Haïti. Contre l’insécurité, le gouvernement veut de l’aide, pas des soldats

Avec des équipements et un coup de balai à la Police nationale d’Haïti (PNH), sous-équipée, avec dans ses rangs des pions des cartels de drogue, des truands et politiciens ripoux, le gouvernement Henry veut partir en guerre contre l’insécurité. Avec un non ferme à l’envoi de troupes étrangères pour mettre en déroute des gangs qui contrôlent certains points du territoire.

C’est dans l’antre de la PNH, lors de la cérémonie de collation de diplômes de la 31e promotion de 631 aspirants policiers dont 132 femmes que le Premier ministre Ariel Henry a fixé la position du gouvernement sur l’envoi de casques bleus, de troupes étrangères pour aider à résoudre le problème de l’insécurité en Haïti. « Nous ne demandons pas l’envoi de troupes étrangères pour venir faire le travail à notre place. La formule a été essayée ces dernières années et une fois ces troupes parties, la situation s’est dégradée et a empiré », a indiqué Ariel Henry, chef du Conseil supérieur de la police nationale (CSPN). 

 « Nous croyons que cette PNH que vous intégrez aujourd’hui est capable de remplir sa mission, si tant est qu’on lui donne les moyens appropriés. C’est le message que nous envoyons à tous nos amis et j’ai de bonnes raisons d’espérer qu’ils nous comprendront et viendront accompagner notre police dans la mise en œuvre de ses plans », a dit Ariel Henry. 

« Je veux ici remercier les pays amis d’Haïti qui ont, depuis plusieurs années, apporté un soutien manifeste à notre police. Nous avons encore besoin de leur appui pour l’acquisition de matériels et d’équipements, mais aussi pour la formation spécialisée dans la lutte contre le terrorisme et les gangs armés », a dit Ariel Henry.

« Aujourd’hui même, a-t-il poursuivi, notre ministre des Affaires étrangères doit participer à un sommet sur le renforcement de la sécurité en Haïti. Il s’agit d’une initiative des États-Unis d’Amérique qui ont convié de nombreux pays et organisations internationales à venir mettre en commun les moyens qu’ils peuvent mettre à la disposition de la police nationale », a dit le Premier ministre Henry qui souligne que « cet effort de coordination du soutien à la police nationale répond à une demande expresse de mon gouvernement. »

Le chancelier haïtien Jean Généus, en visite au journal après avoir participé à cette réunion, a indiqué que le gouvernement a fait part de ses demandes. « Nous avons adressé nos demandes, fait connaitre nos priorités. Et les objectifs à atteindre », a indiqué Jean Généus, soulignant que les besoins ont été spécifiés.

« La formation des policiers, l’équipement de la PNH en armements nécessaires pour faire face à la puissance de feu des gangs, un service de renseignement qui doit nous accompagner dans le travail de démantèlement des gangs », a-t-il dit.   

Les Américains se sont ravisés, des équipements létaux sont attendus. « M. Todd Robinson de INL a annoncé qu’à partir du commencement de l’année prochaine, des équipements, des formateurs seront en Haïti pour appuyer la police nationale », a dit le chancelier Jean Généus.
Des blindés ? « Il y aura des blindés et ils nous semblent que le gouvernement des États-Unis se sont ravisés parce qu’avant ils nous disaient qu’on ne peut pas fournir des armes létales. Mais comment combattre les gangs, faire face à leur puissance de feu si on n’a pas des équipements, des blindés, particulièrement ? Il nous les faut. Des transporteurs de troupes, de policiers. Il nous les faut », a soutenu Jean Généus qui a expliqué en quoi les Américains se sont ravisés. « Parce qu’avant, ils hésitaient à nous fournir des armes létales. Il y avait trop de conditions », a indiqué le ministre des Affaires étrangères. « Il y a urgence dans la demeure », a-t-il insisté. 

« Il y a des promesses d’assistance en équipements. Ce n’est pas l’État Haïtien qui va décaisser pour l’achat de ces équipements. Les fonds récupérés sur les produits pétroliers vont servir à autres choses », a dit Jean Généus qui soutient que l’État doit être présent dans les communautés, fournir des services, faire reculer la précarité, la pauvreté.  

Envoi de casques bleus, plus qu’un non ferme 

« Le gouvernement n’est pas de cet avis », a répondu Jean Généus, interrogé sur l’édito du Miami Herald estimant qu’il est temps que reviennent les Casques bleus, avec l’obligation de faire mieux que la dernière fois. « Après plus d’une dizaine d’années, nous avons vu les résultats. Il serait préférable que les partenaires de la communauté internationale nous accompagnent dans cette campagne pour lutter contre la corruption. Nous demandons l’aide internationale pour équiper la police, former de nouvelles brigades dans la lutte anti-terroriste et aussi le vetting qui est très important », a dit Généus. « Nous ne pouvons pas continuer avec une force de police qui n’inspire pas confiance à la population. Nous ne pouvons pas continuer à nous installer confortablement dans cette situation », a-t-il dit.       

L’argumentaire du Miami Herald
pour l’envoi de Casques bleus 

Il est temps que les soldats de la paix de l’ONU retournent en Haïti. La situation est si grave. Et cette intervention doit être au centre des préoccupations aujourd’hui, alors que l’administration Biden convoque une réunion virtuelle des partenaires internationaux pour « relever les défis sécuritaires, politiques et économiques » sur l’île. Mais il n’est pas possible de relever les défis politiques et économiques — et encore moins d’envisager des élections — tant que l’on ne s’attaque pas au manque de sécurité quotidienne, lit-on dans cet éditorial du Miami Herald. Toutes les bonnes intentions ne sont qu’un vœu pieux tant que les gangs violents ne sont pas réprimés, que les enlèvements ne sont pas réduits et que les rues ne sont pas plus sûres, a écrit le Miami Herald.  

Les forces de l’ordre, telles qu’elles sont, a poursuivi le journal floridien, aident et soutiennent les trafiquants. Lorsque les forces de maintien de la paix de l’ONU sont entrées en Haïti en 2004, le pays était en proie au chaos politique, à de violents narcotrafiquants et à une force de police corrompue et débordée. Lorsque les Casques bleus se sont retirés environ 15 ans plus tard, peu de choses avaient changé ; de plus, les Casques bleus ont laissé derrière eux une épidémie de choléra mortelle et des femmes confrontées à la monoparentalité, a indiqué le Miami Herald qui expose le pourquoi de cet appel. 

Pourquoi, alors, demandons-nous au Conseil de sécurité des Nations unies de faire revenir les Casques bleus sur l’île ? Si ce n’est pas l’ONU, alors qui ? Pas une force de police haïtienne désarmée. Pas l’administration Biden seule, selon cet édito qui tance les USA.  De plus, les États-Unis ont toujours soutenu le mauvais camp, celui des corrompus et des antidémocrates, pour diriger Haïti, cherchant toujours un yes-man, puis provoquant toujours la fuite des migrants désespérés – que nous expulsons, bien sûr. Nous pensons que les Nations Unies ont la capacité d’évaluer honnêtement ce qui a mal tourné entre 2004 et 2019, de se recalibrer, d’écouter vraiment les Haïtiens sur ce qui se passe sur le terrain, a plaidé le journal floridien. S’assurer que les Haïtiens de la société civile sont des partenaires, au lieu de leur imposer une autorité mal informée. Apporter un peu de paix et de sécurité dans la vie quotidienne des Haïtiens. Nous ne faisons pas que regarder Haïti se détériorer, nous assistons à son implosion. Si la communauté internationale ne fait rien, elle enverra un autre message indubitablement cruel et inhumain, a prévenu cet éditorial du Miami Herald.             

Les États-Unis recrutent la France et le Canada pour renforcer la sécurité en Haïti, selon un article de Jacqueline Charles  

L’administration Biden demande à la France et au Canada d’aider à diriger un effort international visant à renforcer la sécurité en Haïti, après qu’une série de crises ait paralysé cette année le pays des Caraïbes et provoqué une onde de choc dans la région. Des conversations ont été entamées à l’automne sur un plan allié visant à renforcer les forces de l’ordre haïtiennes, qui sont minées par la corruption et de plus en plus dépassées par les gangs de trafiquants de drogue opérant dans tout le pays.

La vice-présidente Kamala Harris a évoqué la perspective d’une coalition internationale pour soutenir Haïti lors de sa rencontre avec le président français Emmanuel Macron à Paris le mois dernier, ainsi que lors de ses récentes conversations avec les premiers ministres Justin Trudeau du Canada et Boris Johnson du Royaume-Uni, a déclaré un responsable de la Maison Blanche, selon cet article signé par Jacqueline Charles. Des responsables français familiers de la question disent que la sécurité était un point central de la conversation de Harris avec Macron sur Haïti, qui a été soulevé à la fin de leur réunion. 

La proposition américaine de soutien aux forces de l’ordre haïtiennes est toujours en cours d’examen par les Français. Bien que les détails du plan américain soient rares, de multiples sources ont déclaré au Miami Herald et au McClatchy Washington Bureau qu’il s’appuierait fortement sur l’aide de ses partenaires et impliquerait une formation en matière de sécurité.

Todd Robinson, secrétaire d’État adjoint chargé du Bureau des affaires internationales de stupéfiants et d’application de la loi, a déclaré à la commission sénatoriale des affaires étrangères qu’ils envisageaient de former une nouvelle équipe SWAT au sein de la police haïtienne pour faire face à la crise des gangs.   

 Quid de la réunion
sous l’égide de Brian Nichol’s  

« Un certain nombre de pays qui ont participé aux discussions de ce matin avaient déjà contribué à un soutien policier international pour Haïti par le biais des Nations unies ou de l’Organisation des États américains. Ils ont exprimé leur volonté commune d’explorer un plus grand déploiement de la police en Haïti, que ce soit par le biais du mentorat, de la formation ou d’unités de police étrangères », a déclaré aux journalistes le secrétaire d’État adjoint aux affaires de l’hémisphère occidental, Brian Nichols, qui a présidé la réunion virtuelle avec 104 organisations d’aide internationale et gouvernements étrangers, selon Mcclatchydc.com« Nous sommes tous d’accord pour dire que la structure et les éléments de coordination doivent être explorés plus avant », a déclaré M. Nichols.

Reconnaissant que l’effort nécessite encore du travail, M. Nichols a indiqué qu’en plus du financement et de l’équipement que les États-Unis ont annoncé pour la Police nationale d’Haïti, des engagements ont été reçus d’autres pays qui n’avaient pas encore fourni de financement pour la police. Le Japon, par exemple, a déclaré qu’il donnerait 3 millions de dollars pour construire des logements et d’autres installations pour la police.    

Pour le moment, c’est une bonne chose qu’Haïti et ses défis soient l’objet de discussions de haut niveau. Tout le monde comprend que sans sécurité, il serait difficile de tenir des élections. Mais le problème ne se résoudra pas en donnant des armes à la PNH. 

Source : Le Nouvelliste

Lien : https://lenouvelliste.com/article/233246/insecurite-le-gouvernement-henry-veut-de-laide-pas-des-soldats

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