Dans son avis du 30 octobre 2024, rendu public aujourd’hui, la Chambre régionale des comptes affirme que ceux de la commune de Sainte-Rose sont sains et que celle-ci sort du plan de redressement. Mieux, la commune affiche un bel excédent de 18 millions d’euros. Adrien Baron, maire de Sainte-Rose, explique ce qu’il s’est passé en deux ans et demi.
La commune de Sainte-Rose est sortie du rouge après deux ans et demi de gestion de votre équipe. Rappelez-nous la situation telle qu’elle était à votre arrivée.
Pour bien comprendre, il faut signaler que cela faisait 12 années que la commune était en déficit. Le second élément qui répond à votre question, c’est, effectivement, que je suis arrivé aux responsabilités le 15 janvier 2022 et, à l’époque, il y avait un déficit financier sur le compte administratif de 15,8 millions d’euros. Déficit qui avait été renforcé par la Chambre régionale des comptes puisqu’il y avait un certain nombre de dépenses qui n’avaient pas été prises en compte et donc, au bout du bout, il y avait près de 20 millions de déficit cumulé.
Qu’avez-vous fait dès votre arrivée ?
Nous avons d’abord pris des mesures qui étaient celles qui étaient préconisées depuis longtemps par la Chambre et qui n’avait jamais été appliquées. Et nous avons également signé le COROM avec l’État. Ceci nous a permis, effectivement, là aussi, de fixer des objectifs que nous avons respectés. En un peu plus de deux ans, nous sommes passés de cette situation qui approchait 20 millions de déficit à la situation que vous connaissez aujourd’hui. C’est vrai que ça paraît spectaculaire puisque, passer d’une situation aussi difficile — et ce n’est pas moi qui l’ai dit — ce sont les autorités de l’Etat, ça ne s’était jamais vu en France.
Vous avez dû prendre des décisions draconiennes en matière de dépenses, mais pas que… il fallait trouver des recettes.
Oui, si nous avons aujourd’hui cette situation assainie, c’est parce qu’il y a eu des efforts draconiens qui ont été réalisés. D’abord sur les dépenses, puisque nous avons réduit considérablement, drastiquement même, ces dépenses. Nous avons tiré la ceinture jusqu’à la couper. Nous avons fait en sorte que tout euro engagé soit indispensable, malheureusement au détriment, bien évidemment, de la population. Mais, il fallait faire en sorte que nous puissions économiser. Pour donner une idée de l’ampleur des économies nous étions à un stade, à un moment, où nous économisions environ 500 000 euros par mois. Et puis, sur le poste des recettes, la ville avait une grosse difficulté, c’est qu’elle n’avait aucune recette. Nous avons travaillé sur la responsabilisation de tous, à la mairie et dans la population de Sainte-Rose. Nous avons expliqué à la population que nous étions contraints et qu’il fallait payer : il fallait payer l’eau, il fallait payer les factures, il fallait payer les loyers. Rien n’était payé auparavant ! Ce qui a permis de retrouver des millions d’euros de recettes.
Vous avez été aussi beaucoup aidé par l’Etat et les collectivités majeures !
Nous avons été d’abord aidés par l’État avec le COROM. Nous avons été aidés aussi par les collectivités majeures puisque nous étions en difficulté. Pas financièrement mais sur des actions puisque, pendant un certain temps, la ville a un peu vécu, si vous me permettez l’expression, sur le dos des collectivités majeures. Mais, avec leur assentiment, parce qu’elles avaient compris que nous étions réellement en très grande difficulté. Nous n’avions pas le choix : notre marge de manœuvre était égale à zéro. Quand je suis arrivé, la trésorerie de la ville était de 10 000 euros. Elle est de 10 millions d’euros à présent. Qu’est-ce qui explique cette marge extraordinaire de recettes supplémentaires ? C’est cette concentration de diminution des dépenses.
Comment avez-vous négocié avec les collectivités, la Région et le Département ?
Je leur ai dit tout de suite la vérité sur l’état de nos finances. Je n’avais pas besoin de moyens financiers mais de soutien pour des projets structurants afin que la population ne souffre pas de la situation. Ce que je souhaitais, c’étaient des réalisations. Par exemple, chaque année, nous avons demandé au Département de nous réaliser une route ou encore à la Région. Sur les manifestations que nous organisions, nous leur demandions de prendre en charge un certain nombre de frais pour éviter que la ville puisse avoir à les supporter. Tout cela dans un cadre légal, bien évidemment.
Et puis, de manière générale, toutes les fois qu’il y avait une distribution de subventions des collectivités majeures nous faisions en sorte de nous positionner favorablement pour en obtenir.
Vous avez, pendant cette période de disette, construit un port de qualité, une base nautique… Qui a payé ?
La base nautique est une très belle base nautique, outil structurant pour le développement de Sainte-Rose. Elle a été réalisée par la Communauté d’agglomération du Nord Basse-Terre et transférée à la ville pour sa gestion. C’est la ville qui paie les frais de fonctionnement et le personnel qui est à disposition de la structure. C’est un outil extraordinaire, certainement l’une des plus belles bases nautiques de Guadeloupe. D’ailleurs, nous envisageons une extension du deck qui donne sur la mer.
Ce qui est surprenant, c’est que ceux qui passent à Sainte-Rose voient que, malgré les difficultés, la ville s’est développée, avec un port, une base nautique, des routes de qualité, d’autres travaux aussi en centre-ville et ailleurs.
C’est exactement ça. Vous avez totalement raison, c’est ce que nous avons cherché à faire. Faire en sorte que la population ne puisse pas sentir la déchéance financière de la ville et qu’elle puisse avoir le sentiment que la ville continue à se développer. Ne pas saper le moral des Sainte-Rosiens. Pour quoi que ce soit. Et pour cela, la seule solution que nous avions, c’était parler, par exemple, du port et que la population le voit changer de jour en jour. C’est un outil extraordinaire. Je suis vice-président du Conseil départemental qui est propriétaires des ports de Guadeloupe et je me suis battu, mes amis élus peuvent en témoigner. Aujourd’hui, nous sommes sur un projet de près de 25 millions d’euros sur la construction d’un port qui sera un port majeur en Guadeloupe et qui aura une portée touristique extraordinaire. Donc oui, j’avoue que nous avons fait mieux avec cent fois moins de moyens et je crois que c’est quand même pas mal de le signaler.
Propos recueillis par André-Jean VIDAL
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