Le Conseil départemental de la Guadeloupe a commémoré l’abolition de l’esclavage en 1848. 176 ans plus tard, autour du président Guy Losbar, il y avait le préfet Xavier Lefort, Marie-Luce Penchard, ancien ministre, vice-présidente du Conseil régional, Brigitte Rodes, adjointe au maire de Basse-Terre et de nombreuses personnalités réunies au fort Louis-Delgrès pour un hommage solennel.
Le fort Louis-Delgrès est un de ces hauts lieux de la résistance en 1802 au rétablissement de l’esclavage après la première abolition de 1794. L’histoire a retenu que c’est là que les forces de résistance guadeloupéennes issues de la Révolution de 1789, conduites par le colonel Louis Delgrès, a résisté aux assaut des troupes menées par le général Richepanse, chargé de rétablir l’esclavage après huit années de liberté.
La résistance, puis le départ vers les hauts de Matouba, le suicide collectif des résistants ont marqué les esprits. Ils ont été les héros d’une geste immortelle.
Entre 1802 et 1848, des voix se sont élevées constamment pour demander la fin de la traite puis celle de l’esclavage.
Entrecoupées de danses, de récits, les intervenant, Brigitte Rodes, puis Marie-Luce Penchard, le préfet de région Xavier Lefort, ont rappelé dans leurs discours les faits, dit le souvenir, mis en avant l’œuvre de reconnaissance des crimes commis durant la période esclavagiste, des premiers convois arrivés d’Afrique dans des navires qu’on appelait négriers, jusqu’au moment où, dans toute la Guadeloupe, les cloches de la liberté ont retentit. Plus de deux siècles de souffrances.
Prenant à son tour la parole, Guy Losbar, puissance invitante, a ému l’auditoire quand il a parlé, avec tout autant d’émotion, d’un homme, un esclave de Petit-Bourg, qui s’était rendu le jour de l’abolition, à la mairie de cette commune pour s’inscrire. Charles Losbar, ancêtre de Guy Losbar, devenait un homme libre, avec un nom, une identité. Comme plus de 80 000 hommes, femmes, enfants, ils avaient le droit de quitter l’habitation ou la maison où ils étaient considérés comme des meubles, pour devenir des citoyens.
« Cette histoire occultée, je l’ai apprise quand j’avais déjà cinquante ans. J’ai, ce jour-là, retrouvé mon ancêtre, retrouvé mes racines. »
En mémoire de tous ces hommes, ces femmes, ces enfants, Guy Losbar et le Conseil départemental ont décidé une politique publique mémorielle.
Il s’agit, comme l’a dit le président Guy Losbar, d’une « politique publique locale de la mémoire de l’esclavage. »
Celle-ci se veut une écriture du récit guadeloupéen qui se veut partagé, apaisé, pour valoriser le patrimoine immatériel des familles, de 1635 à 1848.
Pour ce faire, le Conseil départemental mettra en œuvre un plan de promotion des archives sur cette période, avec une mission de cadrage pour définir les éléments du projet.
Il s’agit, entre autres, d’offrir aux arrières petits-fils de ces hommes, de ces femmes rendus à l’état d’esclaves, une clé pédagogique pour reconstituer leur arbre généalogique.
Il s’agit aussi de mettre en place de bornes mémorielle sur les lieux de souvenir. A cet effet, le Conseil départemental soutiendra des mémoriaux de proximité dans chaque commune qui le souhaitera.
Guy Losbar a loué la création du Mémorial national dans les jardins du Trocadero, sur 4 hectares, auquel le Conseil départemental souhaite être associé.
Il a aussi insisté sur la restauration des sites de mémoire, nombreux, complets : lieux de colonisation, lieu de production coloniale, lieux de résistance, cimetières d’esclaves comme au Moule, et le Mémorial ACTe. « Tout ceci constitue, a-t-il rappelé, un parcours mémoriel d’exception qu’il faut mettre en valeur. »
Guy Losbar a souhaité, de même, que la Guadeloupe soit au cœur du triangle mémoriel Afrique Amérique Europe.
C’est ainsi, qu’accompagné d’une délégation, il s’est rendu à Champagney, petite commune de France où ,en 1789, des hommes simples, paysans de la campagne voisine, ont rédigé, dans un article 39 du cahier de doléances à remettre au roi Louis XVI, leur souhait ardent qu’il soit mis fin à l’esclavage et qu’il y ait un boycott des produits venus des territoires où il y avait des esclaves.
De même, Guy Losbar s’est rendu en Afrique, au Bénin, à Ouidah, lieu de départ vers la déportation de millions d’africains. Avec les autorités béninoise, il a convenu d’un Mémorial qui sera édifié sur la plage du départ.
Enfin, une délégation du Département sera bientôt en déplacement aux États-Unis pour étudier comment les afro-descendants ont intégré l’histoire de leurs ancêtres.
Guy Losbar a demandé une minute de silence en mémoire de tous les esclaves morts sur la terre de Guadeloupe.
Des rendez-vous ce soir et demain
Par ailleurs, la programmation de Fò an fanmi — Journées mémorielles de la liberté se poursuivent. Les rendez-vous prévus sont les suivants :
• Dimanche 26 mai
– au Fort fleur d’épée, au Gosier, à partir de 18 heures : Lèwlouz, spectacle pluri-disciplinaires avec Gérard Delver (comédien – conteur), Christian Laviso (guitare, cuivre), Sony Troupé (percussions, batterie) Jean-Pierre Phipps (percussions, ka) et Valérie Morand (danseuse de lawond-a-léwòz), suivi, à 19 heures de Kalousera, pièce historique et chorégraphique de la compagnie Sakitaw.
• Lundi 27 mai
– au Musée Edgar-Clerc, au Moule, à partir de 6 h 30 : cérémonie commémorative « Hommage aux ancêtres mis en esclavage » organisée par l’association Lanmou Ba Yo. Marche du musée au cimetière des esclaves, à Sainte-Marguerite.
– au fort Delgrès, à Basse-Terre, à partir de 18 h 30 : Cin’xtérieur, projection en plein air du biopic Harriet de Kasi Lemmon, puis Créations hybrides, restitution de la résidence d’artistes (21 heures), concert Symphonie ka (22 heures), avec à la direction musicale Jean-Michel Lesdel, suivi d’un feu d’artifice.