PAR PHILIPPE KALIL
La Cci des îles de Guadeloupe n’échappe pas aux critiques formulées par la Cour des comptes dans son rapport annuel.
Il est vrai qu’un retour à l’équilibre économique à court terme est peu probable. La dépendance vis à vis des taxes versées par les entreprises de la Guadeloupe demeurera encore un certain temps. Le déficit annoncé dans le budget rectifié de 2020 est de plus d’un million d’euros et ne sera pas inférieur dans le budget primitif de 2021. La capacité d’autofinancement n’existe plus. Elle est même devenue négative. Le fonds de roulement diminue dangereusement
Pourtant, des taxes sont perçues pour permettre le financement de la chambre de commerce et d’industrie (CCI) dont relèvent les commerçants, industriels, prestataires de services pour cinq millions d’euros environ par an. C’est sans surprise qu’un bilan désastreux sera présenté à la prochaine assemblée générale. Au moment même où les listes électorales se constituent pour le scrutin de novembre prochain.
Que s’est il passé ?
Il est vrai que la taxe pour frais de chambre, payée par les entreprises et dont elle touchait le bénéfice, a été progressivement réduite par les différents gouvernements depuis 2013.
La logique de la réforme initiée par l’Etat, est de transformer la CCI « en prestataire de services, financé non plus par une taxe affectée payée par les entreprises, mais par le produit de l’activité des chambres », estime la Cour des comptes.
Or, les domaines où la CCI Guadeloupéenne devrait se développer afin de trouver de nouvelles ressources et pallier la baisse des recettes fiscales sont la formation, la gestion d’infrastructures, et l’appui aux entreprises.
C’est précisément dans ces deux premières activités qu’elle réalise des pertes récurrentes considérables. Dans la troisième, les initiatives sont peu nombreuses mise à part la dispense gratuite d’information.
Le projet de se substituer au greffe du tribunal n’a pas abouti et s’est soldé par des pertes supplémentaires. Le secteur formation continue inexorablement sa chute. La classe préparatoire aux grandes écoles de commerce a même été fermée. La gestion du CWTC devient calamiteuse compte tenu de l’effondrement du secteur de l’événementiel (salons, locations de salles). Il ne faut pas non plus compter sur les dividendes de la participation détenue dans l’aéroport (SA GPC) en raison de la grave crise que traverse le secteur aéronautique.
Mais, ce qui est préoccupant, c’est la « connaissance précise des besoins à satisfaire, des acteurs présents sur le marché et des segments de marché sur lesquels l’offre des CCI pourrait être la plus pertinente qui demeure superficielle », juge la Cour.
L’appui aux entreprises devrait être renforcé. D’ailleurs, des fonds supplémentaires à hauteur de 551 000€ en 2020 ont été consentis à la Cci pour aider les entreprises à traverser la crise du Covid. Quelle en est l’utilisation précise ? Est ce qu’ils servent uniquement à compenser en partie l’absence des dividendes de l’aéroport pour réduire le déficit général ?
Pour la Cour, « les réformes engagées demeurent inabouties » et « leur succès est loin d’être garanti. »
Du coup , pour faire face à cette baisse globale de ressources, le programme d’investissement a été stoppé ou différé et de nombreux actifs immobiliers sont mis en vente. Alors qu’on devrait continuer à investir dans les activités lucratives telle que la gestion d’infrastructures par exemple. Pourquoi ne pas développer une politique commerciale tournée vers les besoins des entreprises ?
Jusqu’où ira la dégringolade si la Cci ne s’engage pas à réformer son organisation et à améliorer l’efficience de son action ?
Il faut profiter d’une stabilisation du niveau de ressources pour les CCI en 2021 pour redresser la barre. L’Etat a revu sa position sur le plafonnement de la ressource fiscale à cause de la crise. La situation reste tendue et incertaine pour les années à venir.
Elle devrait travailler à la prévention et l’accompagnement des difficultés financières des entreprises. Des diagnostics financiers doivent être mis en œuvre .Elle doit appuyer la transformation numérique et écologique des entreprises.
* Philippe Kalil est expert-comptable