Opinion. La société antillaise en mutation est à un point de bascule face aux errements des jeunes générations !

PAR JEAN-MARIE NOL*

L’avenir de la société Antillaise suscite de nombreuses inquiétudes, particulièrement en matière économique et sociétale pour ce qui concerne les jeunes générations Y (nés entre 1981 et 1996), Z (nés entre 1997 et 2012), et la génération Alpha puis Bêta (nés après 2012, et grandissant avec l’intelligence artificielle).

Depuis le début du XXe siècle et l’apparition des sciences sociales, les humains ont été divisés en différentes générations sociales. Ces classes d’âge, généralement regroupées sur des plages de 20 à 25 ans, se caractérisent par des expériences sociales et individuelles communes, influencées par des marqueurs politiques, historiques, économiques qui influencent leur mode de vie, leur vision du monde, leurs valeurs…

Les experts en comportement et en sociologie s’interrogent sur les transformations profondes et les changements de paradigmes que ces générations pourraient apporter, notamment dans les domaines des secteurs d’activités économiques, des relations  familiales et de la productivité au travail.

Pour bien comprendre la problématique des générations, il faut les situer dans le contexte des époques précédentes.

La génération X, les enfants nés entre les années 1965 et 1979, a été témoin de l’émergence de la technologie, comme avec les ordinateurs personnels et les cassettes vidéo.

Elle a été suivie par la génération Y, ou les millennials, nés entre les années 1980 et 2000. Cette génération a grandi avec l’expansion d’Internet et l’avènement des réseaux sociaux, ce qui a profondément influencé sa manière de voir le monde et de communiquer.

La génération Z, née entre les années 2000 et 2010, a été la première à être née à l’ère numérique. Elle a vu l’ascension des smartphones et des réseaux sociaux comme Instagram et TikTok, et est souvent associée à une mentalité plus tournée vers le monde, une acceptation de la diversité et une préoccupation pour les questions sociales et environnementales. 

La génération Alpha, quant à elle, est née dans un monde où la technologie est omniprésente. Les jeunes Alphas sont nés dans un monde où l’apprentissage par le biais de la technologie est la norme, et où le numérique, l’automatisation, l’intelligence artificielle, la réalité augmentée et la réalité virtuelle font partie de leur quotidien, du marketing ambiant, voire de leur travail.

Les experts prévoient que la génération Alpha sera la plus instruite, la plus technologiquement intégrée et la plus prospère sur le plan économique. Ils sont également susceptibles d’être confrontés à des défis uniques, différents de ceux de leurs parents, notamment en ce qui concerne la santé mentale et le bien-être, en raison de leur immersion constante dans la technologie.

La génération Alpha se distingue par le fait qu’elle n’a jamais connu un monde sans numérique. La génération Bêta lui succède en 2024. La génération Bêta, désignant les enfants nés après 2012, grandit dans un contexte technologique sans précédent et pourraient signer le déclassement et le déclin des classes moyennes aux Antilles.

Enfants de la génération chroniquement en ligne (les Millennials et la Génération Z), les Bêta seront les premiers à vivre et à évoluer dans un monde où l’intelligence artificielle (IA) joue un rôle central. Cette immersion dans une réalité artificiellement intelligente influenceront non seulement leur manière de vivre, d’apprendre, de jouer et de travailler, mais aussi leurs perceptions de la vérité et de la réalité. 

En effet, avec la prolifération des « deepfake media » et la prédiction que 90 % des contenus en ligne pourraient être générés par l’IA d’ici 2026, ces enfants pourraient passer leur vie à chercher des repères fiables.

Quels sont les facteurs prévisibles de changement ?

Les générations Y et Z ont grandi dans un monde marqué par une digitalisation croissante et des changements sociétaux rapides. Cela a modifié leurs attentes et comportements vis-à-vis des relations familiales. Les études montrent une tendance à repousser le mariage et à réduire le taux de natalité. Les jeunes priorisent souvent leur carrière et l’avantage matériel et leur développement personnel avant de s’engager dans des relations stables et de fonder une famille.

Cette évolution entraîne une redéfinition des structures familiales traditionnelles. Les ruptures de couples sont aujourd’hui légions et les familles monoparentales et recomposées deviennent plus courantes, et le rôle des grands-parents s’intensifie, souvent comme soutien émotionnel et financier. Ces dynamiques ont exacerbé les tensions intergénérationnelles, notamment autour des valeurs et des attentes différentes.

Les générations Y et Z apportent également une nouvelle approche du travail. Elles valorisent fortement l’équilibre entre vie professionnelle et vie privée, et recherchent des emplois qui offrent du sens et de la flexibilité. Cela peut se traduire par une moins grande loyauté envers un employeur unique et une plus grande mobilité professionnelle (syndrome de la grande démission au travail). Le travail à distance et les horaires flexibles sont devenus des attentes courantes, surtout après la pandémie de COVID-19.

Ces transformations posent des défis pour les entreprises traditionnelles, qui doivent s’adapter à ces nouvelles attentes pour attirer et retenir les talents. La question de la productivité est également au cœur des débats, car le modèle de travail traditionnel est remis en question par ces nouvelles pratiques.

Avec l’apparition prochaine de la Génération Bêta il faut craindre vraiment à un grand chambardement et un nouveau départ avec l’IA. La génération Bêta, née dans un monde où l’intelligence artificielle (IA) est omniprésente, pourrait transformer encore plus radicalement la société. Ces enfants grandissent avec des outils numériques sophistiqués, et leur éducation sera inévitablement influencée par l’IA. Les experts anticipent une évolution vers des compétences axées sur la technologie et la pensée critique, ainsi qu’une dépendance accrue aux outils numériques pour l’apprentissage.

Cependant, cette immersion précoce dans la technologie pourrait également poser des problèmes, notamment sur la pérennité de l’actuel modèle social français et des conséquences néfastes en termes de socialisation et de santé mentale. L’isolement et la dépendance aux écrans sont des préoccupations majeures, et la capacité à entretenir des relations interpersonnelles pourrait être compromise. 

Avec l’IA remodelant le paysage professionnel, la génération Bêta devra s’adapter à un marché du travail en constante évolution et subira les affres de la paupérisation de la société. Beaucoup d’entre eux seront incapables de connaître le niveau de vie de leurs parents et seront quasiment dans l’impossibilité de se construire un patrimoine immobilier.

Les emplois traditionnels pourraient disparaître rapidement ou se transformer radicalement, et de nouvelles compétences seront nécessaires. La flexibilité et l’adaptabilité deviendront des atouts essentiels. Toutefois, cela pourrait également accentuer les inégalités, car tous les jeunes n’auront pas un accès égal aux ressources éducatives et aux opportunités de développement. Les conséquences sociétales seront nombreuses aux Antilles. Avec la paupérisation notamment de la classe moyenne ce sera un bouleversement total des règles de la société de la départementalisation. Les transformations apportées par ces jeunes générations pourraient entraîner un mauvais bouleversement total de la société Antillaise.

Voici quelques scénarios possibles :

– Moins de Productivité au Travail : si les attentes des jeunes générations ne sont pas alignées avec celles des employeurs traditionnels, cela pourrait se traduire par une baisse de la productivité globale au travail. Cependant, une adaptation réussie aux nouvelles normes de travail pourrait également améliorer la satisfaction et l’efficacité au travail.

– Augmentation des Divorces et des Ruptures de Couples : les changements dans les relations familiales pourraient entraîner une hausse des divorces et des séparations, notamment si les jeunes générations continuent de valoriser l’indépendance personnelle et professionnelle au détriment des engagements à long terme.

– Plus de Violence Juvenile : l’isolement social et la pression accrue pour réussir pourraient exacerber les problèmes de santé mentale et conduire à une augmentation de la violence juvénile. Des stratégies de soutien et de prévention seront cruciales pour atténuer ces risques.

– Inégalités entre Générations : les différences d’accès à la technologie et à l’éducation pourraient creuser les inégalités entre les générations, avec certains jeunes étant mieux préparés que d’autres pour les défis futurs. L’IA et l’automatisation peuvent exacerber les inégalités économiques et sociales, en particulier si l’accès aux technologies avancées est inégalement réparti. Les enfants de la génération Bêta qui n’ont pas accès à une éducation technologique de qualité risquent d’être laissés pour compte, créant une fracture sociale plus marquée

– Environnement et Durabilité : les préoccupations environnementales seront au cœur des priorités de la génération Bêta. Avec la montée des défis liés au changement climatique, cette génération pourrait être à l’avant-garde de la lutte pour la durabilité et l’innovation écologique. Leur familiarité avec les technologies avancées pourrait faciliter le développement de solutions innovantes pour un avenir plus durable.

– Travail et Carrière : l’intégration de l’IA dans le monde professionnel révolutionnera la nature du travail. Les Bêta devront s’adapter à une main-d’œuvre de plus en plus automatisée, où les compétences technologiques seront essentielles. Les emplois de service pourraient disparaître du fait de l’automatisation des tâches administratives ou se transformer radicalement, nécessitant une flexibilité et une capacité d’adaptation accrues. Les compétences en IA, en robotique et en programmation deviendront indispensables, créant un fossé potentiel entre ceux qui possèdent ces compétences et ceux qui n’y ont pas accès.

– Vie Sociale et Réalité Virtuelle : la génération Bêta évoluera dans un environnement où la réalité virtuelle et augmentée seront omniprésentes. Ces technologies transformeront les interactions sociales, les loisirs et même la conception de l’identité personnelle. Les enfants grandiront en naviguant entre les mondes physique et virtuel, ce qui pourrait redéfinir les notions de présence et de connexion humaine.

On le voit la société Antillaise se trouve à un tournant critique avec l’arrivée des générations Y, Z, Alpha et Bêta. Les transformations qu’elles apportent pourraient bien bouleverser les structures culturelles, éducatives, sociales et économiques existantes et plus encore induire un régime autoritaire en France et conduire à des guerres.

Ces transformations pour le moment apportent de nombreux avantages, mais à un proche avenir faire émerger des risques significatifs, notamment l’émergence de réponses autoritaires et de conflits. Voici une analyse prospective des nouveaux défis sécuritaires et politiques qui pourraient selon moi découler de ces évolutions. L’avènement des « deepfake media » et la possibilité que 90 % des contenus en ligne soient générés par l’IA d’ici 2026 remettent en question la notion de vérité. Cette érosion de la confiance dans les informations peut alimenter la désinformation et la polarisation sociale.

Les gouvernements autoritaires pourraient exploiter ces incertitudes pour justifier des mesures de contrôle plus strictes sur l’information et la communication, arguant de la nécessité de protéger la société contre les fausses informations. Avec l’IA et les technologies de surveillance de plus en plus sophistiquées, de nouveaux  régimes autoritaires pourraient survenir dans la sphère occidentale des Etats aujourd’hui démocratique en disposant d’outils puissants pour surveiller et contrôler la population. La collecte massive de données personnelles permet un suivi détaillé des individus, réduisant la liberté et la vie privée.

Les technologies de reconnaissance faciale et de vidéo surveillance en temps réel peuvent être utilisées pour réprimer les dissidents voire les militants de toute obédience et maintenir un contrôle social strict. Tout cela sonne bien la fin des mouvements autonomistes et indépendantistes sous leur forme actuelle, car par trop ankistés dans une idéologie tiers- mondiste passéistes et obsolètes ignorant les nouveaux rapports de force politique. Ce sont les notions même de nationalisme, de tiers mondisme, de colonialisme, de marxisme historique qui vont devoir être réellement revues et réévalués à l’aune de nouveaux paradigmes basés sur une analyse prospective.

De plus, l’automatisation et l’IA vont exacerber les inégalités économiques et sociales, et continuer son œuvre de déstabilisation de l’éducation nationale déjà en situation d’échec. Beaucoup des emplois traditionnels vont  disparaître, créant une division entre ceux qui bénéficient des nouvelles technologies et ceux qui sont laissés pour compte. Cette fracture sociale va nécessairement conduire à une instabilité politique et à des mouvements de contestation violents . En réponse, certains gouvernements pourraient adopter des politiques ultra-répressives pour contenir les troubles sociaux. Mais le pire à venir est le risque de conflits et de guerres du fait des interactions sur la géopolitique mondiale autour des technologies de pointe .

La domination technologique deviendra un enjeu stratégique majeur. Les pays cherchent déjà à développer et à contrôler les technologies de pointe pour assurer leur sécurité nationale et leur influence mondiale. Cette course à la technologie peut entraîner des tensions et des conflits géopolitiques, notamment autour des ressources nécessaires à la production de technologies avancées et de la cybersécurité. La manipulation de l’information à grande échelle est actuellement un outil de guerre moderne. Les cyberattaques et la diffusion de propagande par le biais des réseaux sociaux peuvent déstabiliser des pays entiers. Les États autoritaires peuvent utiliser ces tactiques pour affaiblir leurs adversaires, tandis que les actuelles démocraties doivent trouver des moyens de se défendre contre ces menaces asymétriques. 

Mais ne nous leurrons pas, cette défense des démocraties face aux menaces sera inopérante car les fractures sociales et économiques exacerbées par l’IA et l’automatisation vont vraisemblablement alimenter la radicalisation et l’extrémisme. Les groupes marginalisés peuvent se tourner vers des idéologies violentes comme réponse à leur exclusion perçue. Ces dynamiques peuvent provoquer des conflits internes sur le plan national et international, nécessitant des réponses complexes et répressives des gouvernements. En somme et pour conclure, nous dirons que les générations Z , Alpha et Bêta sont à l’avant-garde d’une ère de changements technologiques sans précédent.

La génération Bêta, celle qui nous concernera demain en tant que première à grandir avec une intelligence artificielle omniprésente, est destinée à vivre des transformations sociétales profondes. Leur éducation, leur vie professionnelle et leurs interactions sociales seront façonnées par des technologies avancées, posant des défis uniques et des opportunités sans précédent. La société devra s’adapter et mettre en place des structures de soutien adéquates pour aider cette génération à naviguer dans un monde en constante évolution, tout en s’efforçant de réduire les inégalités et de promouvoir la durabilité.

Si ces mutations et transformations apportent de nombreux avantages, elles posent également des risques significatifs de réponses autoritaires et de conflits. Pour naviguer sans craintes entre ces défis, une approche proactive, intégrant la protection des libertés démocratiques, l’éducation, les politiques d’inclusion et la coopération internationale, est essentielle. Seule une action internationale concertée pourra assurer que les bénéfices des technologies avancées soient partagés équitablement et que les menaces soient efficacement gérées.

« Tout bwason ka soulé, sé ronm sèl ki ni bon do « .

– traduction littérale :  Tous les alcools enivrent, c’est le rhum qui a bon dos (qui a mauvaise réputation);

– moralité : Exprime l’exaspération d’être rendu responsable de tous les maux, y compris de ceux des jeunes qui vont porter le chapeau de la déconfiture de la société….

*Economiste

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