Rencontre avec Sylvie Gustave-Dit-Duflo, présidente de l’Office Français de la Biodiversité et chargée de la politique environnementale de la Région Guadeloupe. Elle met en avant l’économie circulaire comme instrument d’une biodiversité dynamique.
En quoi consiste l’économie circulaire ?
L’économie circulaire (EC) vise à limiter le gaspillage des ressources naturelles et l’impact environnemental qui en découle (production massive de déchets, sites d’enfouissement des déchets qui impactent pour des siècles les sous-sols, incinérateurs pour brûler ces déchets avec des rejets de fumées chargées de toxines dans l’air,…) en augmentant à tous les stades de fabrication d’un produit, la sobriété des procédures de fabrication.
L’EC s’oppose à l’économie linéaire qui est le fondement actuel de notre société qui a pour principes l’utilisation des ressources naturelles de manière infinie et qui base notre mode de vie sur l’utilisation toujours plus ascendante de ces ressources. Ce qui est une aberration. Si ce paradigme n’est pas inversé au profit de l’EC, nous risquons, à très courts termes, l’épuisement total des ressources naturelles de notre planète.
Comment mettre en place ce concept en Guadeloupe ?
La Région Guadeloupe agit sur 2 leviers pour faire rentrer l’EC dans le quotidien des guadeloupéens.
Sur le volet économique en faisant émerger la CRESS (chambre régionale de l’économie sociale et solidaire) qui permet de structurer toutes les entreprises et les associations qui œuvrent dans ce domaine (entreprises de recyclage, les épiceries solidaires, les associations d’insertion à l’emploi,…).
Sur le volet environnemental, en accompagnant, le citoyen à une mobilisation autour de l’EC en réalisant le village régional de l’EC qui accueille et donne de la visibilité aux professionnels et aux associations impliqués dans le recyclage, le ré-emploi, la seconde vie des objets du quotidien. Certains de ces projets sont aussi labellisés et financés dans le cadre de l’AAP (appel à projets) « Un éco projet pour ma Guadeloupe » que lance chaque année, la région Guadeloupe.
Où en est le plan pour la mise en place des déchèteries ?
Le plan déchèteries, lancé en 2017 par la Région Guadeloupe, permet la construction de 8 nouvelles déchèteries et la rénovation de celle de Capesterre Belle-Eau. L’objectif de ce plan était multiple :
. Mailler le territoire et particulièrement les zones carencées : la Basse-Terre était dans ce cas.
. Maîtriser les coûts de gestion des déchets : la présence de déchèterie à proximité des citoyens réduit la collecte en porte-à-porte, permet une meilleure prise en charge du recyclage des déchets par les éco-organismes et limite le tonnage des déchets enfouis.
. Dépolluer et revaloriser des sites particulièrement dégradés ou lieu d’anciennes décharges sauvages et donner une 2nde vie à ces sites : Pointe-Noire, Bouillante, Baillif, Petit-Bourg…
Aujourd’hui, le bilan est le suivant :
Une déchèterie livrée en 2020 et en fonction : Pointe-Noire
– 3 déchèteries en construction avec une livraison prévue au cours de l’année 2022 : Bouillante, Terre-de-Bas, Baillif
– 5 déchèteries en préfiguration (3 à 4 comités de pilotage ont déjà eu lieu) avec une entrée en construction en 2022 et une fin de livraison prévue entre fin 2022 et 2023 : Terre-de-Haut, Trois-Rivières, Petit-Bourg, Goyave et Capesterre Belle-Eau
L’Europe aidera-t-elle la région à mettre en œuvre l’économie circulaire ?
Dans ces programmes opérationnels de fonds européens de 2014-2020 la région a utilisé des crédits pour mener sa politique sur l’EC et pour le programme 2021-2027, c’est plus de 3 millions d’euros qui sont fléchés pour développer l’EC.
Ne faudrait-il pas pousser l’ambition jusqu’à l’enseigner l’économie circulaire dans les établissements scolaires sous formes de modules SVT ?
La région Guadeloupe est convaincue qu’un des leviers de la mobilisation citoyenne est l’éducation au développement durable. Le rectorat de la Guadeloupe réalise un forum à l’éducation au développement durable (EDD) auprès des étudiants (collégiens et lycéens) chaque année, et la région Guadeloupe est l’un des partenaires. Mais nous pensons qu’il faut aller plus loin et enseigner cette EDD chaque année aux écoliers, depuis l’école primaire jusqu’en terminale, et ce quelles que soient les filières. A partir de l’université, il faudrait que les étudiants puissent produire un projet d’insertion professionnelle en relation avec leur filière d’enseignement, mais aussi en tenant compte des bases du développement durable. C’était une proposition faite par la Région Guadeloupe dans le cadre du projet de loi Résilience et Climat et qui n’a pas été retenue.
Propos recueillis par André-Jean VIDAL