Histoire. 1er décembre 1999 : Signature de la Déclaration de Basse-Terre

PAR ANTONY JEAN

Retour sur un évènement historique de la vie politique des Antilles-Guyane : la signature de la Déclaration de Basse-Terre, il y a vingt-deux ans.

L’évènement se déroule à proximité du bureau de la présidente, au palais du Conseil Régional, à Basse-Terre, en Guadeloupe, le mercredi 1er décembre 1999. Lucette Michaux-Chevry, hôtesse des lieux et figure de la droite locale, ainsi que ses homologues de Guyane, le socialiste autonomiste Antoine Karam, et de Martinique, l’indépendantiste Alfred Marie-Jeanne, entrent dans l’histoire politique des Antilles-Guyane.

Sous les crépitements des flashes des appareils photos et dans la lumière crue des projecteurs des caméras, ils viennent de signer un document de deux pages, intitulé « Déclaration de Basse-Terre ».

Pour la première fois dans l’histoire des trois dernières colonies françaises d’Amérique, les trois collectivités majeures parlent d’une seule et même voix, non pas pour demander plus d’argent ou plus d’assimilation, mais au contraire, réclamer davantage de responsabilités locales.

La Déclaration de Basse-Terre constate « la dégradation continuelle depuis de nombreuses années » de la situation des trois Régions, dégradation qui se manifeste par « un affaiblissement des filières productives, la déstabilisation financière des collectivités, un assistanat généralisé, un taux de chômage croissant ».

Elle pointe également du doigt « le développement rapide des dérives sociales, destructrices (…) en particulier pour les jeunes générations dont les perspectives d’emploi apparaissent de plus en plus aléatoires ».

Les trois présidents regrettent « l’inadéquation d’un dispositif fiscal et social conçu pour un pays développé et appliqué à des Régions en retard de développement » et déplorent leur impuissance à résoudre les problèmes qui se posent. Ils mettent en exergue l’impossibilité d’un développement économique qui ne serait pas fondé sur les réalités propres à leurs territoires. 

Les trois exécutifs déclarent vouloir « unir leurs efforts afin de bâtir un projet de développement économique, social et culturel impliquant la prise en compte des identités propres à chaque Région et basé sur l’évidence que la dignité procède du travail et non de l’assistanat ». Ce projet de développement passe par la création d’emplois et d’activités productives afin d’en finir avec la société de consommation et « le cycle infernal de l’emploi assisté ».

La Déclaration de Basse-Terre revendique enfin une évolution statutaire des trois régions monodépartementales.

Cette initiative prend de court les états-majors politiques locaux autant que les préfets des trois départements. Ce qui n’empêche pas l’idée de faire son chemin.

C’est ainsi que la Loi d’orientation pour l’Outre-mer de décembre 2000 prévoit la possibilité de délibérations des Congrès des élus départementaux et régionaux, ouvrant la voie à une consultation des populations. En Guadeloupe, les conseillers départementaux et régionaux, réunis en Congrès, le 11 octobre 2003, proposent au gouvernement l’institution d’une collectivité unique, se substituant au Département et à la Région pour l’ensemble de leurs compétences, tout en bénéficiant de compétences nouvelles qui pourraient lui être apportées sur le fondement de l’article 73 de la Constitution.

Conformément à l’article 72 de la Constitution, modifié en 2001, et sur décision du président de la République, les électeurs de la Martinique et de la Guadeloupe sont consultés, par référendum, le 7 décembre 2003, sur le projet d’évolution institutionnelle de leurs départements respectifs.

Ce projet est rejeté par les électeurs de la Guadeloupe à 72,98 % et par ceux de la Martinique à 50,48 %. Ces deux échecs ont pour conséquence de freiner momentanément la réflexion, dans l’ensemble des DOM, sur l’évolution institutionnelle.

Le débat est relancé, en 2008, avec un changement statutaire, plébiscité par les populations de Saint-Barthélemy et Saint-Martin qui deviennent des Collectivités d’Outre-Mer (COM), régies par l’article 74 de la Constitution.

Deux ans après, la Guyane et la Martinique suivent le mouvement, lors des consultations des 10 et 24 janvier 2010, en actant la création de leurs Collectivités Territoriales respectives, régies par l’article 73 de la Constitution.

Vingt-deux ans après sa signature, la Déclaration de Basse-Terre, déclaration d’intention autant que véritable orientation politique, reste plus que jamais d’actualité, les freins au développement que ce document évoquait n’ayant toujours pas disparu.

La rentrée solennelle de la Faculté des sciences juridiques et économiques de la Guadeloupe, le 9 novembre 2018, avait justement pour thème : « Que reste-t-il de la Déclaration de Basse-Terre ? ».

Pour l’anecdote, sur les trois invités d’honneur, en l’espèce les trois signataires de la fameuse déclaration, seuls Antoine Karam et Alfred Marie-Jeanne étaient présents.

La déclaration de Basse-Terre :

Antony Jean donne régulièrement des chroniques sur l’histoire
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