Passeront-ils le réveillon de Noël à la Région ?

Ce vendredi 24 décembre, une question se pose dans les foyers de Guadeloupe : les militants du Collectif des organisations en lutte passeront-ils Noël à la Région qu’ils occupent depuis jeudi en fin de matinée. Passeront-ils Noël à la Région avec le président Ary Chalus et son staff rapproché ? Le président avait engagé des discussions avec une dizaine de représentants syndicaux qui veulent l’ouverture immédiate de négociations avec les élus et surtout l’Etat sur une abrogation de la loi vaccinale du 5 août 2021. Vers 21 heures, il fallait se rendre à l’évidence, les élus et les administratifs piégés dans le bâtiment seraient condamnés à y passer la nuit.

La journée de jeudi 23 décembre a commencé pour le Collectif des organisations en lutte contre l’obligation vaccinale et le passe sanitaire par un meeting devant le Centre hospitalier de la Basse-Terre. En fin de matinée, le meeting se transformait en marche vers l’hôtel de Région, à Desmarais. Deux kilomètres plus loin. 

A la Région, c’était jour de plénière, la quatrième de l’année, portant sur des questions d’organisations et de finances. Miss France et miss Guadeloupe, de retour, l’une de l’élection de miss univers en Israël, l’autre de l’élection de miss France, ont été honorées par des remises de bouquets de fleurs et de cadeaux. Plus tard, l’ancienne présidente du Conseil départemental, devenue conseillère régionale, Josette Borel-Lincertin, a pris à partie les conseillers de sa liste qui l’ont laissée au bord du chemin en ne l’intégrant pas à leur groupe… 

Une condamnation des violences et le souhait d’une réconciliation entre Guadeloupéens

Rien de bien saillant dans cette réunion. Sauf le discours du président Ary Chalus, prémonitoire, qui condamnait les violences et disait qu’on ne peut pas négocier sur certains des points de la plateforme du collectif qui regardent l’Etat. Notamment l’obligation vaccinale et le passe sanitaire. Pas plus que l’amnistie pure et simple d’auteurs de violences en marge de la crise sociale.

Le président avait détaillé, dans ce même discours, les mesures mises en place par la Région pour la jeunesse en crise.

Des sons, des chants scandés, traversaient les murs de l’hémicycle depuis quelques minutes et des agents s’agitaient en entrant et sortant de la salle. 

Quelques minutes d’incertitudes, le bruit qui s’intensifie…

Dans le hall d’entrée, plusieurs manifestants utilisaient l’une des deux grandes jarres décoratives disposées à l’extérieur come bélier pour défoncer la porte vitrée semi-blindée. Un craquement, la jarre brisée qui éclate dans le hall, et c’est l’entrée par le trou dans la porte de manifestants qui prennent le bâtiment d’assaut. 

Le collectif envahit
l’hôtel de région

Ils se dirigent vers l’hémicycle, tandis que les élus quittent la salle par les portes latérales. Le collectif s’est rendu maître du bâtiment. Ils cherchent le président de Région, s’occupent peu des élus qui restent et rangent leurs affaires avant de s’éclipser. 

Ary Chalus, qui est rentré dans ses bureaux, s’entretient avec son staff. Il propose de recevoir dix membres du collectif si l’hémicycle est évacuée. Ce qui est fait en milieu d’après-midi, après de longues discussions avec Elie Domota, porte-parole du LKP, ancien secrétaire général de l’UGTG, fer de lance du collectif, et Max Evariste, secrétaire général de l’UGTG. 

En début de soirée, les discussions s’ouvrent. Sur les mêmes points qui avaient fait échouer les débuts des négociations entre élus et collectif quinze jours plus tôt. 

Ary Chalus n’a pas plus de réponse à ces revendications jeudi soir : les élus ne sont pas compétents pour abroger la loi sur la vaccination obligatoire des soignants et sapeurs-pompiers ainsi que certaines catégories de salariés. 

Les discussions s’enlisent
tandis que le collectif s’installe

Inéluctablement les discussions s’enlisent. Des militants ont grimpé les étages, sont dans les pièces autour du bloc présidentiel. Ils s’installent. La nuit aussi… Il semble que le téléphone ait fonctionné entre le préfet Alexandre Rochatte et le président Ary Chalus. Le ministre des Outre-mer, Sébastien Lecornu, a condamné l’intrusion dans l’hôtel de Région, Gérard Larcher, président du Sénat, a fait de même…

A l »intérieur du bâtiment, les discussions s’enlisent. Le président Chalus a la volonté mais pas les mains libres pour discuter avec le collectif. Ce que Jean-Marie Nomertin, leader de la CGTG, résume ainsi : « Nous voulons que les élus votent une motion pour faire venir l’Etat à la table des négociations, car il a les manettes financières pour beaucoup des points de la plateforme de revendications. »

Ary Chalus, en lien avec les élus locaux et les parlementaires a proposé de faire un courrier/une motion au gouvernement pour demander la présence de l’Etat et tenir une réunion mardi prochain. Mais, les syndicats sont sceptiques….

D’autant que, vendredi, le ministère des outre-mer a déclaré auprès de l’AFP que « l’Etat ne négociera[it] pas pour abroger une loi de la République votée au Parlement ». Pas question non plus pour le ministère d’une amnistie pour ceux qui auraient commis des violences sur les forces de l’ordre et ont été condamnés tout au long de la crise sociale ponctuée de barrages et d’exactions menées en marge du mouvement par des incontrôlés.

En fin de nuit, après que Gaby Clavier, ancien secrétaire général de l’UGTG, interrogé par les médias, eut déclaré que le collectif restera là — « la maison du peuple », a-t-il rappelé —, dans l’hôtel de Région, jusqu’à ce que les revendications soient satisfaites… et que ça durera le temps que ça durera… un communiqué du collectif tombait.

L’installation d’un piquet de grève
populaire à l’hôtel de Région

« Cette journée de mobilisation qui s’est conclue par l’installation d’un piquet de grève populaire à l’hôtel de Région, témoigne de notre détermination à obtenir, après des mois d’interpellations, de marches, de grèves dans plusieurs secteurs d’activité, singulièrement au niveau des pompiers, des soignants, ainsi que des salariés du secteur social :

. L’arrêt de toutes les sanctions et suspension et de rémunérations prises contre des milliers de salariés du public et du privé ;
. L’arrêt de toutes sanctions et suspensions de revenu prises contre des centaines de libéraux, privant de faite l’accès aux soins à des milliers de personnes ;
. L’ouverture de négociations sur le cahier de revendication qui a d’ailleurs fait l’objet d’un protocole d’accord de méthode signé avec les élus de Guadeloupe le 10 décembre 2021.

Le collectif des organisations en lutte appelle l’ensemble des travailleurs et du peuple de Guadeloupe à renforcer les luttes en cours et à participer massivement à toutes les actions de mobilisation à venir. »

Vendredi matin, la situation reste bloquée. 

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