À l’initiative de Jean Jonas Saint Juste, ancien maire assesseur de la Croix-de-Bouquets, plusieurs centaines de résidents de la plaine du Cul-de-Sac venus des quartiers de Bon-Repos, de Marin, Shada, Santo, Croix-des-Missions, entre autres, ont marché sur la route nationale numéro 1 le vendredi 6 mai 2022 pour dire non à l’insécurité.
Des résidents de la plaine du Cul-de-Sac, particulièrement ceux des quartiers touchés par les affrontements entre groupes armés, semblent déterminés à enrayer le phénomène de l’insécurité à l’entrée nord de la capitale. Du carrefour Saint-Marc à carrefour Shada, des riverains ont foulé le macadam, le vendredi 6 mai 2022 pour dire non à l’insécurité.
«Twòp san koule, nou pa ka konte kadav ankò », « Nou p ap kouri pou bandi ankò » figurent parmi les slogans affichés et scandés durant le parcours. La marche pacifique pourtant orpheline des autorités politiques, a réuni toutes les couches sociales de la zone. Des marchands des marchés publics de Bon-Repos et de Seradòt, des directeurs, des élèves et des professeurs d’école, des professionnels, des entrepreneurs, entre autres, ont exprimé leur ras-le-bol face à la situation sécuritaire.
Selon Jean Jonas Saint Juste, l’un des initiateurs, cette marche est organisée pour dire à la population de la plaine du Cul-de-Sac de se tenir debout pour demander aux autorités de faire face à leurs responsabilités.
« Nous sommes des citoyens qui payons nos taxes et impôts. L’État nous est redevable en matière de sécurité » a soutenu l’ancien maire assesseur de la Croix-de-Bouquets. L’éducateur a dénoncé ce qu’il appelle les « opérations cosmétiques » de la Police nationale d’Haïti. « Après les interventions, nous exigeons une présence policière constante dans les recoins de la zone », a lancé M. Saint-Juste, qui se dit satisfait de l’affluence, soulignant qu’il y a d’innombrables déplacés de l’entrée nord de la capitale.
La plaine du Cul-de-Sac ne deviendra pas un champ de bataille, dit Claudy Bien-Aimé, directeur d’école. « En tant qu’investisseur, on ne peut pas fuir la zone. Soit on meurt tous ensemble, soit on retrouve ensemble la paix et la joie de vivre d’antan », a déclaré l’entrepreneur d’une quarantaine d’années. Les protestataires ont demandé aux autorités de doter la police des moyens nécessaires pour travailler.
« L’institution policière a démontré sa volonté de sécuriser les biens et les vies. Ce qui nous manque aujourd’hui c’est la volonté politique des dirigeants », a soutenu Nadine, marchande de vêtements usagés, soulignant que plusieurs bandits ont avoué avoir été armés par des autorités politiques. Une résidente, dans les 70 ans, a dit ne souhaiter que de vivre en paix. « On en a assez de voir des maisons incendiées, de voir des humains qui décapitent ou calcinent leurs semblables », a-t-elle lâché.
Les militants Jeanty Manis de « Fòs Dèlma » et Rebert Noncent (Dizay) de « Fòs Kanapevè reveye » ont demandé à la population de ne pas laisser le champ libre aux groupes armés. « La solution n’est pas de fuir, mais de lutter pour le respect de ses droits. Aujourd’hui certains déplacés de la plaine du Cul-de-Sac ont été probablement des pauvres gens qui fuyaient la guerre des gangs à Martissant il y a quelques mois », ont-ils analysé.
Cette marche pacifique est une action de citoyens engagés de patriotes qui ne veulent pas être chassés de leur communauté. « Cette marche est un signal envoyé au pays globalement. La liberté de circuler est un droit fondamental. Il est inadmissible de ne pas pouvoir se déplacer librement dans son propre pays », a déploré James Darbouze, sociologue, habitant de la zone.
Au moins 75 morts dont des femmes et des enfants, 68 blessés et plus de 9 000 déplacés, tel est le nouveau bilan partiel des affrontements entre gangs rivaux dans la plaine du Cul-de-Sac, établi par les Nations unies dans un communiqué rendu public le vendredi 6 mai 2022.
Source : Le Nouvelliste
