Martinique. Le mouvement social anti-passe se cherche un nouveau souffle

Réunions intersyndicales, communiqués de presse, coups de force,
l’intersyndicale levée contre le passe sanitaire et la vie chère se
cherche de nouveaux engagements populaires pour redonner du crédit au mouvement.

Depuis une semaine où les négociations sont difficiles à tenir, notamment à cause des cas avérés de contamination au covid, des réunions en interne visant à une remobilisation des troupes sont menées de manière collégiale ou individuelle. Globalement, les syndicats voient la difficulté persistante de la tenue des ateliers et de la poursuite des négociations comme un « simulacre » du gouvernement.

De plus, après les déclarations du Premier ministre Jean Castex, le 17 décembre, d’un passage du passe sanitaire au passe vaccinal dans les prochaines semaines, l’intersyndicale se sent clairement flouée après les déclarations prometteuses du ministre des Outre-mer, Sébastien Lecornu, lors de son passage aux Antilles.

  La goutte de trop :
le maintien des sanctions

  Sébastien Lecornu avait avancé l’idée d’une adaptation de la loi du 5 août 2021 pour la Martinique et la Guadeloupe. Notons qu’au préalable, le mouvement de grève prônait l’abrogation de la loi pour les départements Antilles-Guyane.

Mais, plus encore, le 20 décembre, la note d’information de la directrice par intérim du CHU de Martinique, Dominique de Wilde, et son annonce du maintien des sanctions contre le personnel non-vacciné à partir du 1er janvier 2022 n’a fait qu’alerter un peu plus les syndicats. Sans parler, encore, de la mort, le 20 décembre toujours, de deux présidents syndicaux des suites du Covid.

Le blocage de l’Agence régionale de santé pourrait être d’une signe d’une reprise des manifestations.


De fait, après moult réunions de synthèse, la mobilisation semble vouloir se réactiver et le blocage de l’accès de l’Agence régionale de santé, mercredi 22 décembre, ne vient que confirmer les pires craintes pour la suite des événements. Encore qu’un court répit devrait soulager les jours de fête.

  Rodolf Etienne

Retour sur les principaux événements des dernières
semaines de mobilisation

6 novembre : La médiation entre le gouvernement et l’intersyndicale
santé engagée contre la loi du 5 août 2021 est un échec.

10 novembre : Une nouvelle intersyndicale regroupant 20 organisations
se réunit à la Maison des syndicats, à Fort-de-France. Elles lancent un préavis de grève pour le 15 ou le 22 novembre. Les revendications
portent entres autres contre l’obligation vaccinale, la hausse du prix du gaz et pour la survie des chauffeurs de taxis.

  Grève générale pour
13 points de revendications

22 novembre : Début de la grève générale pour 13 points de revendications dont le retrait de l’obligation vaccinale, la vie chère, le chlordécone, la pêche, le prix du gaz, la situation des artistes martiniquais et de la jeunesse martiniquaise, et blocage des principaux axes routiers de l’île et du port maritime de Martinique.

Des barrages ont paralysé la Martinique pendant une semaine.

  Début des négociations

23 novembre : L’intersyndicale est reçue en Préfecture par le préfet Stanislas Cazelles. Les syndicats demandent au préfet d’ouvrir une large concertation sur l’obligation vaccinale mais aussi sur les autres points de la plateforme de revendication. Les barrages sont levés. Le mouvement se poursuit.

25 novembre : Nouvelle rencontre en Préfecture entre les syndicats et le Préfet. Echec des négociations. Le mouvement se poursuit.

27 novembre : Un accord de méthode des négociations est trouvé entre
l’intersyndicale, le préfet et le président de l’exécutif de la CTM. Les négociations doivent débuter le lundi 29 novembre autour de 7 ateliers thématiques : santé, jeunesse, vie chère, prix des carburants, bouteille de gaz, transports, chlordéconomie, pêche, culture.

29 novembre : Les ateliers sont ajournés pour cause d’incompréhension entre les parties. Les négociations sont de nouveau à l’arrêt.

  Rencontre avec Sébastien
Lecornu, ministre des Outre-mer

30 novembre : Visite en Martinique et en Guadeloupe du ministre des Outre-Mer, Sébastien Lecornu. Une délégation de l’intersyndicale est reçue en Préfecture par Sébastien Lecornu, Stanislas Cazelles, préfet de Martinique, et Serge Letchimy, président de l’exécutif de la Collectivité territoriale de Martinique (CTM). L’idée d’une adaptation de la loi du 5 août 2021 pour la Martinique et la Guadeloupe est évoquée lors des échanges, ainsi que le renvoi au 31 décembre de la date butoir de première injection du vaccin contre le Covid.

2 décembre : Tenue du premier atelier santé à la Préfecture, entre l’intersyndicale, les services de l’Etat et la CTM. La date butoir de l’obligation vaccinale pour le personnel soignant est validée au 31 décembre 2021. Autres points de discussion : les suspensions à l’encontre du personnel soignant non-vacciné et le passe sanitaire. Les barrages sont levés. Le port de Martinique reste bloqué.

  L’activité reprend,
le mouvement se poursuit

4 décembre : Le tribunal judiciaire de Fort-de-France ordonne la mise
en place d’une médiation entre la direction du port et l’intersyndicale.

6 décembre : Après deux semaines de conflit, les activités reprennent en Martinique. Le Préfet Stanislas Cazelles annonce avoir été testé positif au Covid-19. Il est placé en isolement. La médiation engagée se poursuit entre direction, syndicat du port, et intersyndicale pour la levée des barrages du port.

7 décembre : Fin du conflit autour du port de Martinique. En remplacement de Benjamin Garel qui a quitté ses fonctions le 30
novembre 2021, Dominique de Wilde, inspectrice générale des affaires
sanitaires sociales, ancienne directrice du CHU de Reims, est nommé
directrice générale par intérim du CHU de Martinique, avec à ses côtés,  le directeur d’hôpital Thierry Lugbull.

  Le Covid s’invite dans le mouvement, poursuite des négociations

8 décembre : L’atelier santé est suspendu pour cause de suspicion de cas de covid au sein de l’intersyndicale.

10 décembre : L’atelier santé se réunit à nouveau à la Préfecture en visio et en présentiel.

13 décembre : Tandis que plusieurs ateliers sont engagés, l’atelier jeunesse tourne court, la légitimité de ses représentants étant remise en cause.

14 décembre : Une plateforme est mise en ligne par la Collectivité territoriale de Martinique (CTM) à l’attention du grand public pour participer aux ateliers thématiques. Les syndicats présentent leur
premier bilan des négociations, globalement insatisfaits. Selon eux « l’Etat a choisi de faire trainer les choses. Il montre clairement qu’il veut imposer unilatéralement sa solution, c’est une reddition purement et simplement ». Un  appel au rassemblement interne est lancé par les syndicats pour la suite à donner au mouvement.

15 décembre : L’atelier transport tire des conclusions positives des
négociations.

17 décembre : Les services de l’Etat, autour du Préfet de Martinique, présentent à leur tour leur premier bilan des négociations. Des mesures sont annoncées pour chacun des ateliers, qui doivent encore se poursuivre. L’intersyndicale présente un bilan de l’atelier santé du 10 décembre à la Préfecture, estimant que ses doléances n’ont pas été reçues et qu’elle n’a pas été prise au sérieux. Les syndicats rappellent qu’ils ont interpellé les autorités sur les conséquences au 31 décembre 2021 de l’application de la loi en Martinique dans le contexte de crise sanitaire. En France, le Premier ministre Jean Castex annonce qu’un projet de loi sera
soumis au Parlement début janvier pour transformer le passe sanitaire en passe vaccinal.

20 décembre : Note d’information de la directrice par intérim du CHU de Martinique, Dominique de Wilde. Les personnels qui  n’ont pas communiqué leur statut vaccinal sont priés, par recommandé avec. accusé de réception, de se faire connaître auprès de leur direction.
La date butoir du 31 décembre est avancée pour la présentation de la première injection de vaccin contre le Covid. Des suspensions sont annoncées passé ce délai.

Aimé Agat, président du syndicat pour la défense des artistes martiniquais (SDAM).

Alain Decaille, président de la Fédération des Taxis Indépendants (FTI), hospitalisé depuis trois semaines, meurt des suites du Covid. Aimé Agat, président du syndicat pour la défense des artistes martiniquais (SDAM), décède des suites du Covid. Des instances d’écoute et de dialogue pour les professionnels de santé non-vaccinés en Guadeloupe et Martinique, cellules d’accompagnement et de reconversion professionnelle, sont mises en place. Officiellement, elles ont été lancées en Guadeloupe depuis le 6 décembre et en Martinique, le 15 décembre.

  L’intersyndicale cherche
un nouveau souffle

21 décembre : L’intersyndicale se réunit à la Maison des syndicats, à Fort-de-France. Annonce de la reprise des actions contre l’obligation vaccinale et les autres thématiques du mouvement.

22 décembre : Publié au Journal Officiel, les cancers de la prostate liés à l’exposition au chlordécone sont reconnus comme une maladie professionnelle.

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