« Il est déjà venu le temps de nous réveiller de notre torpeur… », l’appel de l’Eglise catholique.
Touchée de plein fouet par la guerre des gangs dans l’aire métropolitaine de Port-au-Prince avec l’incendie cette semaine de la cathédrale transitoire, la Conférence des évêques d’Haïti (CEH) tape du poing sur la table.
La hiérarchie de l’Eglise catholique dans un message rendu public le 29 juillet 2022, appelle la population à se réveiller et à dire non à l’insécurité, non au kidnapping, non à la légalisation, par la complicité, de l’activité des gangs armés…
« Il est déjà venu le temps de nous réveiller de notre torpeur, pour dire de toutes nos forces : Non à l’insécurité ! Non au kidnapping ! Non à la légalisation, par la complicité, de l’activité des gangs armés ! Non à tout projet d’anéantissement de l’État visant à faciliter un quelconque agenda à l’encontre de ce peuple à qui cette terre est léguée », ont lancé les évêques catholiques dans leur message à la nation.
« La dégradation générale de la situation du pays nous inquiète de plus en plus comme Pasteurs de ce peuple qui souffre tant. Nous avons tant de fois élevé nos voix pour interpeller chacun et chacune des fils et des filles de la Patrie commune, afin de les alerter et sensibiliser sur les enjeux majeurs de l’heure.
La peur a, par ailleurs, plongé les uns dans une profonde léthargie, tandis que les autres ne cessent de se rendre complices des malheurs de notre peuple : corruption, extrême pauvreté, insécurité généralisée, kidnapping, la méfiance interpersonnelle sont les maux auxquels est venue s’ajouter la violence systémique des gangs armés qui se déclarent la guerre ici et là », lit-on dans le message de la CEH.
Les évêques disent constater que le centre-ville de Port-au-Prince est devenu, ces derniers jours, le théâtre de violents affrontements entre bandes armées illégales, causant de nombreuses victimes au sein de la population civile aux abois, en grande détresse.
« La Police elle-même semble impuissante. Situé au cœur de ces zones d’affrontements, l’édifice de la cathédrale transitoire de Port-au-Prince a été ce 27 juillet gravement affecté par ‘’un incendie d’origine criminelle’’ que les services de pompiers ont fort heureusement réussi à circonscrire pour sauver ce lieu sacré.
Avec les autorités ecclésiastiques de l’Archidiocèse de Port-au-Prince, nous les remercions de tout cœur », affirme la CEH.
« Constatant avec une profonde tristesse et un sentiment intérieur de révolte la dégradation acceptée et largement provoquée de la situation du pays dans sa descente aux enfers, la Conférence des évêques catholiques d’Haïti (C.E.H) s’étonne et s’indigne contre l’impuissance de l’autorité de l’État, laissant le champ libre aux gangs lourdement armés pour mettre à exécution en toute impunité tous leurs actes prémédités. Ils kidnappent, séquestrent, cassent, tuent, brûlent, et mettent ainsi en défi les pouvoirs établis qui semblent totalement dépassés par ce qui se passe », a dénoncé la CEH.
La Conférence des évêques catholiques se demande « pourquoi l’État n’agit-il pas pour sévir avec la rigueur nécessaire dans le cadre de la justice pour mettre les bandits hors d’état de nuire ?
Est-il impossible de couper les sources qui fournissent aux groupes et aux individus les armes et les munitions, ou bien cela profite-t-il à des personnes intouchables ?
Tandis que les acteurs de violence ne manquent jamais de moyens et sèment quotidiennement la terreur, les agents de la Police nationale semblent généralement en être dépourvus et ne peuvent exercer leur mission de manière efficace. »
« Les acteurs et promoteurs de violence recrutent et arment incessamment et la Police s’affaiblit de jour en jour. Les voies de sortie de la capitale sont presque toutes bloquées, les gangs armés sont en guerre partout.
Cet état de fait met en péril le pays et l’activité de tous, à l’exception des acteurs de violence eux-mêmes. Il nous faut restaurer l’autorité de l’État pour faire souffler sur le pays un air de renouveau et de paix », exhorte la CEH.
« Nous unissons nos voix à celles de tous ceux et celles qui souffrent de cette situation et qui aspirent à la sécurité et à la paix, pour exiger une action immédiate de la part des autorités qui ont la charge de l’état et du bien-être des citoyens.
Car, il est urgent de travailler dans le meilleur des délais pour le désarmement des gangs, pour permettre à la Police nationale de mener en toute liberté et avec égal traitement ses opérations à l’encontre des acteurs de violence armés ou d’insécurité et de créer un climat de sérénité et de confiance.
Il faut, entre autres, empêcher le passage par les frontières et l’entrée des munitions dans le pays, arrêter et juger les auteurs matériels, les commanditaires et les promoteurs des actes qui enfreignent la loi.
Nous devons tous nous rappeler ici, à la suite d’Edmund Burke, que ‘’la seule chose qui permet au mal de triompher est l’inaction des gens de bien…’’, ont appelé les évêques.
L’Eglise catholique invite tous les secteurs du pays à travailler en synergie pour combattre le fléau de l’insécurité sous toutes ses formes.
« Attaquer les institutions qui empêchent de faire sauter les derniers verrous dans la Cité est un procédé dont le seul objectif est de rendre le pays plus vulnérable et servile.
L’Église catholique, à tous ses échelons, proteste contre ces attaques ignobles et choquantes qui ont affecté ou touché la Cathédrale transitoire de Port-au-Prince et qui nous attristent profondément.
La Conférence des Évêques catholiques d’Haïti s’unit aux autorités ecclésiastiques et au clergé de l’Archidiocèse de Port-au- Prince pour dénoncer cet acte malveillant. Nous invitons toutes les personnes physiques et morales, victimes de cette situation de violence et d’insécurité, à faire de même tout en s’engageant concrètement pour faire advenir le dialogue dans ce pays la justice et la paix », ont lancé les évêques dans leur message.