Guadeloupe. Les SAFER de France en visite à l’INRAE

Ils sont venus, ils sont tous là, derrière leur président fédéral, Emmanuel Hyest. Ce sont les présidents et directeurs généraux de toutes les SAFER de France et d’Outre-mer.

SAFER. Société d’Aménagement Foncier et d’Etablissement Rural. Il y en a une par région dont le rôle est d’aménager les structures des exploitations agricoles et forestières, de favoriser l’installation des jeunes, de protéger l’environnement, les paysages et les ressources naturelles d’accompagner le développement de l’économie locale.

Que viennent-ils faire en Guadeloupe ? Il viennent, comme ils le font chaque année dans la région de France (et d’Outre-mer) tenue leur conseil d’administration. En dehors de celui-ci, ils visitent la Guadeloupe agricole, cornaqués par Rodrigue Trèfle et son équipe de la SAFER de Guadeloupe.

Emmanuel Hyest, président de la Fédération nationale des SAFER :

Jeudi matin, ils étaient à l’Institut National de la Recherche Agronomique et de l’Environnement (INRAE) Antilles-Guyane, à Duclos/Petit-Bourg. Ils ont visité les différentes fermes avant une table ronde dédiée à l’agriculture local : panorama historique, par Ary Broussillon, sociologue, rôle de la Chambre d’agriculture par Patrick Sellin, son président, présentation des grandes données de l’agriculture locale par Sylvain Vedel, directeur de la Direction de l’Alimentation, de l’Agriculture et de la Forêt (DAAF) de Guadeloupe, liens entre SAFER et INRAE par le président de ce dernier, Harry Archimède.

Rodrigue Trèfle, président de la SAFER de Guadeloupe :

Il y a une SAFER en Guadeloupe depuis les années 1960. La Guadeloupe a connu deux réformes foncières, une en 1961, l’autre en 1980. Chaque fois, la SAFER a eu son rôle à jouer et l’a fait avec plus ou moins de bonheur. Difficile de bien faire quand les exploitations font pour 97% d’entre-elles moins de cinq hectares et 57% moins d’un hectare.

Cependant, la réforme foncière de 1980 a permis, tandis que les usiniers fermaient leurs unités de production de sucre et vendaient leurs terres agricoles, de racheter celles-ci.

Cependant, avec ces terres il y avait une liste dont il fallait tenir compte, celle des colons qui exploitaient les terres de l’usinier en colonage partiaire (1/4 de la récolte ou de la vente de celle-ci revenait au propriétaire de la terre, l’usinier).

Que faire de ces colons ? La SAFER, alors sous la présidence dynamique de Christian Fléreau, souhaitait changer de logiciel agricole. Mettre fin à ce système de colonage, installer des jeunes formés (l’objectif était fixé à 25%)… mais ne pas laisser sur le bord de la route environ 1 000 ouvriers agricoles, que la SAFER a gérés.

La création de 38 Groupements Fonciers Agricoles (GFA) a permis de solutionner le problème et d’éviter d’avoir, comme entre 1971 et 1980, des conflits permanents dans le monde rural.

Sur les 10 500 hectares des GFA, il a été possible d’avoir 6 500 hectares pour installer 2 300 colons, 3 500 hectares étant du faire-valoir direct. 740 hectares d’ont pas été distribués et constituent une réserve.

Quelles difficultés rencontre la SAFER de Guadeloupe ? Il faut arriver à faire libérer les terrain occupés sans titre, sensibiliser les uns et les autres (et donc les agriculteurs qui partent à a retraite, dont les enfants ne veulent/peuvent pas reprendre l’activité) que libérer des terres agricoles participe du développement économique du territoire.

Sylvain Vedel, directeur de la DAF, rappelait qu’il y a 31 000 hectares de surfaces agricoles utiles SAU), soit une perte de 35% en vingt ans (essentiellement entre 2002 et 2010, négligeable depuis). Que la cenna représente 10 000 hectares de terres — dont 3 000 hectares des GFA —, permettant de produire en gros 400 000 tonnes de cannes (40 000 tonnes de sucre) et que cette filière est en danger. Il reste deux usines, l’une et l’autre en difficultés, et les distilleries qui auront toujours besoin de canne.

Il y a, poursuivait-il, 7 000 agriculteurs, sur de petites surfaces, dont un tiers ont plus de 60 ans. Pour eux, il s’agit de transmettre à leurs enfants ou à quelqu’un d’autre. Mais, comme les retraites sont très faibles, la plupart poursuivent leurs activités très longtemps… Il conviendrait de les inciter à louer leurs terres pour que des jeunes puissent s’installer.

Il faudrait installer 2 000 agriculteurs d’ici 5 ans

Le chiffre des installations est infime, entre 10 et 20 chaque année. « Il y aura 2 000 personnes à remplacer dans les cinq ans à venir ! », concluait-il, rappelant qu’entre un tiers et la moitié des personnes installées… ont abandonné faute de fonds.

Les enjeux sont donc connus.

Reste que Rodrigue Trèfle est inquiet : « Nous avons quelques inquiétudes quant à la suite si les terres en friche, celles qui ne sont plus exploitées, ne sont pas reversées pour permettre d’installer des jeunes, qui soient aidés pour leur démarrage, ceci afin de pratiquer la diversification qui permettre d’aller vers une auto-suffisance alimentaire. »

La Grivelière, ancienne caféière.

Aujourd’hui, le président Emmanuel Hyest et ses collègues seront en visite à La Grivelière, à Vieux-Habitants. Cette fois-ci, après une visite, ils se pencheront sur le développement des filières à haute valeur ajoutée et l’agroforesterie, table ronde associant l’Association Verte Vallée, le SAPCAV, l’Assofwi, l’ONF, le Parc National de Guadeloupe ainsi que la Safer Guadeloupe.

Il s’agit d’échanger sur les possibilités et moyens de concilier la protection des espaces naturels, le développement agricole et la préservation du patrimoine.
Dans cette perspective, le développement des cultures patrimoniales et des filières à haute valeur ajoutée sera analysé sous l’angle des obstacles et des leviers d’action envisageables.

Après un temps de présentation générale des filières et de leurs enjeux respectifs, il s’agira, pour les intervenants et la délégation, de dessiner les possibilités d’un accompagnement renforcé de la Safer à l’endroit des filières agroforestières.

André-Jean VIDAL
aj.vidal@karibinfo.com

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