Haïti ou le destin funeste d’un « pays de transit pour la drogue »

« Le trafic de drogue, qui est une source importante de revenus pour certains gangs, nuit à la paix, à la sécurité et à la stabilité d’Haïti ». Rapport des experts de l’ONU sur Haïti, septembre 2023.

Depuis plusieurs décennies, Haïti est sur la liste des pays de « transit ou de production » de la drogue établie par les Etats-Unis d’Amérique. Le président américain, Joseph Robinette Biden, le 15 septembre 2023, via un « mémorandum sur la détermination présidentielle des principaux pays de transit ou de production de drogues illicites pour l’année fiscale 2024 », a confirmé ce statut, ce classement aux cotés de l’Afghanistan, les Bahamas, le Belize, la Bolivie, la Birmanie, la République populaire de Chine (RPC), la Colombie, le Costa Rica, la République dominicaine, l’Équateur, le Salvador, le Guatemala, le Honduras, l’Inde, la Jamaïque, le Laos, le Mexique, le Nicaragua, le Pakistan, le Panama, le Pérou et le Venezuela.

« La présence d’un pays sur la liste susmentionnée ne reflète pas nécessairement les efforts déployés par son gouvernement en matière de lutte contre la drogue ou son niveau de coopération avec les États-Unis. Conformément à la définition statutaire d’un pays de transit ou de production de drogues illicites majeur énoncée dans les sections 481(e)(2) et 481(e) (5) de la loi sur l’aide à l’étranger de 1961, telle que modifiée (Public Law 87-195) (FAA), la raison pour laquelle les pays sont placés sur la liste est la combinaison de facteurs géographiques, commerciaux et économiques qui permettent le transit ou la production de drogues, même si le gouvernement s’est engagé dans des mesures robustes et diligentes de contrôle des stupéfiants et d’application de la loi », a indiqué le mémorandum du président Américain Joseph Robinette Biden.

Des trafiquants de drogue, profitant de la situation géographique d’Haïti, de la faiblesse de ses institutions et de l’inexpérience de sa police, ont fait de l’île l’une des principales plaques tournantes pour le transport de cocaïne entre la Colombie et les Etats-Unis. En 1996, on estimait que 5 à 6 % de la cocaïne destinée aux Etats-Unis transitaient par Haïti. A la fin de 1997, ce chiffre a triplé et poursuivait même sa progression, pouvait-on lire dans un article titré « Les trafiquants colombiens utilisent l’île comme plate-forme de réexportation vers les Etats-Unis, avec la complicité de la mafia dominicaine », du Miami Herald, publié le 21 janvier 2005.

Selon certaines projections, ce ne sont pas moins de 50 tonnes par an qui se déversent ainsi sur l’île. « En matière de stupéfiants, je dois attirer l’attention du Sénat sur le caractère préoccupant de la situation haïtienne », affirmait le sénateur républicain de l’Ohio, Mike DeWine, après avoir visité Haïti cette année. « Les Etats-Unis doivent être particulièrement vigilants […] car le risque existe qu’Haïti devienne un narco-Etat à part entière », avait-t-il ajouté dans cet article, publié deux après les remarques cinglantes d’un ancien ambassadeur des Etats-Unis lors d’un pot d’adieu en 2003. La société haïtienne s’accommode des trafiquants de drogue, les fréquentent, blanchissent leur argent.

Pour le moment, rien n’indique qu’Haïti laissera de sitôt le classement des pays de production ou de transit de la drogue. Les cartels, colombiens et vénézuéliens, très actifs, ont mis en place une logistique impressionnante depuis la fin des années 1970. Des gradés, des éléments de la base de nos forces de sécurité, — FAD’H, PNH –, des élus, des membres de l’appareil judiciaire, des financiers… ont travaillé et travaillent pour les cartels de drogues. Les gangs, en capacité de contrôler des parts de territoires, offrent ces derniers temps leur service, profitant eux aussi de l’argent de la drogue que l’on blanchit assez bien en Haïti.

Le rapport au Conseil de sécurité de l’ONU par le Groupe d’experts créé par la résolution 2653 (2022) du Conseil de sécurité offre un éclairage glaçant sur le faible nombre de saisies de drogue, les installations, les implications d’autorités dans le trafic. Sur les saisies, les experts de l’ONU sont directs. « Le faible nombre de saisies de drogue s’explique essentiellement par l’implication de certains acteurs économiques et politiques corrompus du pays, qui s’appuient sur les autorités chargées du contrôle aux frontières, les forces de l’ordre et certains membres du système judiciaire. Certains hommes d’affaires et hommes politiques exercent une influence sur les chefs de département, placent des acolytes à des postes d’autorité clés et profitent des multiples « angles morts » qui existent dans le pays. Ils peuvent ainsi utiliser leurs moyens (bateaux et avions) et leur pouvoir pour acheminer la drogue sans trop d’interférences, y compris en collusion avec les gangs », ont officiellement révélé les experts de l’ONU.

Malgré la difficulté de son mandat et sa capacité opérationnelle limitée, le Bureau haïtien de lutte contre le trafic de stupéfiants (BLTS) a saisi environ 104,7 kg de marijuana et 5,4 kg de cocaïne au cours du premier semestre 2023. C’est moins qu’à la même période en 2022, au cours de laquelle 381,4 kg de marijuana et 12,53 kg de cocaïne avaient été saisis. Les années précédentes, des saisies plus importantes ont été signalées et des opérations antidrogue majeures ont été menées, notamment l’arrestation de Jean Elliobert Jasme (alias « Eddy One »), avec 83,97 kg de cocaïne, en octobre 2020; et le démantèlement d’un réseau africain de mules, entre novembre 2021 et juillet 2022, qui a entraîné la saisie de plus de 20 kg de cocaïne et l’interpellation de 16 individus, selon le rapport des experts de l’ONU.

Les routes de la drogue, le Sud, principal porte d’entrée

Un examen des saisies récentes effectuées par la police a révélé l’existence de multiples routes de la drogue à travers Haïti. De novembre 2022 à juillet 2023, de la drogue a été saisie sur la côte sud (Baie des Flamands, les Cayes, Ile-à-Vache et Plaisance-du-Sud) et dans le nord d’Haïti (Cap-Haïtien, Port-de-Paix et Artibonite), mais aussi dans les départements du Centre (Hinche et Mirebalais) et de l’Ouest (Plaisance et Bon-Repos). Le sud d’Haïti est la principale porte d’entrée de la drogue dans le pays, notamment de la marijuana en provenance de la Jamaïque et de la cocaïne provenant principalement de Colombie, mais aussi d’autres pays d’Amérique du Sud.

De multiples sources ont informé le Groupe d’experts que les points d’entrée de la drogue se trouvaient sur la côte sud : Jacmel, Anse-à-Pitres, Grand Bois, les Cayes, Dame-Marie et Ile-à-Vache ainsi que Port Salut et Jérémie. Les pistes d’atterrissage clandestines sont nombreuses, notamment à Savane Diane, dans le département de l’Artibonite, et vers le sud et le sud-est, à Jacmel, selon les experts de l’ONU.

À l’issue de visites dans la région, il a été établi que le département colombien de Guajira était un point stratégique pour le transport de cocaïne vers Haïti. Cette information a été corroborée par une source fiable, qui a indiqué que la drogue arrivait de Guajira sur la côte sud d’Haïti par bateau ou par de petits avions pouvant passer sous le radar. Elle traversait ensuite la frontière dominicaine, par voie terrestre, vers Punta Cana, puis vers Porto Rico. D’après d’autres sources, de petits avions larguaient de la drogue près du lac Étang Saumâtre, à la frontière avec la République dominicaine, et au-dessus du département de l’Artibonite.

Aux points de sortie, la majeure partie de la cocaïne est expédiée aux Bahamas dans de petites embarcations et des avions. Port-de-Paix et la petite île de la Tortue, au large de la côte nord-ouest, sont des stations d’expédition stratégiques. Des envois se font également de Miragoâne, Saint-Marc ou Cap-Haïtien.

Plusieurs saisies ont été signalées à Miami River dans le passé. Même si les saisies ont baissé ces deux dernières années, les services de détection et de répression nationaux et internationaux ont expliqué que l’instabilité et la faiblesse des contrôles portuaires en Haïti faisaient le lit des activités illicites transnationales, notamment du trafic de stupéfiants, selon le rapport des experts de l’ONU.

Le gang 5 second dans le trafic de la drogue

Le gang « 5 Segond » a exploité les piètres conditions de sécurité pour générer des revenus supplémentaires grâce au trafic de drogue. D’après certaines sources, la drogue était expédiée directement d’Amérique du Sud vers la zone du Village de Dieu, parfois accompagnée d’armes à feu. Depuis Village de Dieu, Izo bénéficie de l’appui d’autres gangs, tels que Canaan, Gran Grif et Kokorat San Ras, pour acheminer la drogue jusqu’à Port-de-Paix et hors du pays. Les routes nationales partant de Port-au-Prince sont contrôlées par des gangs, que les trafiquants doivent payer s’ils veulent faire passer leur drogue et leurs armes par leur territoire, peut-on lire dans ce rapport.

Base Pilate dans le transport de drogue

Selon le rapport, « le Groupe d’experts a reçu des informations selon lesquelles Base Pilate a activement contribué à faciliter le transport de la drogue pour le compte d’individus influents, en utilisant des véhicules blindés munis de plaques d’immatriculation officielles afin d’éviter les contrôles. L’utilisation présumée des plaques d’immatriculation de la police et du gouvernement pour transporter de la drogue et des armes compromet la lutte contre les activités illicites ».

La drogue nuit à la stabilité, à la sécurité du pays

Le Groupe d’experts est d’avis que le faible nombre de saisies de drogue ne reflète pas le niveau réel du trafic. Le trafic de drogue, qui est une source importante de revenus pour certains gangs, nuit à la paix, à la sécurité et à la stabilité d’Haïti. On en veut pour preuve les ambitions expansionnistes d’Izo. Le Groupe d’experts poursuit son enquête sur cette question, notamment sur les liens entre les élites et les gangs impliqués dans le trafic de drogue, leurs réseaux et leurs modes opératoires, peut-on lire dans ce rapport.

« Les États-Unis sanctionnent d’autres politiciens haïtiens corrompus pour trafic de stupéfiants »

« Les États-Unis et le Canada continuent de cibler la corruption et le trafic de drogue en Haïti. Le Bureau de contrôle des avoirs étrangers (OFAC), du Département du Trésor des États-Unis, a désigné les ressortissants haïtiens Rony Celestin (Celestin) et Richard Lenine Hervé Fourcand (Fourcand) en vertu du décret exécutif (E.O.) 14059 du 15 décembre 2021, « Imposant des sanctions aux individus de nationalité étrangère impliqués dans le trafic de drogue illicite international ». Célestin est un sénateur haïtien en fonction. Fourcand est un ancien sénateur haïtien, pouvait-on lire dans un communiqué du département du trésor des USA, le 2 décembre 2022.

L’OFAC a désigné Célestin et Fourcand pour s’être engagés dans, ou avoir tenté de s’engager, dans des activités ou des transactions qui ont matériellement contribué à, ou présentent un risque significatif de contribution matérielle à la prolifération internationale de drogues illicites ou de leurs moyens de production. Le gouvernement canadien a également désigné Celestin et Fourcand. « Rony Célestin et Richard Fourcand sont deux autres exemples de politiciens haïtiens corrompus abusant de leur pouvoir pour poursuivre les activités de trafic de stupéfiants dans la région », avait déclaré le Sous-secrétaire au Trésor pour le Terrorisme et le Renseignement Financier Brian E. Nelson. « Le Trésor continuera de tenir les officiels corrompus et les acteurs malveillants responsables pour leur implication dans le trafic illicite de drogue qui déstabilise Haïti ».

L’OFAC détient des informations indiquant que Célestin se livre à des activités de trafic de drogue international. Il a utilisé sa position politique pour importer de la drogue du Venezuela vers Haïti, et exporter de la drogue vers les États-Unis et les Bahamas.

L’OFAC détient également des informations indiquant que Fourcand se livre à des activités de trafic de drogue international. Il utilise son propre avion pour transporter de la drogue dans le Sud d’Haïti. Fourcand a tenté d’utiliser son influence politique pour installer des personnes dans des postes au sein du gouvernement, et lesquels l’aideraient à faciliter ses activités de trafic de drogue.

L’action d’aujourd’hui fait suite à une action prise en novembre dernier par les États-Unis qui ont désigné deux politiciens haïtiens corrompus pour leur implication dans le trafic de stupéfiants; l’OFAC, en coordination avec le gouvernement du Canada, avait désigné les ressortissants haïtiens Joseph Lambert et Youri Latortue conformément à au décret exécutif (E.O.) 14059 pour s’être livrés ou avoir tenté de se livrer à des activités ou à des transactions qui ont matériellement contribué, ou qui présentent un risque de contribuer de manière significative à la prolifération internationale de drogues illicites ou de leurs moyens de production.

Ces désignations sont les dernières en date faites par les États-Unis en vue de continuer à soutenir le peuple haïtien en entraînant des conséquences pour ceux dont les actions continuent de créer de l’instabilité et de fomenter la violence en Haïti. De plus, les États-Unis continuent de fournir une assistance sécuritaire et humanitaire à Haïti.

Trafic de drogue, la justice haïtienne regarde ailleurs

Le responsable du RNDDH, Pierre  Espérance, interrogé par Le Nouvelliste, a indiqué que la justice Haïtienne, sous la présidence de Jean Bertrand Aristide, de René Préval, de Michel Martelly, de Jovenel Moïse, il n’y a pratiquement eu aucun procès d’envergure de trafiquants de drogue. « Si la DEA n’est pas intéressée à un trafiquant de drogue appréhendé par la police, celui-ci peut recouvrer sa liberté en versant de l’argent », a indiqué Pierre Espérance. « Au cours des 20 dernières années. Cela arrive dans toutes les 18 juridictions du pays », a-t-il poursuivi, évoquant une exception.

La police nationale d’Haïti avait procédé à l’arrestation de l’ancien député des Cayes/ Ile-à-Vache (Repons Peyizan) Jean Fenel Thanis (49e Législature), de Jean Edrick Pompé et d’un ressortissant jamaïcain, Keshuss Cambell, «pour trafic illicite de stupéfiants», à Ganthier en mars 2019. Les suspects ont été interceptés par la police, à bord d’une Nissan Patrol de couleur blanche immaculée IT- 05007, transportant 491 kilogrammes de marijuana dissimulés dans une dizaine de sacs. L’ex-député avait été libéré par un juge, arguant que les 491 kilos étaient pour la consommation personnelle du concerné.

« La justice haïtienne est complaisante avec les trafiquants de drogue. Je dirais même que certaines autorités de la chaîne pénale se font complices des trafiquants », a confié une source au journal Le Nouvelliste.

En avril 2015, la fouille du navire Manzanares, en provenance de la Colombie, au terminal Varreux, avait permis de retrouver une importante quantité de cocaïne et d’héroïne. Les 16 membres d’équipage ont été libérés par la justice. Plusieurs personnes ont été inculpées dans ce dossier qui est « enterré » dans les tiroirs de la justice, a confié une source.

Manzanares, la DEA et la BLTS étaient sur le grill

Le bureau de la DEA en Haïti est sur la sellette. Il fait l’objet d’une enquête du ministère de la Justice des États-Unis après les dénonciations de lanceurs d’alerte à cause de « l’inefficience » de son action alors qu’une agence indépendante du gouvernement, après deux ans d’analyse, a découvert des pratiques susceptibles d’être «substantiellement inappropriées», avait rapporté une enquête du Miami Herald publié le vendredi 17 août 2018. Le bureau de la DEA en Haïti est sous le coup d’autres enquêtes. Celle de la commission supervisant la réforme gouvernementale du puissant sénateur de la Floride Marco Rubio qualifiant les allégations des lanceurs d’alerte de « substantielles » et, d’un autre côté, l’enquête du bureau du procureur de Miami sur le Manzanares, navire battant pavillon panaméen ayant transporté de la drogue en Haïti en 2015, a indiqué l’article du Miami Herald rappelant que la cour d’appel de Port-au-Prince a ordonné une nouvelle instruction dans le cadre de ce dossier.

Les lanceurs d’alerte, deux agents du bureau de la DEA en Haïti, ont toute une liste d’allégations. Ils ont évoqué la défaillance de la BLTS dans la sécurité des ports. Ils ont indiqué que « des milliers de kilos de cocaïne et d’autres drogues ont transité vers les États-Unis pendant des années sans être détectés. Ces lanceurs d’alerte, selon le Miami Herald, ont accusé des superviseurs du bureau d’Haïti de mauvais comportement et même de connivence avec l’ancien chef de la Brigade de lutte contre le trafic des stupéfiants (BLTS) ».

Entre-temps, des trafiquants de drogue, des anciens élus, des individus placés dans ces positions clés au sein des pouvoirs publics, ceux qui, hier et aujourd’hui, blanchissent l’argent de la drogue ; les gangs au service des cartels ont infiltré l’Etat. Ce conglomérat mafieux a affaibli et provoqué à certains égards l’effondrement de l’Etat qui ne contrôle plus l’entièreté du territoire ni les routes de la drogue, les quais informels et les pistes d’atterrissage. La population qui subit les causes de ce destin de « pays de transit de la drogue » est abandonnée à son sort. Selon l’ONU, au mois d’août 2023, les violences des bandes armées qui font régner la terreur en Haïti ont fait plus de 2 400 morts depuis le début de l’année. « Entre le 1er janvier et le 15 août de cette année, au moins 2 439 personnes ont été tuées et 902 autres blessées », a déclaré à Genève la porte-parole du Haut-Commissariat aux droits de l’Homme, Ravina Shamdasani. Et dans l’Artibonite, le second département le plus peuplé d’Haïti, les gangs font régner la terreur. « Entre janvier 2022 et octobre 2023, au moins mille six cent quatre-vingt quatorze personnes ont été tuées, blessées ou enlevées dans le département de l’Artibonite, dont plus de 80% entre janvier et octobre 2023. La grande majorité des victimes sont des hommes (70%), suivis des femmes (29%) et des enfants (1%)», a indiqué le bureau intégré des nations-unies au mois de novembre. La situation continue de se dégrader sur le terrain.

En dépit de ce sort, des membres de la population tressent des lauriers pour des chefs de gangs, pour des trafiquants élus ou en quête d’immunité parlementaire, pour des gens ayant reconnu des faits de blanchiment d’argent de la drogue. Avec ses ressources financières illimitées, ses moyens de communications, de manipulation de masse, il est fort probable que ces criminels continuent de se renouveler en Haïti.

Source : Le Nouvelliste (Roberson Alphonse)

Lien : https://lenouvelliste.com/article/245901/haiti-ou-le-destin-funeste-dun-pays-de-transit-pour-la-drogue

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