Le 7 septembre, Emmanuel Macron a reçu à l’Elysée, pour une courte entrevue et surtout un dîner — ce qui était prévu et maintenu malgré les rodomontades des uns et des autres comme quoi ils n’allaient « pas dîner mais négocier ». Ils sont venus, ils ont parlé et écouté.
Pour quoi faire ? Le président de la République voulait répondre de vive voix à l’Appel de Fort-de-France. Cet appel en mai se voulait une sorte de lettre au chef de l’Etat pour déclencher une réaction de sa part. Qu’il comprenne qu’on ne jouait plus Outre-mer. Que la situation avait assez duré.
Que veulent-ils ? De l’eau au robinet
et du camembert moins cher
Le Martiniquais Serge Letchimy était en pointe sur ce débat en autonomiste de toujours. Gabriel Serville aussi, qui joue solo en utilisant la force du nombre. Les Guadeloupéens Guy Losbar et Ary Chalus la jouent subtile pour obtenir le maximum (de compétences délocalisées tout de suite à une autonomie plus tard) sans effaroucher la population assez sensible sur le sujet.
Emmanuel Macron qui gère depuis un peu plus de quatre ans la mauvaise humeur des Français ne s’est pas affolé devant cette mauvais humeur des élus d’Outre-mer. Comptez vous sept et basta. Les sept présidents des collectivités majeures. Derrière, le peuple dont on ne sait pas trop ce qu’il veut. De l’eau, au robinet en tout temps, en tout lieu, peut-être, tout simplement, et du camembert AOC moins cher dans les supermarchés. Peut-être plus. Des emplois sûrement. Une vie meilleure assurément.
Il est intéressant de lire la prose élyséenne après cette entrevue. C’est sur le site elysee.fr.
« Le Président de la République a exposé sa vision pour les Outre-mer, rappelé les principes de son action depuis 2017, et échangé avec les acteurs de terrain pour trouver les voies d’une action publique efficace face aux problèmes du quotidien de nos compatriotes ultra-marins. »
Jusque là, c’est un peu langue de bois.
« Donner aux acteurs de terrain les marges d’action
nécessaires à l’invention de solutions sur mesure »
« Le Président de la République et le gouvernement sont décidés à employer, comme avec le Conseil national de la refondation, une nouvelle méthode, en donnant aux acteurs de terrain les marges d’action nécessaires à l’invention de solutions sur mesure, en s’appuyant sur les atouts de chaque territoire et l’expérience de ceux qui l’animent. Le Président de la République a souhaité mettre l’accent sur la sécurité qui est une priorité partout, la lutte contre la vie chère qui reste une attente forte et le rayonnement de cet archipel France avec une coopération régionale renforcée. »
Bien. C’est ce que demandaient les présidents des régions d’Outre-mer : plus de latitude à faire fonctionner leurs cellules grises pour trouver des solutions aux problèmes des Outre-mer. Bon, mais on ne voit pas poindre la moindre domiciliation de quelque pouvoir que ce soit.
« La Première ministre tiendra un comité interministériel des Outre-mer (CIOM) d’ici six mois pour acter sur cette base une première série de décisions. » Ce qui veut dire : faites un projet, des propositions et on verra ensuite comment y répondre.
Il fallait que chacun reparte sans avoir le sentiment de s’être un peu fait rouler dans la farine : « Cette réunion de travail a posé le premier jalon d’un « renouveau de l’Outre-mer ». »
Néanmoins, il y a une réelle volonté d’Emmanuel Macron de faire… dans quelques semaines, là il est un peu pris par des problèmes nationaux. « La démarche volontariste engagée par le gouvernement et les élus dès les prochaines semaines aura pour mission d’identifier les mesures législatives et réglementaires, nationales comme locales, susceptibles de rendre plus efficace l’action des collectivités, dans le respect des compétences de chacun et en tenant compte des spécificités propres à chaque territoire. »
Feuille de route et réunions à venir
Une feuille de route sur un calendrier, des actions concrètes et des investissements par territoire sera bâtie sur cette base. Voici qui est bon. Toujours faire un planning, remplir les petites cases avec des problèmes résumés à un mot, mettre en face la somme que cela pourrait coûter…
Restait le gros gros morceau. Après la Nouvelle Calédonie qui a donné des sueurs froides et la Corse qui terrorise à temps plein depuis des années, gâchant des septennats et des quinquennats, que veulent ces domiens là ?
Sur cette question institutionnelle, le Président de la République, nous dit l’Elysée, « a rappelé que c’est par le principe de différenciation entre les collectivités que seront assurés le développement économique et le rayonnement des Outre-mer, chacun des territoires étant fort d’atouts, d’aspirations et de défis singuliers. A cet égard, le Président de la République a précisé que la question institutionnelle outre-mer ferait l’objet d’un des volets de la future commission transpartisane qui se réunira
d’ici la fin de l’année. Elle impliquera parlementaires et élus de ces territoires, sans tabou, afin d’apprécier les évolutions nécessaires au service de nos compatriotes. »
Le Président de la République rencontrera aussi, prochainement, les élus du Pacifique. Fermez le ban.