Opinion. Le Sénat veut clarifier le statut du gouvernement démissionnaire

Les élections des 30 juin et 7 juillet 2024 ont créé une situation politique et institutionnelle inédite. Des failles juridiques sont apparues, y compris au cœur de la Constitution.

Selon le Sénat, « le Président de la République utilise l’incertitude des textes pour tenter d’imposer l’impensable, maintenir en place pour une durée indéterminée un gouvernement issu d’une majorité largement défaite lors du scrutin législatif plutôt que de nommer au poste de Premier ministre une personnalité issue de la force la plus importante aujourd’hui à l’Assemblée nationale. Emmanuel Macron a, dans un premier temps, refusé la démission présentée le 8 juillet par Gabriel Attal, Premier ministre, pour l’accepter le mardi 16 juillet.

Le caractère démissionnaire du gouvernement lui confère cependant d’importantes prérogatives, édicter des décrets, par exemple, maintenir l’ordre public jusqu’à pouvoir décréter l’état d’urgence.

Or, malgré ces compétences étendues, le gouvernement démissionnaire n’est plus contrôlé par le Parlement. Impossible pour l’Assemblée nationale, par exemple, de voter une motion de censure, car on ne démissionne pas un gouvernement déjà démissionné. »

Limiter l’exercice des responsabilités par un gouvernement démissionnaire

Une situation, qui ne peut, soulignent les sénateurs, « perdurer au-delà de quelques heures ou quelques jours, au risque de mettre gravement en cause les prérogatives parlementaires, éléments incontournables de la démocratie. »

Il est donc nécessaire, insiste le Sénat, « de prévoir explicitement le caractère très provisoire de l’exercice des responsabilités par un gouvernement démissionnaire. » Une proposition de loi constitutionnelle précisant le statut du gouvernement démissionnaire a été présenté.

Quid des ministres-députés ?

Une seconde question est rapidement apparue : le cumul de fonction des ministres démissionnaires-députés

« Alors que la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen pose clairement en son article 16 le principe de la séparation des pouvoirs, acte fondamental de la Révolution française et de la République, alors que l’article 23 de la Constitution de 1958 reprend sans ambiguïté ce principe d’incompatibilité des fonctions de membre du gouvernement avec l’exercice de tout mandat parlementaire, des ministres ont pu participer aux scrutins renouvelant les instances de l’Assemblée nationale, à commencer par celui consacré à l’élection de sa Présidence. »

Des querelles d’interprétation des textes d’application ne peuvent, selon les auteurs de la proposition de loi, affaiblir « la portée de principes républicains fondateurs comme celui de la séparation incontestable entre pouvoirs exécutif et législatif » pour qui « il apparaît nécessaire de préciser la Constitution elle-même, pour échapper aux interprétations qui mettent en péril l’équilibre même de nos institutions. »

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