Enfin ! Jean-Louis Francisque, président du Syndicat Mixte de Gestion de l’Eau et de l’Assainissement de la Guadeloupe (SMGEAG) a tenu une conférence de presse, mardi 24 janvier, au siège, au Gosier.
A sa décharge, Jean-Louis Francisque a eu, depuis sa désignation à ce poste — M. Francisque est maire de Trois-Rivières et vice-président du Conseil départemental — du pain sur la planche. Il a trouvé une situation difficile puisque le SMGEAG a repris toutes les activités du SIAEAG, de Rénoc, des régies communales, des régies des EPIC, etc. Toutes (sauf celle de Cap Excellence) en faillite ou quasi-faillite.
« En 2022, affirme-t-il, nous avons découvert 3 500 fuites dont 77% ont été réparées. A la suite de Fiona (la tempête tropicale qui a ravagé la Guadeloupe en septembre 2022), nous avons eu 78 chantiers d’un montant de 7 à 8 millions d’euros pour tout remettre en état, chantiers menés avec la Région et le Département. »
Des avancées
Au nombre des avancées dont le président Francisque dit que « c’est une fierté », il y a la facturation des abonnés. Elle s’est faite régulièrement à partir de janvier 2022, à raison de 1,5 à 2 millions d’euros recouvrés chaque semaine toute l’année, sauf la période de septembre-octobre liée à Fiona.
Léger bémol, mais il y reviendra plus tard dans sa conférence de presse : 50% des abonnés ne paient pas leurs factures d’eau.
Côté finances, le prêt obtenu par l’intermédiaire de l’Etat et garanti 25 millions par la Région Guadeloupe, 25 millions par le Conseil départemental, 25 millions ont été débloqués et il y avait 11 millions d’euros en trésorerie au 31 décembre 2022.
Que va-t-il se passer en 2023 ? La mise en place d’un schéma directeur, des investissements, une gouvernance revue et corrigée, une feuille de route et un service aux clients.
Le schéma directeur va permettre d’affecter 1,3 million à chaque grand secteur : eau potable, assainissement, eaux pluviales. « Si notre priorité c’est avoir de l’eau au robinet partout, l’assainissement et le traitement des eaux pluviales sont deux autres priorités incontournables », affirme Jean-Louis Francisque.
Investir rapidement
Il est essentiel d’investir rapidement parce que la situation générale l’impose. Le budget du SMGEAG s’établit à 240 millions, dont 154 millions pour le fonctionnement.
Fonctionnement ? Non, a rassuré le président Francisque, « la masse salariale c’est 37 millions d’euros avec 514 agents. » Il n’a pas caché qu’il y avait en cours de discussion un plan de départs volontaires qui pourrait concerner jusqu’à 150 personnes.
Donc, la masse salariale ne dévore pas l’essentiel du budget. Outre cette masse salariale, il y a l’achat d’eau au Département (eau agricole traitée et rendue potable), des charges financières à hauteur de 3 à 4 millions d’euros, et des actions sur le terrain, sur l’ensemble du territoire, pour réparer les casses, refaire des réseaux, etc. Et aussi l’achat de produits pour les usines, d’outils.
89 millions devraient être réservés dont 50 millions pour des investissements lourds d’équipement, dont 25 millions pour l’eau et 25 millions pour l’assainissement.
Autre priorité — il y en a beaucoup, tout est prioritaire — rechercher et réparer les fuites. En ce moment, parce qu’il s’agit d’un travail sans fin, le réseau était ce qu’il est, une passoire — 60 à 70% de l’eau partait dans la nature, pourcentage passé à 50% ces derniers temps — tout le monde est sur le pont : les techniciens du SMGEAG mais tout autant ceux de la Région et ceux du Département.
50% d’impayés
Gros morceau : renouveler les compteurs. Beaucoup sont bloqués ou endommagés pour diverses raisons (fraudes ou vétusté). Environ 30 000 sur 178 000. Du renouvellement de ces compteurs dépend la facturation. En effet, outre les mauvais payeurs (50%), il y a ceux qui s’abstiennent de payer… parce qu’il n’ont pas de facture, leur compteur est en a-panne depuis des années !
Une fois ces compteurs renouvelés, des factures nouvelles pourront partir chez les abonnés avec des totaux fiables puisqu’attestés par les compteurs. Jusqu’à présent, à part la conurbation urbaine pointoise et quelques communes, c’était le flou intégral. En sud Basse-Terre ça va leur faire tout drôle de payer leurs factures, des élus — et pas des moindre, par démagogie politicarde — avait dit dans les années 1990 qu’il ne fallait pas payer les factures.
D’ailleurs, que deviennent ces factures d’avant le SMGEAG ? « Ce ne sont pas nos factures, les abonnés, qui sont devenus les nôtres depuis 2022, doivent s’entendre avec les anciens fournisseurs d’eau. Mais, bien évidemment, ces derniers, avec les pouvoirs publics, vont trouver une solution », lance M. Francisque.
Une feuille de route dense
La feuille de route du SMGEAG comprend divers engagements signés à Paris, en présence du ministre délégué en charge des Outre-mer, Jean-François Carenco.
Engagements de l’Etat d’abord, qui va d »poser 27 millions d’euros dans la corbeille, subvention de fonctionnement. De même, il prendra à sa charge une aide logistique, une assistance technique avec la mise à disposition de 6 ETP, 5 autres venant ensuite si besoin. Une reprise en main par l’Etat de l’appareil de gouvernance ?
« Qui est président du SMGEAG ? », demande Jean-Louis Francisque qui n’imagine pas un seul moment qu’il puisse être une marionnette aux mains de qui que ce soit. D’ailleurs, une bonne âme veille sur lui qui a permis de détacher un haut-cadre de l’Office de l’Eau pour être directeur général délégué du SMGEAG.
Il s’agit de Marcus Agbekodo, qui a en charge l’administration de la structure. C’est un technicien éprouvé qui connaît son métier.
Engagement de la Région ensuite, qui va poursuivre ses opérations sur le terrain pour réparer les fuites et être maître d’ouvrages d’infrastructures essentielles.
Engagement du Département, enfin, qui assure la recherche de fuites et leur réparation, travaille sur l’Usine de Bellin en mauvais état, et a mis, comme on l’a vu plus haut, un haut cadre à la disposition du SMGEAG par Office de l’eau interposé.
« La question de l’eau, dit avec solennité le président Francisque, c’est une réussite ensemble. »
Assurer un bon service aux clients
Assurer un service, bon si possible, aux clients, est aussi une priorité. Ils ont trop souffert jusqu’à présent et ne comprendraient pas toute cette agitation s’il n’y avait pas de résultats concrets.
Ce service aux clients passe… par une facturation facilitée. il y aura donc une agence en ligne, une application pour signaler ou régler des factures, des bornes de paiement aussi sur tout le territoire.
« Il nous faut pouvoir démontrer que nous sommes sortis d’un point zéro, septembre 2021, pour franchir les paliers et être au fait de la gestion de l’eau sur tout le territoire », expose Jean-Louis Francisque.
Et l’assainissement ? « Il y a 25 millions en 2023 consacrés à l’assainissement, ce qui veut dire, explique Jean-Louis Francisque, des réparations sur l’ensemble des stations d’épuration, leur mise aux normes. Ensuite, nous en viendront aux réseaux puisque beaucoup de maisons, dans les campagnes, mais aussi dans les bourg ne sont pas raccordées aux stations. Ceci aussi ce sera assurer un bon service aux clients. »
André-Jean Vidal
aj.vidal@karibinfo.com