PAR TEMATAI LE GAYIC
Ne vous méprenez pas, cette tribune n’a pas pour vocation à légitimer les exagérations de certains responsables politiques qui profitent des relations antagonistes entre certains cadres du Tavini et l’Azerbaïdjan pour corrompre les idéaux progressistes et manipuler l’opinion publique.
Face à ces tentatives de perversion de nos idéaux politiques, un sursaut est nécessaire. Il est de notre responsabilité de sensibiliser l’opinion publique, et notamment l’ensemble des partisans progressistes, au piège géopolitique et opportuniste dans lequel l’Azerbaïdjan souhaite nous conduire.
Cette contribution sert avant tout à nous extraire de cette théâtralisation, par nos responsables politiques, de notre politique étrangère. Dans un monde globalisé, nous sommes — et n’en déplaise à certains — deja intégrés dans le concert des nations : navigateurs dans les veines et dans l’esprit, pays dont la première industrie est le tourisme, territoire aussi vaste que l’Europe, mer d’îles en plein milieu du plus grand pôle géopolitique et économique mondial, autonomistes comme indépendantistes n’ont aucun intérêt à éclipser les problématiques internationales au profit des enjeux sociétaux polynésiens.
Depuis plusieurs mois, l’Azerbaïdjan déploie une offensive diplomatique dans les territoires d’Outre-mer français, notamment en Polynésie. Sous couvert de coopération et de soutien aux mouvements souverainistes, ce régime autoritaire tente de s’immiscer dans les luttes progressistes et décoloniales ultramarines.
Or, l’Azerbaidjan ne défend en rien les valeurs progressistes et décoloniales. Il les exploite. S’allier à ce régime, c’est trahir ses propres idéaux.
L’Azerbaidjan est une dictature ultranationaliste où les opposants politiques sont emprisonnés, les médias censurés et les manifestations interdites. Ce régime méprise les droits des peuples autochtones et persécute les minorités ethniques et religieuses, comme il l’a prouvé en menant une campagne de répression ethnique contre les Arméniens du Haut-Karabagh.
En se posant en champion de l’anticolonialisme, Bakou ne fait que recycler un discours qu’il ne s’applique jamais à lui-même. Cette posture n’est qu’un écran de fumée destiné à masquer son propre impérialisme et ses ambitions expansionnistes.
L’Outre-mer français est devenu un levier stratégique pour Bakou. En s’y implantant, l’Azerbaïdjan espère affaiblir la France et répondre aux critiques de Paris sur ses exactions en Arménie. Il cherche à étendre son rayonnement diplomatique jusqu’en Océanie, bien loin — même trop loin — du Caucase, et espère redessiner les rapports de force internationaux.
Soyons lucides. On ne peut réclamer l’émancipation en s’alignant aux côtés d’une dictature.
L’internationalisation des luttes est une force lorsqu’elle repose sur des valeurs communes et des solidarités sincères. Mais elle devient une faiblesse lorsqu’elle repose sur des alliances de circonstance. Ne sacrifions pas nos idéaux sur l’autel d’intérêts étrangers éloignés de nos aspirations.
Le concert des nations autour d’idées progressistes, oui; les alliances contre-nature, non.
*Représentant à l’Assemblée de Polynésie et ancien député français