Opinion. Finances publiques : « La dégradation du déficit aura des répercussions en 2024 »

Le Sénat poursuit ses travaux notamment sur la dégradation des finances publiques depuis 2023 et émet des préconisations.

Avec un déficit public susceptible de s’établir à 5.6 % du PIB en 2023, un niveau inédit, contre une prévision en fin d’année dernière de 4,9 %, Jean-François Husson, rapporteur général de la commission Finances du Sénat, présidée par Claude Raynal, a présenté le rapport de la mission d’information sur la dégradation des finances publiques depuis 2023.

 « Des niveaux plus élevés de déficit n’étaient intervenus, au cours de la Ve République, qu’au moment de la récession de 1993, suite à la réunification de l’Allemagne et à la crise du système monétaire européen, au lendemain de la crise financière de 2008 et lors de la crise sanitaire de la covid-19, épisodes où l’État a dû faire face à la fois aux conséquences de la dégradation de l’activité et à la nécessité de soutenir l’économie », commente la commission Finances du Sénat.

Le déficit public entre 2017 et 2023 connaît une augmentation massive, passant de 3,4 % à 5,5 % du PIB, et, en milliards d’euros, de 77 à 154 milliards d’euros, soit un doublement.

Cette évolution est essentiellement le fait du budget de l’État et de ses opérateurs, dont le déficit est passé dans cette période de 3,6 à 5,6 % du PIB.

Des recettes plus faibles qu’attendues

Ce niveau particulièrement élevé de déficit n’était pas prévu, ni à l’issue de l’examen du projet de loi de finances pour 2023, qui prévoyait un solde public de – 5 % du PIB pour l’année à venir, ni lors de l’examen des textes financiers de la fin de l’année 2023 (loi de programmation des finances publiques pour 2023-2027, loi de finances de fin de gestion pour 2023, loi de finances pour 2024), qui anticipaient un solde de – 4,9 % du PIB pour 2023. L’écart de 0,6 point de PIB entre les prévisions et le solde exécuté est inédit : sur les 25 dernières années, un tel écart n’a été observé qu’en 2008, lors de la crise financière.

« À la différence de l’année 2008, l’écart entre les prévisions et l’exécution n’est pas dû à une erreur de prévision de croissance, celle-ci s’étant élevée à + 0,9 % en 2023, proche du + 1 % prévu, mais à un niveau de recettes plus faible qu’espéré. Avec une politique fiscale inchangée, un même niveau de croissance peut affecter différemment le déficit public, en particulier parce que les prélèvements obligatoires ne réagissent pas avec la même intensité à la croissance du PIB », souligne Jean-François Husson.

S’agissant du budget de l’État, la dégradation du déficit par rapport à la prévision initiale s’explique par des moins-values fiscales de grande ampleur, malgré des expédients budgétaires pour limiter la dépense en fin d’année. Le déficit budgétaire de l’État, prévu à 164,9 milliards d’euros par la loi de finance initiale pour 2023, puis à 172,4 milliards d’euros en loi de finances de fin de gestion, a finalement été de 173,0 milliards d’euros en exécution, soit 8 milliards de plus que prévu initialement. « La moins-value constatée sur les recettes par rapport à la prévision de fin d’année (- 7,8 milliards d’euros), atteint un niveau inédit dans l’histoire récente et n’aurait pas eu lieu si les prévisions avaient été établies à un niveau plus réaliste », constatent les sénateurs.

Quel impact en 2024 ?

Cette forte dégradation du déficit pour 2023 aura un impact important sur l’année 2024. En particulier, si les recettes ont été moindre qu’attendues en 2023, c’est que la base taxable sur laquelle elles sont assises a évolué moins vite que prévu et que, conséquemment, elle sera également moins large que prévu pour 2024.

L’évolution des recettes est toujours tributaire de la dimension cyclique de l’élasticité des prélèvements obligatoires au PIB, évaluée pour le moment à 0,8 pour 2024, mais soumise à de fortes incertitudes. À titre d’exemple, le mauvais résultat sur l’impôt sur les sociétés en 2023 permet d’ores et déjà de craindre un produit de cet impôt inférieur aux prévisions en 2024.

Les recommandations du Sénat

Parmi les 15 recommandations adressées au gouvernement par la mission d’information du Sénat, notamment pour améliorer les prévisions de recettes et de déficit public :

• Améliorer le suivi des recettes des administrations publiques locales et des administrations de sécurité sociale, incluant les recettes affectées par l’État.

• Dans les prévisions d’impôt sur les sociétés, ne pas inclure de prévision pour le cinquième acompte net de l’autolimitation.

• Réaliser une étude interne pour comprendre les raisons des retards rencontrés dans le traitement des remboursements de TVA en 2023 et mettre en place des mesures correctives en 2024, afin d’améliorer la prévision des recettes de cet impôt.

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