Une grande partie de l’hôpital Bernard Mevs a été vandalisée et incendiée entre le 16 et le 17 décembre 2024 par les gangs armés qui opèrent sur la route de l’aéroport. Plusieurs personnalités, associations et organisations du secteur médical n’ont pas caché leur indignation face à ces attaques qui semblent encore une fois cibler les institutions sanitaires.
« C’est un choc énorme », a lancé le président de l’Association des hôpitaux privés d’Haïti, le Dr Gérard Abel, qui s’exprime aux noms des propriétaires des hôpitaux privés en Haïti.
« Ce qui me choque le plus, c’est parce que bien avant de passer à l’acte, il y a eu des rumeurs, des avertissements et des menaces. Il me semble que rien n’a été fait ou ce qui a été fait en matière de sécurité a été insuffisant », a déploré le Dr Abel.
Le président de l’Association des hôpitaux privés d’Haïti en a profité pour souligner qu’avec un service de qualité, l’hôpital Bernard Mevs était arrivé à s’incruster dans un milieu assez modeste pour offrir des soins de santé dans un système déjà très pauvre.
En outre, le Dr Abel a dit regretter que la communauté bénéficiaire des services de Bernard Mevs et les forces de l’ordre ne se soient pas suffisamment mobilisés pour défendre cette importante institution.
« Nous avons déjà perdu plusieurs institutions sanitaires, dont l’Hôpital général, le sanatorium, l’hôpital français, l’hôpital Saint-François de Sales. L’incendie de l’hôpital Bernard Mevs vient plonger les propriétaires et directeurs d’hôpitaux dans une grande inquiétude. L’État doit tout mettre en œuvre pour protéger les rares hôpitaux qui continuent de fonctionner. Il faut établir un périmètre de sécurité autour des hôpitaux dans un contexte où ils sont particulièrement ciblés », a proposé le président de l’Association des hôpitaux privés d’Haïti dans un entretien accordé au Nouvelliste.
Plus globalement, le Dr Gérard Abel a rappelé que les hôpitaux traversent un moment difficile.
« Il y a le stress et la peur qui se lisent sur le visage du personnel et des patients. À cela s’ajoute l’inflation. À titre d’exemple, sur chaque 10 patients, il y en a 3 qui n’arrivent pas à payer les frais médicaux. Les assurances accusent de sérieux retards dans le remboursement des frais, les intrants sont de plus en plus rares et certains produits pour assurer la maintenance des machines ne sont pas disponibles », a égrené le Dr Abel tout en félicitant le personnel médical qui, malgré ces moments difficiles, se présente chaque jour dans les hôpitaux pour soigner la population.
« Tristesse, consternation et indignation », c’est en ces termes que le secrétaire général de l’Association médicale haïtienne, le Dr Ardouin Louis Charles, a répondu aux questions du Nouvelliste en apprenant la nouvelle du vandalisme et de l’incendie d’une grande partie de l’hôpital Bernard Mevs.
« Le temps n’est plus aux promesses; l’État doit garantir la sécurité des institutions sanitaires publiques et privées en renforçant la sécurité autour de ces institutions », a vivement recommandé le Dr Ardouin Louis Charles.
Le secrétaire général de l’Association médicale haïtienne ne cache pas son inquiétude par rapport à la progression rapide de gangs armés.
« L’hôpital Bernard Mevs est situé sur la route de l’aéroport, à Delmas 31. La situation est déjà tendue; je suis inquiet pour le seul hôpital public à grande capacité encore fonctionnel qui se trouve à Delmas 33, en l’occurrence l’Hôpital universitaire de la Paix. Encore une fois, il est urgent de protéger les institutions sanitaires; l’État doit se mettre au travail maintenant », a fait savoir le Dr Ardouin Louis Charles.
Dans une note rendue publique le mardi 17 octobre 2024, Zanmi Lasante a exprimé sa solidarité avec l’hôpital Bernard Mevs et son personnel en ces moments douloureux. « Depuis des années, l’hôpital Bernard Mevs est un pilier essentiel de la communauté, offrant des soins vitaux et sauvant d’innombrables vies », rappelle Zanmi Lasante.
« Les hôpitaux doivent rester des sanctuaires de soins et d’espoir, et jamais des cibles de violence, poursuit Zanmi Lasante. Cette attaque est une atteinte non seulement à une institution, mais aussi au droit fondamental d’accès aux soins. Nous appelons à la protection de ces infrastructures vitales pour préserver la dignité et la santé de tous. »
Source : Le Nouvelliste