive les années suivantes en fonction de la rentabilité des sites.

Une convention d’objectifs sera signée pour chaque site concerné.

Le premier site concerné : Beauport dont le contrat de gestion prend fin en janvier 2023.

Il s’agit de faire de Beauport un site ouvert sur le nord Grande-Terre, lieu de transmission de savoir, de rayonnement pour la Grande-Terre, pôle d’animation culturelle.

Le rapport est adopté.

RSA : rationaliser

Adrien Baron a rappelé le volet social du Département par l’insertion des bénéficiaires du RSA.

Le défi est d’importance. Il s’agit de social et d’insertion, rappelle Adrien Baron, président de la commission Insertion. Il y a 42 000 bénéficiaires du RSA.

L’idée, martelée par Guy Losbar, est de faire différemment : diminuer le nombre de bénéficiaires en les réinsérant dans la vie économique (les solutions ne manquent pas : permaculture, agro-transformation, élevage maritime (fermes marines), transition écologique et énergétique, artisanat).

Adrien Baron : « L’Etat avait la possibilité de reprendre en main le paiement direct du RSA. La Guadeloupe a candidaté mais, après coup, le Département s’est interrogé pour savoir si c’était réellement profitable. »

En fait, il fallait verser, chaque année, 80 millions d’euros à l’Etat (la part du Département); le Département aurait risqué de perdre certains crédits associés au RSA ; enfin, il y a des salariés du département dédiés au fonctionnement du RSA.

« La perte du RSA entraînerait des conséquences graves sur notre budget d’un milliard », rappelait M. Baron.

Comment faire pour réduire le surcoût de 80 millions d’euros ?

Plusieurs pistes :

. dont le nettoyage du fichier (il y a 2 000 attributaires de plus de 65 ans). Economie : 10 millions d’euros.

. encourager à prendre un emploi salarié par l’incitation à la formation, pour diminuer le nombre d’allocataires

. penser qu’il y aura une embellie dans les trois ans qui permettra une meilleure prise en charge de l’emploi, ce qui fera diminuer aussi le nombre d’allocataires.

. Politiques publiques efficaces qui devrait permettre de faire diminuer la part reversée à l’Etat.

Plusieurs raisons plaident pour garder le RSA au niveau du Département : le principe d’avoir la main sur les personnes fragiles, de mieux maîtriser chaque parcours. « Penser l’emploi de manière très guadeloupéenne », précisait Adrien Baron.

La proposition de retirer la candidature à une reprise en main par l’Etat du RSA a été votée à l’unanimité.

Insertion : le modèle guadeloupéen

Depuis le début de la plénière, un petit groupe de femmes et d’hommes était assis derrière des tables supportant chaussures, sac, une véritable exposition d’artisanat, visiblement local.

Il s’agissait d’un exemple de ce qui peut être fait en matière d’insertion.

Corinne Lombion, présidente du centre de formation La Clé, était venue au Département avec un groupe de bénéficiaires du RSA sortis d’une formation en cordonnerie. Il s’agissait d’une formation de 1 000 heures en cordonnerie, réalisation pendant huit mois d’un travail « formidable » de création, de chaussures, de sacs, suivi par un voyage de formation en Italie, à Milan (fInancé par le Département et la Région).

Il existe, chaque année, 250 plans de formation cofinancés par le Fonds Social Européen à hauteur de 1,8 million d’euros.

Les témoignages des cordonniers et de Mme Lombion :ont permis de comprendre l’intérêt de cette démarche : « Nous recherchons des gens volontaires prêts à exercer des petits métiers de niche en voie de disparition et qui sont utiles pour les Guadeloupéens », a dit Mme Lombion.

Ces artisans cordonniers travaillent une matière novatrice : la peau de poisson, cuirs permettant la réalisation de jolies chaussures.

D’autres initiatives ont été mises en avant :

Jenn’ Pouss, avec le témoignage d’un futur scaphandrier qui remercie Jenn’Pouss et Kazarecycle.

Un chantier d’insertion par le manioc a été présenté par Didier Pézeron, créateur du Domaine du manioc, à Vieux-Habitants. C’est une structure touristique, pédagogique, qui fait de la formation, de l’insertion, de la transmission, etc. « Il faut aller plus loin que la farine de manioc, les kassaves. Le Domaine du manioc a été créé pour l’insertion dans le territoire », a dit M. Pézeron.

Les artisans ont posé avec les élus.

EXTRAIT
« Prendre la pleine mesure de la force de notre identité
et de ce qu’est la puissance guadeloupéenne. »

« Vous le savez, depuis la campagne électorale de 2021 jusqu’au début de notre
mandature, je n’ai eu de cesse de rappeler l’urgente nécessité de réformer la conduite
des politiques publiques en Guadeloupe.
Pas simplement parce qu’il s’agit d’une urgence pour nos territoires !
Pas uniquement pour répondre de façon toujours plus efficace aux attentes de nos
concitoyens !
Mais surtout parce que la marche du monde et les atouts dont nous disposons doivent nous
conduire à nourrir une ambition forte pour l’avenir de notre archipel.
Cette ambition forte, c’est d’avoir conscience que la Guadeloupe regorge de potentialités
qui peuvent la rendre plus attractive et qui peuvent apporter un épanouissement à tout un
chacun.
Cette ambition forte, c’est prendre la pleine mesure de la force de notre identité et de ce
qu’est la puissance guadeloupéenne.
Mais c’est surtout l’ambition de nous rassembler autour d’un projet partagé, pour le pays.
L’ambition exige d’être résolument optimiste pour la conduite des politiques publiques.
Elle nous oblige donc à porter un regard différent sur nous-mêmes, un regard moins
pessimiste, moins fataliste.
C’est se dire aussi que la Guadeloupe doit être en mesure d’avoir une relation moins
tutélaire et davantage partenariale avec l’État, dans la conduite des affaires du pays. »

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