Guyane. Les enjeux de la transition énergétique en débat avec la FEDOM

La centrale au fioul de Dégrad-des-Cannes a beau devoir s’arrêter, un contentieux administratif a retardé l’entrée de sa remplaçante, pourtant plus vertueuse écologiquement car fonctionnant aux biocarburants liquide.

En effet, après l’invalidation du permis de construire de la centrale de Larivot en première instance, la cour administrative d’appel de Bordeaux a annulé ce jugement dans une décision du 28 mars 2023.

Porté par EDF et la Collectivité territoriale de Guyane, ce projet s’inscrit dans la politique énergétique guyanaise, qui vise à réduire sa dépendance aux hydrocarbures et aux énergies fossiles.

En effet, si 60% de l’énergie électrique guyanaise est issue de source renouvelable, par l’hydraulique, la Guyane importe toutefois environ 80% des ressources énergétiques qu’elle consomme. Dans un contexte où la croissance des besoins en électricité est exponentielle, couplé à une exigence d’électrifier une partie des communes de l’intérieure, la reconversion des centrales est l’un des axes de développement majeur de la transition énergétique, avec le développement du photovoltaïque, de la biomasse ou encore de la maitrise de la demande d’énergie.

Pilotable, la centrale du Larivot est indispensable pour absorber les pointes de consommation de l’agglomération de Cayenne, où vivent 50 % des quelque 300 000 habitants de la Guyane ; et structurant pour accompagner le développement économique du territoire.

En octobre 2020, le préfet de Guyane a délivré à EDF-PEI un permis de construire pour la réalisation d’une centrale électrique au lieu-dit Le Larivot dans la commune de Matoury. En juillet 2022, saisie par deux associations de protection de l’environnement, le tribunal administratif de la Guyane annule le permis de construire, jugeant qu’il comportait une dérogation injustifiée au principe d’interdiction de porter atteinte aux espèces protégées.

EDF-PEI, la Collectivité territoriale de Guyane et le ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires interjettent appel et demandent à la cour administrative d’appel de Bordeaux d’ordonner la suspension de l’exécution du jugement.

C’est chose faite : le 7 octobre 2022, le juge d’appel notant notamment que « le site d’implantation du projet ne fait pas partie des espaces naturels remarquables du littoral […] et que l’emprise de ce projet n’aura pas d’impact sur la mangrove ».

Sur la question des espèces protégés, qui avait motivé la première invalidation du permis de construire, il s’avère dans les faits que sur les 36 espèces aviaires de la zone, seules trois ont un espace d’habitat s’étendant à la zone, tout en notant que la zone d’implantation du projet n’est pas une zone de nidification de ces espèces.

Enfin, car c’est avant tout l’intérêt du projet, l’étude d’impact conclut à une baisse de 30% des émissions de co2 de la centrale de Larivot par rapport à celle de Dégrad-des-Cannes.

Même si la question de la matière organique végétale qui doit faire tourner la centrale, qui peut difficilement être produite localement à ce stade, était aussi un point dans le débat public. Un point qui pose derrière à plus long terme la question stratégique du coût — économique et environnemental — acceptable des biocarburants et des carburants synthétiques disponibles pour les Outre-mer, dont la demande va être de plus en plus forte dans un contexte où les réglementations sont de plus en plus poussées (taxe carbone aux frontières, crédits carbone…) ; et de l’émergence de filières locales de production.

Ce contentieux, qui pourrait encore se poursuivre en cassation devant le Conseil d’Etat, permet de pointer du doigt la situation complexe auquel font face les porteurs de projet acteurs de la transition énergétique, tout particulièrement outre-mer.

L’un des objectifs des séminaires « les entreprises au cœur de la transition énergétique » organisés par la FEDOM sur le premier semestre 2023 est précisément d’interroger cette complexité, d’identifier les différents points de blocage qui entravent la transition énergétique, et, avec l’ensemble des acteurs locaux, publics et privés, d’œuvrer de concert à l’élaboration de réponses collectives pour lever ces freins.

La FEDOM tiendra lundi 24 avril, de 8 h 30 à 15 h 30, à l’amphithéâtre A de l’Université de Guyane, le séminaire « les entreprises au cœur de la transition énergétique » consacré aux enjeux guyanais.

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