Opinion. Quid de la Stratégie du coup de billard à trois bandes d’Emmanuel Macron ?

PAR JEAN-MARIE NOL*

L’actualité politique française est dominée par une série de manœuvres et de stratégies qui, bien que parfois difficiles à comprendre, reflètent une réalité économique et financière sous-jacente. L’un des éléments les plus intrigants de cette période est la dissolution de l’Assemblée nationale par Emmanuel Macron, une décision qui semble avoir plongé le pays dans une nouvelle phase d’incertitude.

Alors que beaucoup se concentrent sur les implications politiques et institutionnelles de cette action, il est crucial de se pencher sur les véritables motivations économiques et financières derrière cette démarche. Nous sommes bien en présence d’une dissolution aux conséquences obscures.

Ainsi la récente dissolution de l’Assemblée nationale, suivie par une victoire relative de la gauche, n’a fait qu’obscurcir le paysage politique français. Aucun « vainqueur clair » n’émerge de ce scrutin, laissant le pays dans une situation de statu quo politique.

Emmanuel Macron, pourtant en position de gouverner avec une majorité relative, a choisi de sacrifier cette stabilité. Pourquoi ? Cette question reste sans réponse précise, les politologues et les journalistes n’ayant pas encore élucidé les motivations exactes du président. Et pourtant il est question d’une tactique subtile pour pousser le Rassemblement National à la gouvernance et lui faire endosser l’impopularité et le discrédit.

C’est là plus que jamais une hypothèse plausible qui dans un premier temps révèle la volonté première de Emmanuel Macron de pousser le Rassemblement National (RN) à la gouvernance. En endossant les mesures impopulaires nécessaires pour redresser l’économie et surtout les finances publiques, le RN se serait trouvé en difficulté, peut-être même discrédité.

Cependant, cette tactique a été contrée par le « front républicain », qui a une fois de plus empêché le RN de prendre le pouvoir, fonctionnant plus efficacement que prévu. Alors la stratégie s’est affinée au point de décider d’un changement de cible : le Nouveau Front Populaire.

Face à cet échec de l’accession au pouvoir du RN , la stratégie de Macron semble avoir changé. La nouvelle cible est la gauche, regroupée sous le « nouveau front populaire ». Macron est désormais contraint de revoir sa stratégie, en mettant en place ce qui peut être décrit comme un « coup de billard à trois bandes ». Cette expression, souvent utilisée de manière ironique, désigne une approche indirecte pour atteindre un objectif, en passant par plusieurs étapes intermédiaires.

Première bande : Un Premier Ministre de Gauche ?

La première étape de cette stratégie consiste à nommer un Premier ministre issu de la gauche. Cette manœuvre permettrait à Emmanuel Macron de continuer à gouverner en coulisses tout en permettant à la gauche d’appliquer un programme difficile à réaliser compte tenu de la faible majorité relative du nouveau Front Populaire. Cette situation est instable et expose le gouvernement du NFP de cohabitation à une motion de censure à tout moment, promettant une instabilité politique pendant au moins un an, période durant laquelle Macron ne peut pas dissoudre de nouveau l’Assemblée nationale.

Cette instabilité politique sera  aggravée par les problèmes économiques et financiers auxquels la France est et sera encore plus confrontée. L’agence S&P Global a récemment dégradé la note de la France, mettant en garde contre les risques de croissance inférieure et d’incapacité à réduire le déficit budgétaire.

L’agence de notation Moody’s, de son côté, avertit que la note de la France pourrait être abaissée en fonction de l’impact des tractations politiques sur la trajectoire budgétaire ou de croissance. Ces avertissements soulignent la fragilité de la situation économique du pays et une possible explosion des déficits publics ainsi qu’une augmentation sensible des taux d’intérêts et donc un alourdissement de la charge de la dette. Donc crise financière en vue .

Seconde bande : Une Nouvelle Dissolution ?

La seconde étape de la stratégie de Emmanuel Macron serait de dissoudre à nouveau l’Assemblée nationale. Cette dissolution interviendrait dans un contexte économique encore plus dégradé, avec des finances publiques sous pression, une reprise du chômage et une inflation persistante. L’éventualité de voir le RN accéder au pouvoir politique devient alors plus probable, mais cette fois-ci dans un contexte où ses capacités à gérer la crise financière et économique seraient sévèrement limitées.

L’échec prévisible du RN à colmater les brèches économiques pourrait ainsi empêcher Marine Le Pen de gagner l’Élysée. En fait nous nous dirigeons tout droit vers une recomposition du paysage politique en 2027 à l’orée de la prochaine présidentielle.

En définitive, cette stratégie de coup de billard à trois bandes vise à recomposer le paysage politique français en vue des élections de 2027. L’objectif ultime serait de favoriser une grande coalition de centre-droit et de gauche, regroupant républicains, socialistes et écologistes, une coalition désirée par des figures comme Édouard Philippe et d’autres ténors de la macronie. Cette recomposition pourrait offrir aux potentiels successeurs de Emmanuel Macron et à ses alliés une nouvelle chance de gouverner, en marginalisant les extrêmes de l’échiquier politique.

En somme pour conclure notre démonstration, la dissolution de l’Assemblée nationale par Emmanuel Macron, loin d’être une simple manœuvre politique, s’inscrit dans une stratégie complexe visant à gérer les défis économiques et financiers tout en réorganisant le paysage politique français. Si la route est semée d’embûches, la vision du président Emmanuel Macron pourrait bien redéfinir la politique française pour les années à venir.

Reste à savoir si cette approche subtile et indirecte, ce fameux coup de billard à trois bandes, portera ses fruits ou si elle échouera face aux réalités économiques et aux dynamiques imprévisibles de la politique française.

*Economiste et juriste en droit public 

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