Le Groupe des Éminentes personnalités de la Caricom, après des rencontres avec le CPT, le Premier ministre Garry Conille, des partis politiques, des organisations du secteur privé, de défense des droits de l’homme…, a publié, mardi 20 août 2024, une déclaration empreinte de préoccupations autour de l’incapacité de l’État à améliorer la sécurité.
Mais pas que, le groupe a manifesté sa déception face au manque d’impact de la présence des forces kényanes ; l’érosion de la confiance du public dans le CPT, exacerbée par le scandale de corruption et les demandes véhémentes de retrait des trois conseillers ; la crainte croissante qu’en raison des retards, perçus comme de l’inaction, le processus de transition ne respecte pas l’échéance de février 2026 pour l’investiture d’un président élu.
La visite au CPT et au Premier ministre a permis de faire le point sur la situation générale, sur leurs activités et leurs projets ainsi que sur leurs préoccupations. Le Groupe des Éminentes personnalités a été encouragé par le fait que le CPT semblait faire des efforts pour surmonter les retards dans la mise en place d’un certain nombre d’institutions et d’entités clés requises par l’accord du 3 avril entre les parties prenantes, telles que le Conseil électoral provisoire (CEP), l’Organe de contrôle de l’action gouvernementale (OCAG), le Conseil de sécurité nationale et la Conférence nationale. La question de l’éloignement entre certains secteurs et leurs représentants au Conseil et les frictions qui en résultent ont été soulevées, peut-on lire dans cette déclaration.
Le GEP, a indiqué cette déclaration, a également discuté du malaise parmi les parties prenantes résultant de la non-publication de l’accord du 3 avril, de l’absence des institutions critiques proposées, de l’inaction du Conseil et de l’impact négatif sur le Conseil de son inaction face aux allégations de corruption à l’encontre de trois de ses membres.
L’insécurité, « la principale attente du peuple haïtien »
L’une des principales préoccupations exprimées par les deux institutions de gouvernance, a poursuivi cette déclaration, concerne les difficultés rencontrées par la police haïtienne et la force kényane à lutter contre l’insécurité. Cela reste la principale attente du peuple haïtien. La préoccupation commune était que la force kényane était à la fois en sous-effectif et sous-équipée et qu’elle n’avait donc pas la capacité de tenir les territoires reconquis. L’accent a été mis sur la nécessité de fournir un financement adéquat à la SMSP pour résoudre rapidement ces problèmes d’équipements et de personnel, des nécessités que la police haïtienne a également.
Garry Conille : sans sécurité, l’action gouvernementale risque d’être compromise
Pour sa part, le Premier ministre est parfaitement conscient que la fenêtre d’opportunité ne durera pas longtemps et que le peuple haïtien attend des résultats. Il a clairement indiqué que le manque de ressources et l’effondrement des institutions de l’État constituaient des obstacles, mais que des efforts étaient en cours pour résoudre les problèmes socio-économiques et humanitaires critiques qui assaillent la population, peut-on lire dans cette déclaration. Le Premier ministre a souligné que si la question de l’insécurité n’était pas résolue, les progrès dans d’autres domaines essentiels de l’action gouvernementale seraient très probablement compromis.
Crainte que la transition ne s’entende au-delà du 7 février 2026
Lors de réunions avec un large éventail de représentants de la société civile et des partis politiques non représentés au sein du CPT et du gouvernement, l’opinion commune était que ce qui était nécessaire était une remise à zéro et une reconfiguration du CPT. Les préoccupations et les questions soulevées ont fait l’unanimité : l’incapacité de l’État à améliorer la sécurité ; la déception face au manque d’impact de la présence des forces kényanes ; l’érosion de la confiance du public dans le CPT, exacerbée par le scandale de corruption et les demandes véhémentes de retrait des trois conseillers ; la crainte croissante qu’en raison des retards, perçus comme de l’inaction, le processus de transition ne respecte pas l’échéance de février 2026 pour l’investiture d’un président élu. Les représentants des partis politiques non liés au CPT ont dénoncé la nature non inclusive du Conseil des ministres et les avantages pécuniaires et autres dont les partis politiques représentés au Conseil, par l’intermédiaire de leurs ministres désignés, sont susceptibles de bénéficier dans la période précédant les élections.
Impact corrosif des allégations contre 3 membres du CPT
Les retards dans la mise en place des institutions essentielles, la nécessité d’une plus grande efficacité pour atteindre les principaux objectifs dans les délais impartis et l’impact corrosif des allégations de corruption ont contribué à fragiliser le processus de transition. Les allégations de corruption, poursuit la déclaration du GPE, n’auraient pu survenir à un pire moment et devront être résolues rapidement afin de préserver l’intégrité de l’institution et la confiance du public dans le processus de transition. À cet égard, peut-on lire dans cette déclaration, l’enquête de l’agence d’investigation anti-corruption sera d’une importance cruciale. Il faut revenir à l’éthique de l’accord conclu à la Jamaïque le 11 mars 2024, qui reposait sur l’inclusion, le consensus et la responsabilité, lit-on dans cette déclaration.
Invitation et entités rencontrées
En réponse à l’invitation du président du Conseil présidentiel de transition (CPT) et aux appels des parties prenantes, le Groupe d’Éminentes personnalités de la Caricom (GEP) a effectué une visite en Haïti du 11 au 16 août 2024, dans le cadre du suivi des réunions virtuelles précédentes avec le Conseil présidentiel, le Premier ministre et les dirigeants du secteur de nomination. Le GEP, selon cette déclaration, a estimé qu’il était nécessaire de vérifier et d’évaluer les progrès accomplis dans le processus de transition afin d’être en mesure de faire rapport aux chefs de gouvernement de la Communauté des Caraïbes (Caricom).
La visite a permis un échange de vues et un dialogue avec des représentants d’un large éventail de la société haïtienne – l’exécutif bicéphale, le directeur général de la police nationale haïtienne, le ministre responsable des Affaires féminines, les dirigeants du secteur de nomination, les dirigeants des partis politiques non représentés au sein du CTP ou du gouvernement, le secteur de la société civile, y compris les associations de femmes et de défense des droits de l’homme, les secteurs religieux et privé, les syndicats et un groupe de la diaspora en visite. Le GPE a également rencontré des représentants des principaux partenaires internationaux d’Haïti (Canada, France, États-Unis) ainsi que des représentants du Bureau intégré des Nations unies en Haïti (BINUH), de l’Organisation des États américains (OEA) et du commandant de la force de la Mission multinationale d’appui à la sécurité (MMAS), selon cette déclaration.
Source : Le Nouvelliste