Le Premier ministre Ariel Henry est intervenu samedi 25 septembre à la 76e Assemblée générale de l’ONU. N’ayant pas fait le déplacement jusqu’à New York, le chef du gouvernement a pris la parole par visioconférence. L’enquête sur l’assassinat du président Jovenel Moïse, le dialogue, le rétablissement des institutions démocratiques, le séisme du 14 août, ont été entre autres les points évoqués dans son discours.
Ariel Henry a salué l’initiative du Bureau de la 75e session de l’Assemblée générale consistant à organiser une cérémonie d’hommage le 14 juillet 2021, à la mémoire du président Jovenel Moïse. « Il est décédé tragiquement sous des balles assassines dans la nuit du 6 au 7 juillet dernier. Les messages de réconfort et les témoignages de sympathie des gouvernements des États membres de l’organisation ont été appréciés à leur juste valeur par le peuple haïtien. Je veux réaffirmer ici, à cette tribune, ma détermination à tout mettre en œuvre pour trouver les co-auteurs, les complices et les commanditaires de ce crime odieux. Rien, absolument rien, aucune manœuvre politique, aucune campagne médiatique, aucune distraction, ne pourra me détourner de cet objectif : rendre justice au président Moïse. C’est une dette envers sa mémoire, envers sa famille et envers le peuple haïtien. L’enquête judiciaire en cours est difficile. Il s’agit d’un crime transnational. Et pour cela, nous sollicitons formellement une entraide judiciaire. C’est une priorité de mon gouvernement pour la nation tout entière. Car, ce crime ne doit pas rester impuni et les coupables, tous les coupables doivent être punis », a déclaré le Premier ministre.
Le premier ministre Ariel Henry a évoqué les migrants haïtiens qui ont traversé la frontière entre les États-Unis et le Mexique. Il n’a toutefois pas protesté contre les déportations massives de ces compatriotes. « Ces derniers jours, les images du traitement réservé à plusieurs de mes compatriotes à la frontière entre le Mexique et les États-Unis ont choqué plus d’un. Sans vouloir contester le droit d’un État souverain de contrôler l’accession d’étrangers à son territoire ou de renvoyer dans leur pays d’origine, ceux qui y pénètrent illégalement, nous croyons que beaucoup de pays aujourd’hui prospères, ont été construits par des vagues successives de migrants et de réfugiés. Ce problème des migrants doit nous rappeler que les êtres humains, les pères et les mères de famille vont toujours fuir la misère et les conflits et chercher à offrir de meilleures conditions de vie à leurs progénitures. Les migrations vont continuer tant qu’il y aura sur notre planète des zones de prospérité, tandis que la majeure partie de la population mondiale vit dans la précarité, parfois extrême, sans perspective d’une vie meilleure », estime le chef du gouvernement.
Plus loin, le Premier ministre a expliqué le contexte dans lequel il dirige le pays, en l’absence du président qui a été assassiné et avec des institutions dysfonctionnelles. « Dès que j’ai pris la tête du gouvernement, mon souci principal a été de tout mettre en œuvre pour faire revenir mon pays, dans les meilleurs délais possible, à un fonctionnement normal des institutions démocratiques. C’était le vœu du président Moïse et c’est l’objectif qui a guidé, jusqu’ici, et qui continuera de guider mes actions. Certains d’entre vous ne le savent peut-être pas, mais je suis appelé à gouverner, alors que la quasi-totalité des institutions démocratiques n’existent plus ou sont totalement dysfonctionnelles. Face à une telle situation et dans le souci de résoudre les problèmes politiques majeurs auxquels le pays est confronté, notamment l’insécurité insupportable, le dysfonctionnement du pouvoir législatif, la faiblesse caractérisée du système judiciaire, j’ai dû former rapidement un gouvernement, en vue de prendre en main les affaires de l’État. Mais il était évident que seul un dialogue avec les partis politiques et les acteurs organisés de la société civile pouvait permettre de dégager un consensus suffisant en vue d’assurer la stabilité sociopolitique. C’est dans cet esprit que depuis mon arrivée à la tête du gouvernement, j’ai multiplié des rencontres et des discussions avec tous les secteurs de la vie nationale indistinctement, pour créer un climat sociopolitique apaisé, indispensable à l’organisation d’élections générales crédibles, transparentes et inclusives dans les meilleurs délais. À mon sens, il est indispensable de retourner à un fonctionnement normal des institutions, en remettant la direction du pays à des élus jouissant de la confiance de la population », a longuement expliqué le Premier ministre.
Ariel Henry a également mentionné la publication dans le journal officiel Le Moniteur, « l’Accord politique pour une gouvernance apaisée et efficace de la période intérimaire » qu’il a négocié et signé avec des acteurs de la classe politique, des organisations populaires et des organisations de la société civile.
M. Henry a indiqué que cet accord prévoyait la création d’un environnement sécuritaire apte à favoriser une large participation des citoyennes et des citoyens aux prochaines élections. « Il s’agit là d’une étape importante dans le processus de rétablissement de l’Etat de droit et des institutions démocratiques. Malgré cette large participation, nous restons ouverts pour poursuivre les discussions afin d’étendre le consensus. Nous voulons obtenir l’adhésion d’autres compatriotes à ce projet commun visant à faire prendre à notre pays un nouveau départ. J’ai commencé les discussions avec les signataires de l’Accord dans le cadre de sa mise en application et je dois les poursuivre dans les jours qui viennent. J’ai choisi la voie la plus rapide pour aller vers des élections libres transparentes, inclusives et non partisanes. Certains souhaitent une transition plus longue. Mais avec beaucoup d’autres, je crois que ce n’est pas la bonne formule. Je ne désespère pas de convaincre ceux qui sont encore réticents à rejoindre les signataires de l’Accord susmentionné, pour que nous allions ensemble, dans la paix et dans le dialogue permanent, vers des solutions durables aux problèmes de notre pays », a-t-il soutenu.
Par ailleurs, le Premier ministre a salué l’élan spontané de solidarité de la communauté internationale qui s’est mobilisée rapidement aux côtés des autorités haïtiennes pour apporter aide et assistance aux victimes du séisme du 14 août 2021. Dans la foulée, il a invité les pays amis à rester collectivement engagés aux côtés d’Haïti. Ce, dit-il, afin d’aider le pays à répondre aux besoins humanitaires immédiats, et de l’accompagner dans le processus de reconstruction. « J’ai lancé avec nos partenaires techniques et financiers un PDNA (Post Disaster Needs Assesment). Nous devrions recevoir dans les prochaines semaines une évaluation exhaustive des besoins pour engager la reconstruction. Il nous faut reconstruire mieux et de façon plus résiliente pour mieux résister aux aléas climatiques et aux catastrophes naturels en général. Là encore, nous comptons sur votre solidarité agissante tant à travers les mécanismes existants, que par le biais de nouveaux engagements. L’accent mis sur la reconstruction de la presqu’île du sud ne peut ni ne doit nous faire oublier que lutter contre la pauvreté et pour la création de richesse, demeure l’une des principales priorités de mon gouvernement. C’est pourquoi nous allons continuer à travailler pour créer un environnement favorable pour une reprise de l’économie et pour attirer des investissements tant nationaux qu’étrangers », a promis Ariel Henry.
Source : Le Nouvelliste