Opinion. Législatives : quels enjeux pour la Guadeloupe ?

PAR JACQUES BANGOU*

Les élections européennes à peine achevées sur le constat de la défaite du Président de la République et de la montée de l’extrême-droite, nous voilà embarqués en Guadeloupe dans un tourbillon politique. S’y mêlent la question des valeurs qui permettent de faire société ensemble, les chemins possibles vers une Guadeloupe autonome et
l’efflorescence de candidatures aux prochaines législatives expression des ambitions individuelles dans le Monopoly du pouvoir.

Les raisons de ne pas céder à la dérive de l’extrême-droite sont si nombreuses et souvent rappelées par des plumes talentueuses qu’il est à peine nécessaire d’en rajouter.

La droite fasciste, xénophobe, nationaliste a déjà frappé à la porte du pouvoir en France à de nombreuses reprises. Mille neuf cent trente-quatre, conduisant au sursaut du Front Populaire de 1936, Vichy et Pétain un peu plus tard avec sa traduction en Guadeloupe et en Martinique avec l’Amiral Robert et le gouverneur Sorin de triste mémoire, la guerre d’Algérie ses crimes et ses tortures avec les généraux putschistes, pour ne rappeler à notre souvenir que ces expressions-là.

La victoire des forces alliées sur le nazisme et l’écriture de l’histoire par les vainqueurs a contribué à occulter qu’une large partie de la France, n’était pas dans la résistance pour ne pas dire qu’elle était clairement dans la collaboration, l’antisémitisme, le racisme, et le colonialisme.

Les politiques sociales conduites par la gauche au lendemain de la guerre ont apporté santé, emploi, logements, niveau de vie. Pour faire tourner la machine économique et occuper les emplois difficiles, nul ne s’est indigné alors de l’immigration et de l’assimilation des peuples issus des anciennes colonies et attirés à coup de BUMIDOM.

La régression du modèle économique français de production, l’émergence d’une fraction d’hyper riches produits de la spéculation et de la mondialisation, la paupérisation à l’inverse et la régression de statut social d’une partie des Français, conduisent aujourd’hui à brunir de sinistre façon leur orientation politique.

En Guadeloupe, l’assimilation, l’acculturation profonde qui persiste dans les programmes scolaires, l’absence d’une culture de pouvoir responsable remplacée par une
soif effrénée de m’as-tu-vu politique, l’échec économique qui a conduit en Guadeloupe à maintenir le chômage à 30%, tout cela a conduit à l’émergence de compatriotes
franchouillards se sentant à l’aise pour investir les thèses nationalistes françaises les plus dures.

Celles qui appellent à la mise à l’index des immigrés, qui aspirent à leur retirer logement, santé et toute intégration citoyenne, qui les rend seuls responsables de l’insécurité. L’histoire nous rappelle qu’Ibo Simon et Raymond Vivies, sur les mêmes bases idéologiques avaient poursuivi dans les rues de Pointe-à-Pitre les Haïtiens comme les
Dominiquais. Point n’est besoin de couleur de peau pour être raciste ! Les circonstances politiques actuelles appellent donc à une première déclaration.

A titre personnel et au nom de mon parti le PPDG, je ne peux être d’aucune façon complice du discours xénophobe, des liaisons douteuses des partis d’extrême-droite avec
leur passé fasciste et antisémite. Quand Henri Bangou, mon père représentait l’ensemble des étudiants français à la vice-présidence de l’UNEF en 1950, c’est un dénommé Jean Marie Le Pen qui faisait bataille au congrès de l’UNEF pour “déchouquer ce nègre”. Je ne l’oublie pas.

Se fait jour par ailleurs, la nécessité d’une réflexion commune pour trouver l’articulation politique la plus appropriée en Guadeloupe afin d’abord de créer de la production économique et réduire le chômage, d’être capable de nous protéger de la concurrence extérieure, de renforcer par ailleurs la démocratie participative. Il y a lieu de faire vivre une citoyenneté guadeloupéenne, à travers la culture et l’éducation.

Il y a lieu de ne pas se contenter de gérer difficilement voire mal l’héritage colonial de l’eau dans un cadre juridique et financier qui n’est pas le nôtre et exiger de conduire les
politiques de l’eau sur notre territoire dans un cadre repensé par nous et pour nous.

C’est ce débat qui a été récemment amorcé par neuf (9) organisations politiques et des personnalités, en phase pour mettre en place une autonomie normative. Conclusion
partiellement reprise par le Congrès des élus et qu’il faudra désormais travailler avec la population.

Ce travail est à mille lieux des contorsions politiques pour se faire voir aux prochaines élections législatives.

C’est dans ce contexte qu’au PPDG nous appelons à reconduire dans deux circonscriptions, les députés Christian Baptiste (2e circonscription), issu de notre parti le PPDG, et Elie Califer (4e circonscription), allié et candidat de la Fédération socialiste.

Dans la 1ère circonscription les tractations et les recombinaisons communales faussent délibérément les enjeux idéologiques de ces législatives. Le député sortant a été actif sur de nombreux dossiers dont celui de la Nouvelle Calédonie. Il a, loin de ses premières inclinaisons, dénoncé les politiques macronistes et soutenu la cause autonomiste.

Nous divergeons cependant fortement sur ses prises de position s’agissant de l’immigration. Nous invitons donc nos électeurs de cette circonscription à faire un choix antifasciste et anti macroniste qui tienne compte d’une exigence humaniste et progressiste et à ne pas être dupes des sagas familiales qui se dessinent dans plusieurs camps.

S’agissant de la 3e circonscription, le député sortant dans ses positions politiques a été souvent dans la surenchère avec son principal concurrent RN. Que les électeurs aillent voter pour des candidats porteurs de valeurs progressistes !

Chère électrice, cher électeur, que votre démarche politique et votre vote, servent l’ambition d’une France délivrée de ses démons nationalistes et xénophobes et une Guadeloupe qui aspire à être responsable de sa propre destinée.

*Conseiller municipal et ancien maire de Pointe-à-Pitre
Vice-Président de Cap Excellence
Président du PPDG

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