La SAFER de Guadeloupe est présidée par Rodrigue Trèfle, agriculteur-éleveur. Fin juillet, un différend à propos de la cession d’un lopin de terre agricole au Moule a donné lieu à des manifestations autour du siège social de la SAFER, à Jarry/Baie-Mahault.
De quoi s’agit-il ?
« Vendredi 28 juillet, on a eu la présence au siège de la SAFER d’un certain nombre de personnes du collectif d’Hubert Quiaba. Il faut savoir que, par courrier du 3 avril, M. Quiaba m’a demandé à consulter certains dossiers pour le compte des membres de son collectif. Par tolérance, j’ai accepté. Mais là, il a saisi l’occasion d’un dossier pour essayer d’envahir le siège de la SAFER avec des membres de son collectif. En fait, il n’applique plus sa propre procédure et prend fait et cause dans une affaire qui n’en est plus une », explique Rodrigue Trèfle.
Que s’est-t-il passé ?
Rodrigue Trèfle : « La SAFER a un terrain de quatre hectares au Moule, qui a intéressé un agriculteur, Cyrille Moutoussamy. Celui-ci possède, ce que nous avons su après enquête, d’autres terrains à titre personnel et des parts d’autres exploitations. Pour ce qui est du terrain au Moule, il y a eu 39 personnes qui se sont montrées intéressées. Après étude des dossiers, ce terrain agricole a été cédé à un jeune volontaire qui n’a pas de terre. Nous donnons toujours la priorité à des jeunes sans terre plutôt qu’à un agriculteur qui a déjà des terres ou un jeune qui peut s’installer sur des terres familiales. C’est notre politique. »
En fait, le terrain en question était loué à l’oncle de Cyrille Moutousamy. Il y a quelques années, le propriétaire a décidé de le vendre. Mais, la SAFER a un droit de préemption, au nom de l’intérêt général, sur tout terrain agricole à vendre. Sachant cela, le propriétaire a retiré son terrain de la vente. Cyrille Moutoussamy soutient que le président de la SAFER de l’époque lui aurait assuré que si le terrain était en vente, une fois la SAFER en possession du terrain celui-ci lui reviendrait s’il était toujours intéressé.
Débouté mais tenace
Le terrain une fois mis en vente, la SAFER a préempté… la suite on la connaît puisque 39 personnes se sont montrées intéressées, qu’il y a eu une enquête et que Cyrille Moutoussamy n’a pas pu prendre possession du terrain parce que, si le comité technique d’établissement de la SAFER qui s’est réuni l’a désigné comme attributaire possible, une enquête a permis de constater que l’ensemble des terres de M. Moutoussamy, dont 11 hectares en GFA, dépasserait les 15 hectares autorisés par la Direction de l’environnement, de l’aménagement et du logement (DEAL).
Pour contrer la SAFER, Cyrille Moutoussamy a lancé une procédure judiciaire contre la SAFER, arguant que la moitié de ses 11 hectares étant squatté, il ne fallait considérer que le solde dans le calcul des 15 hectares maximum. Débouté, il n’a pas interjeté appel.
Pour la SAFER, aujourd’hui le jeune attributaire doit pouvoir prendre possession paisiblement de son terrain pour lequel il a tous les documents attestant de son droit à l’exploiter pour toute culture ou activité agricole.
Débouté, il a cessé toute action judiciaire mais a fait appel à Hubert Quiaba et son collectif pour tordre le bras de la SAFER.
Toute discussion à ce sujet relève, selon Rodrigue Trèfle, « plus de la politique ou d’une volonté de me nuire que de l’intérêt général de l’agriculture. Là, un jeune Guadeloupéen est bloqué dans son projet pour des raisons qui échappent à la logique et qui sont le fait d’autres Guadeloupéens. C’est triste. »
« D’autant, poursuit le président Trèfle, que ce n’est pas moi mais le conseil d’administration de la SAFER qui décide de l’attribution des terres. Conseil d’administration où siège, normalement, le président de la chambre d’agriculture, qui, s’il siégeait effectivement au lieu de laisser sa chaise vide, aurait pu me parler plutôt que d’aller aux réunions de M. Quiaba et de lui apporter en quelque sorte un soutien contre l’institution à laquelle il appartient… Ce qui, d’après moi, est une drôle de façon de faire les choses. »
Quel est le rôle de la SAFER ?
Les Sociétés d’aménagement foncier et d’établissement rural (SAFER) ont été créées en 1960. Ce sont des sociétés anonymes, sans but lucratif, dotées de missions d’intérêt général, sous la tutelle des ministères de l’Agriculture et des Finances. C
La SAFER de Guadeoupe a été créée en 1965 et agrée en 1967. Elle compte, dans son conseil d’administration, 18 membres répartis en trois collègesde six représentants chacun : les professionnels agricoles, les collectivités, les autres actionnaires, dont l’État.
Les SAFER aident les porteurs de projets, agricoles, artisanaux, de service, résidentiels, environnementaux à s’installer sur des parcelles de terrains agricoles préemptées par ses soins lors des ventes dès lors qu’elles peuvent être propres à une installation.
Les SAFER œuvrent pour l’intérêt du monde agricole, protègent l’environnement, les ressources naturelles. Elles accompagnent également les collectivités locales et territoriales dans leurs études et leurs projets fonciers.
La sollicitation des collectivités
Récemment, la SAFER de Guadeloupe s’est vue sollicitée par la Collectivité de Saint-Martin pour réaliser un audit des terres consacrées à l’agriculture sur un territoire fortement urbanisé.
De même, le Département de la Guadeloupe lui a-t-il confié la mission de réaliser un audit des terres lui appartenant sur la Grande Galette afin de voir quelles surfaces sont occupées, cultivées et si les occupants règlent leur loyer. En effet, le Département souhaite mettre 50 hectares de son patrimoine agricole sur les communes de Marie-Galante à la disposition de jeunes désireux de s’installer agriculteurs ou éleveurs. 50 autres hectares suivront. Ces mises à disposition font partie de la convention signée par l’Etat, le Département, la Région et l’usinier pour relancer la filière canne-sucre sur l’île.