Lundi 9 novembre, à 9 heures, en Martinique, s’est ouvert au tribunal de Fort-de-France, le procès du militant anti-chlordécone Kéziah Nuissier. L’affaire a été renvoyée au 17 mars 2021.
Etudiant martiniquais de 22 ans, Kéziah Nuissier était jugé pour « faits de violence sur personne dépositaire de l’autorité ». L’affaire, renvoyée au 17 mars 2021, remonte au 16 juillet. Lors d’une manifestation aux abords du commissariat de Fort-de-France. Ce jour-là, une vingtaine de militants rouge-vert-noir ou anti-chlordécone se retrouvent devant le commissariat du centre-ville, à la rue Victor Sévère. Ils viennent soutenir trois d’entre eux devant répondre de violences sur personne dépositaire de l’autorité. C’est dans ce cadre que Kéziah Nuissier aurait porté des coups à des policiers, selon les forces de l’ordre. Kéziah Nuissier affirme l’inverse. Au moment où il aurait voulu aider sa mère attaquée par ces mêmes policiers, il aurait reçu des coups. Kéziah Nuissier, transporté d’urgence à l’hôpital, est alors placé sous contrôle judiciaire. L’affaire défraie la chronique.
La tension monte et les partis se divisent
Le procureur saisit alors l’Inspection Générale de la Gendarmerie Nationale (IGGN) et l’Inspection Générale de la Police Nationale (IGPN) pour faire toute la lumière sur l’affaire. Convoqué une première fois, Kéziah Nuissier obtient le renvoi après avoir présenté des certificats médicaux attestant de son incapacité à se déplacer. Le procès est renvoyé au 27 août, puis au 9 novembre.
Depuis, l’enquête de l’Inspection Générale de la Gendarmerie Nationale (IGGN) et l’Inspection Générale de la Police Nationale (IGPN) a conclu que deux des gendarmes avaient commis des délits lors de l’interpellation du jeune homme, mais que celle-ci demeurait légitime. Les avocats de Kéziah Nuissier, Me Eddy Arneton et Raphaël Constant, accusent alors le procureur de la République de partialité et portent plainte contre l’hôpital Pierre Zobda Quitman pour ne pas avoir interrompu la garde à vue de leur client pour raisons médicales.
Des vidéos compromettantes
L’affaire prend aujourd’hui une autre tournure. Des vidéos circulaient sur les différents réseaux où l’on peut entendre des policiers insulter le jeune homme et déclarer, entre autres : « Et les gars, faut qu’on leur foute dans la g… un peu. On est là pour ça ». D’autres vidéos ont également été présentées, par la justice cette fois, montrant Kéziah Nuissier en train de frapper des policiers. Difficile donc d’y voir clair pour la défense avec ces nouveaux éléments. Les avocats de la défense, Eddy Arneton et Raphaël Constant, ont de fait réclamé un nouveau renvoi de l’affaire, notamment pour une meilleure analyse de toutes les vidéos. Réclamation entendue du côté de la magistrature, même si les deux avocats écopent d’une menace de procédures disciplinaires et pénales.
Rodolf Etienne
Une affaire à rebondissements
L’affaire Kéziah Nuissier provoque de grands remous au sein de la population, ainsi que chez les politiques. Les députés Josette Manin et Jean-Philippe Nilor, les maires Jean-François Beaunol, Georges Cléon, Marcellin Nadeau, Aurélie Nella, Samuel Tavernier, Hugues Toussay et David Zobda assurent la défense de leur soutien et appellent l’Etat à la prudence. A Paris, des inscriptions « Justice », « Kéziah » et « Gendarmerie coloniale » étaient taguées dimanche sur les façades du ministère des Outre-mer.