Porté par Vanessah Machire, Medibox, concept innovant, consiste à aménager des conteneurs en habitats seniors, adaptés à leur niveau d’autonomie et installés sur le terrain de leurs proches. Entretien.
Qu’est-ce qui vous a inspiré ce projet innovant d’habitat pour rapprocher les seniors de leur famille tout en préservant leur indépendance ?
Vanessah Machire : Comme beaucoup, tant qu’on n’a pas été confronté à une situation, on n’en prend pas pleinement conscience. Quand j’ai quitté la Guadeloupe après le bac pour mes études, je revenais pour les vacances et j’étais frappée, à chaque fois, par la transformation physique, particulièrement de ma grand-mère. Je constatais qu’elle avançait en âge, qu’elle commençait à ne plus pouvoir assumer certaines taches… Pourtant, elle vivait seule dans sa grande maison : elle a eu 8 enfants !
Quand elle a vraiment nécessité de l’aide, les enfants se sont organisés avec leurs obligations quotidiennes, mais elle restait seule, loin de sa famille. Je trouvais cela dommage, surtout dans notre société antillaise où les familles sont très proches : je me souviens des dimanches chez mamie avec toute sa famille autour d’elle et je trouvais que cette tradition se perdait petit à petit.
Ce constat, plus les chiffres, sur le vieillissement de la population, qui parlent d’eux-mêmes : 1 senior sur 5 est dépendant. Les seniors sont vraiment très isolés : certains attendent la visite de la semaine qui illumine leur quotidien, ce qui crée des états dépressifs, un arrêt des soins… et beaucoup d’autres conséquences négatives. Ceci, plus mon histoire personnelle, m’ont poussée à quitter le salariat pour prendre le temps de réfléchir à un projet.
Depuis juin 2022, vous travaillez sur ce nouveau concept…
Oui. Avant, j’évoluais dans les assurances, puis l’automobile en management de la qualité et gestion de projets. Quand j’étais salariée, j’avais juste l’idée, pas très concrète : je savais qu’il y avait un besoin, mais je manquais de temps pour travailler à cette idée, collecter des chiffres, des infos… Depuis que j’ai quitté mon emploi, il y a deux ans, je creuse vraiment, j’effectue des démarches pour trouver des fournisseurs, faire des études de marché, participer à des salons, des foires, des concours pour présenter le concept.
Quelle est la particularité de Medibox ?
Il s’agit d’aménager des conteneurs pour que les seniors soient comme à la maison. L’innovation du concept c’est que ces conteneurs, adaptés à la perte d’autonomie des seniors, sont destinés à être installés dans les jardins des familles pour que le senior, tout en conservant son indépendance et son intimité, soit au plus près des siens, qu’il puisse voir ses petits-enfants après l’école, par exemple.
C’est une alternative aux placements classiques en établissements destinés aux seniors ?
Je veux vraiment proposer autre chose. Ce concept ne pourra pas s’adapter à toutes les familles, mais il peut être utile à des collectivités, des entreprises… qui disposent de terrains. J’ai été contactée par plusieurs Centres communaux d’action sociale pour reloger des personnes qui occupent des habitats insalubres et manquent de financements et de temps pour construire un bâtiment. Le logement en conteneur étant très rapide, c’est un avantage supplémentaire.
Votre projet, plusieurs primé, en est à quel stade ?
La société est immatriculée, le prototype est en finalisation, les premières commandes sont passées. Les premières livraisons auront lieu en septembre 2024. La principale difficulté reste le financement. Medibox bénéficie de mes fonds propres et ceux de mon associé.
Les banques étant très frileuses, je suis encore en recherche de financement. J’ai la chance d’avoir été lauréate du réseau Entreprendre (2024), du Village By CA et plus récemment de Be a Boss Antilles-Guyane. Suite à ce dernier concours, la Bpi et une banque m’ont contactée… Ces concours font bouger les choses, permettent de gagner en visibilité. Quand on est reconnu au concours Be a Boss, cela signifie que notre projet a de la valeur, qu’il compte et qu’il vaut la peine d’être regardé et je pense que c’est ainsi que l’entendent les investisseurs et les financiers. Mais, pour une jeune entreprise, cela reste très compliqué d’obtenir des financements.
Entretien : Cécilia Larney
