Il y a eu un calme apparent entre le 15 et le 19 avril 2024. Les responsables des hôpitaux ont constaté une légère diminution des nouvelles admissions, notamment les plaies par balle. Cependant, les lits d’hôpitaux sont restés occupés. Une situation qui réduit la capacité d’accueil de certains centres hospitaliers, et provoquent, pour d’autres, une impossibilité temporaire à admettre de nouveaux cas.
Depuis lundi 22 avril, une nette augmentation a été constatée avec une intensification le jeudi 25 avril 2024 coïncidant avec l’installation du Conseil présidentiel de transition.
Sur les groupes WhatsApp des hôpitaux sont partagés les messages de patients en détresse. Le cas d’un patient vivant dans un camp après avoir été contraint d’abandonner sa maison à Carrefour-Feuilles interpelle.
« On a un patient avec une plaie cranio-cérébrale dans un camp de déplacés. Pour l’instant aucun hôpital n’est en mesure de le recevoir », informe le responsable d’une organisation non gouvernementale, un message qui a été relayé sur plusieurs groupes WhatsApp de professionnels de la santé.
« L’hôpital Bernard Mevs est inaccessible pour l’instant; il est difficile de trouver un autre hôpital avec un neurochirurgien », répond un médecin travaillant à l’hôpital Bernard Mevs, qui essaie d’aider à distance en analysant les images.
Généralement pour ces cas, dans l’aire métropolitaine de Port-au-Prince, il n’y a que l’Hôpital de l’Université d’État d’Haïti, fermé, et l’hôpital Bernard Mevs, inaccessible, qui les reçoivent systématiquement.
Dans d’autres hôpitaux privés, il faut avoir les moyens économiques pour payer le déplacement d’un neurochirurgien.
Le patient en question vit grâce aux dons d’organisations non gouvernementales, il n’a pas une carte d’assurance maladie. Il est obligé d’attendre que le projectile rende son verdict. Les patients qui nécessitent une prise en charge en neurochirurgie en Haïti aujourd’hui sont en panne de destination. À l’étroit entre fermeture et inaccessibilité des hôpitaux.
Joint par téléphone, le Dr Jean Philippe Lerbourg, directeur médical de l’Hôpital universitaire de la Paix, l’un des rares hôpitaux universitaires publics qui continuent de fonctionner dans l’aire métropolitaine, avoue que depuis le 29 février 2024, « rien n’a changé dans la réalité du nombre de cas de plaies par balle reçus à l’Hôpital universitaire de la Paix. Effectivement, la semaine dernière, il y a eu 3 jours sans des plaies par balle, mais depuis le début de cette semaine nous assistons à la même situation avec au moins deux cas de plaies par balle par jour. »
En ce qui concerne la capacité de l’Hôpital universitaire de la Paix à gérer ces cas, le Dr Lerbourg souligne qu’ils font face à de grandes difficultés. « Grâce à l’entraide et un plan de gestion de cette situation nous arrivons, pas sans difficulté, à y faire face jusqu’à présent. »
À rappeler que l’Hôpital universitaire de la Paix n’a que 210 lits disponibles et doit faire, presque seul, face à de multiples cas urgents, dont les cas des femmes enceintes et des enfants qui abondent dans les centres hospitaliers publics depuis les évènements du 29 février 2024.
Ce même jeudi, un médecin a lancé plusieurs messages de détresse en quête de quelques pochettes de sang en vue de sauver un patient victime d’une balle perdue sur la route de l’aéroport avant d’annoncer sa mort en fin de journée. La disponibilité des produits est aussi une raison qui empêche les hôpitaux de gérer cette situation de crise qui affecte le système de santé de tous les côtés.
Le directeur du Centre national de transfusion sanguine, le Dr Ernst Noël, signale qu’il y a aujourd’hui un problème de donneurs.
« Jusqu’au 15 mars 2024, il y avait un problème de réactifs qui limitait notre capacité à répondre aux nombreuses demandes. Aujourd’hui, nous avons les réactifs, mais nous n’avons pas de donneurs à cause de la situation du pays. Le Centre national de transfusion sanguine ne peut pas réaliser les activités de collecte de sang. Cependant, pour que la crise soit une opportunité, nous devons être prêts pour le jour où tout redeviendra normal. Les problèmes ne vont pas disparaître en claquant des doigts. Les donneurs potentiels doivent savoir qu’il y a un problème et se mettre disponibles pour les prochaines campagnes de collecte de sang. De notre côté, nous allons ouvrir 3 postes de collecte, dont un à Carrefour et un autre à Delmas. Celui de la Faculté de médecine et de pharmacie de l’Université d’État d’Haïti viendra après », fait savoir le Dr Ernst Noël.
Source : Le Nouvelliste