Haïti. La culture est en danger

Le Centre d’Art célèbre ses 80 ans cette semaine.

Le Centre d’Art célèbre ses 80 ans cette semaine. C’est un exploit car l’institution est unique en son genre. Non seulement dans le monde de la peinture mais dans celui de la culture en général en Haïti. 

Haïti passe pour un pays où la culture est forte, dynamique, essentielle. On dit même que dans chaque Haïtien sommeille un artiste en puissance. 

Et pourtant. 

Quand on fait le décompte des centres de formation pour quelque soit la discipline, on découvre très vite que la culture en général est traitée en parent pauvre. On ne prépare pas la relève, on ne fortifie pas les talents bruts. Pas assez. 

Quand on essaie de faire l’inventaire des salles de spectacle, des bibliothèques, des plateaux de danse, des théâtres, des salles de cinéma, etc., le compte est maigre. Le produit culturel n’existe pas ni pour une élite encore moins pour le grand nombre. Il y a d’heureux accidents, périodiquement. 

Les musées, médiathèques, et autres sites de conservation-diffusion-consultation de ce dont regorge le patrimoine culturel haïtien sont quasi inexistants. Nous privilégions l’instant présent et les destins individuels. 

Difficile de savoir ce qui a déjà été fait pour faire mieux ou s’en inspirer. Cela fait des années qu’il n’y a plus, et dans aucun domaine, des courants, des théories, des écoles de pensées. Il n’y a même plus de polémiques vivifiantes ou de critiques mordantes. Tout voum se do, en tout. 

Nous sommes un pays de culture mais on ne sait plus de quand date une belle et grande édition du carnaval de Port-au-Prince. La plus grande foire du livre du pays n’a pas encore trente ans. Le plus ancien festival musical haïtien organisé de par le monde se tient en Floride et est à sa 26e édition. L’aîné des festivals de théâtre a 20 ans. L’art haïtien est en hibernation. 

Il y a des exceptions qui confirment la règle, quelques arbres qui cachent le désert. Des passionnés qui transmettent la flamme de leurs amours avec talent. Un souvenir des Clacs, un peu d’Institut français, trop peu de Fokal.

On pourrait continuer sans fin la litanie de nos faiblesses dans le secteur culturel. 

L’actualité politique débilitante et la violence ont réduit les Port-au-Princiens à se contenter du primum vivere, de l’alimentaire. 

En est-il autrement en province ?

Malheureusement, les équipements culturels, l’écosystème qui pourrait porter un Haïtien à faire toujours mieux, n’existe pas ni à la capitale ni ailleurs. 

Avant même que l’on s’en prenne à la Bibliothèque nationale ou à l’Ecole nationale des Arts et encore plus après, la culture haïtienne est en danger, aujourd’hui plus qu’hier. La culture est en danger en Haïti, d’une façon générale. 

La peur du lendemain emporte tout en 2024. 

Bon combat aux institutions qui résistent comme le Centre d’Art, aux individualités qui persistent et à tous ceux qui rêvent de lendemains meilleurs et d’ambitions pour le secteur culturel. 

Frantz Duval
Le Nouvelliste

Lien : https://lenouvelliste.com/article/248186/la-culture-est-en-danger

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