Direct. Les élus se sont fait inscrire et entrent dans l’hémicycle où Hubert Quiaba et un groupe de contestataires veulent se faire entendre. Le président Guy Losbar promet de les recevoir prochainement. Il est applaudi.
Le Congrès des élus est prévu pour une journée de débats.
Direct du Conseil Départemental
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10 h 15. Le président Guy Losbar, président du Conseil départemental, président du Congrès des élus, Ary Chalus, président de la Région Guadeloupe, les vice-présidents de l’une et l’autre collectivité, l’entourent. L’appel permet de constater que l’essentiel des élus attendus sont là. Il s’agit des conseillers départementaux et régionaux, des maires, des représentants des communautés d’agglomération, des parlementaires, y compris les députés sortants.
Jocelyn Sapotille, président de l’Association des maires, est absent, représenté. Il y a 76 présents et trois représentés.
Au menu de cette matinée, après les discours introductifs, l’étude des 153 préconisations pour améliorer les politiques publiques.
Guy Losbar salue son collègue du pacte de gouvernance — bien écorné : « Cher Ary ! ». Il salue aussi Dominique Théophile : « Monsieur le vice-président du Sénat », comme il se doit, protocole oblige. Guy Losbar commente brièvement les résultats des élections européennes, rapidement au plan national, plus au fond sur le plan local où le Rassemblement national a fait le plein des voix.
Discours qui se veut aussi une justification de la tenue du Congrès des élus… malgré les voix qui se sont élevées pour lier la politique nationale avec l’Assemblée nationale dissoute par le président de la République et la tenue du congrès qui est l’affaire des Guadeloupéens. « Le statu quo n’est plus possible. »
Il en appelle aux combats des anciens : Gerty Archimède, Rosan Girard, d’autres encore… Tous ont lutté pour faire avancer la Guadeloupe. Guy Losbar reprend l’une des phrases favorites d’Ary Chalus : « Nul mieux que les Guadeloupéens savent ce qui est bon pour la Guadeloupe. »
« Je suis favorable à une collectivité unique, à une nouvelle approche avec l’Etat, plus partenariale que tutorale. Il faut que personne ne tente d’utiliser le changement de statut et la peur qu’il peut générer à des fins électorales. Aucun changement n’est envisageable sans le peuple. C’est pour cela que nous avons tenu des ateliers, des webinaires, des rencontres avec la population au cours de forums. Le temps viendra où les Guadeloupéens seront consultés par un vote. »
Les attendus des travaux du Congrès des élus seront transmis au gouvernement.
L’intégralité du discours de Guy Losbar :
Ary Chalus explique en préliminaire à son discours qu’il a entendu la demande de certains partis politiques pour un report du Congrès. Il souscrivait à cette demande mais, par solidarité, il est venu, avec les élus régionaux. Quand à la déclaration de Marie-Luce Penchard, il adhérait : « Elle sait ce qu’elle fait. Je l’ai soutenue totalement. »
Ary Chalus souhaite qu’on prenne le temps, dans l’unité. « Dommage, nous ne sommes pas unis. J’espère que, le jour où nous tiendrons un congrès décisif, nous n’agirons ni dans l’intérêt d’une personne, ni dans l’intérêt d’un parti mais pour les Guadeloupéens. » Le ton est donné.
« Gouverner c’est agir sans allégeance ni soumission… » C’est ainsi qu’Ary Chalus voit ses rapports avec l’Etat, affirmant que ce n’est pas une spécificité des Outre-mer mais une volonté unanime des régions françaises. « Partout en France il est questions de plus de démocratie, d’efficacité, de renouer les liens entre les citoyens et les élus… »
Ary Chalus loue les travaux de la commission ad hoc. « Il est temps de passer de la parole aux actes. Il conviendra aux Guadeloupéens de trancher, mais en connaissance de cause. Il nous faut retrouver la confiance de nos concitoyens. »
Le score du Rassemblement national ? « Un des symptômes de la désaffectation des citoyens. »
Il appelle les élus à travailler ensemble, en toute responsabilité. « Tout le monde ne peut jamais être d’accord avec tout le monde mais il faut travailler ensemble, mettre en œuvre les politiques publiques qu’attendent les citoyens. »
Pour lui le cap est gardé à la Région, « même si certains essaient de me faire tomber avec l’aide de la justice » , ajoute-t-il sans regarder personne. Le sénateur Victorin Lurel est attentif.
Ary Chalus égrène ses réalisations passées, en cours et à venir…
« Nous sommes capables de prendre en main notre destin. A nous, dans le cadre de ce Congrès, d’adapter les institutions à la Guadeloupe d’aujourd’hui plutôt que de pousser en avant une idéologie ou des calculs politiques. »
« J’ai toujours été en faveur d’une évolution du statut de la Guadeloupe. » Ary Chalus rappelle ses combats avec Jacques Gillot, la signature de l’Appel de Fort-de-France. « J’ai une foi profonde et absolue en la Guadeloupe. » Ce qu’il veut ? Une loi organique, un changement de statut pour la Guadeloupe. « Nous devons nous hisser suir les épaules des géants, et de cette hauteur, nous pourrons nous retrouver. Nou tout paran ! La Guadeloupe a besoin de tous ses enfants. »
L’intégralité du discours d’Ary Chalus :
Héric André, premier vice-président de l’Association des Maires, va présenter les enjeux d’un pouvoir normatif.
De quoi s’agit-il ? De la possibilité de faire des lois locales dans certains domaines où les élus ont des compétences mais limitées.
A ce stade, que faut-il retenir des discours des deux présidents, Guy Losbar et Ary Chalus ? Une volonté affichée d’aller de l’avant, c’est le discours officiel, mais on n’a pu éviter, surtout de la part d’Ary Chalus, quelques allusions, quelques volontés d’en découdre… Ce n’est plus, malgré le Cher Ary de Guy Losbar, le temps des sourires entendus pour se partager les rôles politiques.
Bernard Guillaume, président du groupe Péyi Gwadloup à la Région, se voit offrir la parole. « Les élus du groupe GPS et Péyi Gwadloup souhaitent exposer les raisons pour lesquelles nous voulons le report de ce congrès. » Pourquoi ? Il y a un manque de consensus politique « solide et unanime ». Bernard Guillaume regrette en vrac l’absence de prise en compte des propositions du groupe, l’absence des députés, la situation politique en France après la décision du président de la République de mettre fin au mandat des députés et de lancer une campagne de législatives… « Il n’y a pas d’urgence pour ce congrès. Nous ne participerons pas aux travaux de ce congrès, nous quittons cette assemblée par souci de justice, de transparence… »
Guy Losbar dénonce une posture politicienne et poursuit les travaux.
Victorin Lurel :
Daniel Maragnès, expert en politiques publiques laisse la place à Maryse Etzol, qui parle au nom des Îles du Sud. Elle veut une collectivité unique mais que soit conservée la Communauté de communes de Marie-Galante tout en faisant en sorte que les Îles du Sud soient représentées dans la future collectivité unique. La double insularité est mise en avant, le souhait que l’on n’oublie pas les difficultés des populations de ces îles.
A l’extérieur, Guy Losbar explique aux médias que les membres des deux groupes qui ont quitté le Congrès des élus ont participé aux débats, certains, dont Victorin Lurel, a participé et travaillé effectivement dans la commission ad hoc. « C’est une posture. Nous allons continuer à travailler ! »
Le GPS et Péyi Gwadloup diffusent une déclaration :
D’autres experts prennent la parole pour expliquer le fonctionnement de la fiscalité et ses implications localement. Octroi de mer, taxes diverses, tout est passé au crible d’une expertise en faveur d’une fiscalité « localisée », c’est-à-dire prise en main localement.
Au retour de la pause déjeuner, c’est le temps des prises de paroles des élus.
Francs Baptiste, maire de Sainte-Anne, « demande la domiciliation de certaines compétences, dans le cadre de la République française. Le fait d’avoir une collectivité forte, emmènera, dit-il, des communes plus fortes. Mutualiser les moyens c’est une force. Il faut arrêter de tourner e nrond, comme dirait Fred Deshaies. Depuis 2003, qu’avons-nous fait ? Je veux entendre, dans cette idée de domiciliation, d’avoir une Guadeloupe plus forte ! »
Claude Edmond, maire de Gourbeyre : « La collectivité unique n’est pas une fin en soie prise de conscience, même si cela entraîne des économies. Elle doit être accompagnée d’une prise de conscience qu’il faut s’orienter sur plus d’autonomie avec une économie axée sur le développement endogène. »
Marie-Luce Penchard, vice-présidente de la Région Guadeloupe. « Que de temps perdu depuis 20 ans ! Il est temps de dénoncer cet immobilisme, ces compétences que nous avons mais dans un cadre contraint. Le courage politique c’est dire que nous avons des compétences mais que nous ne pourrons jamais, en matière d’aménagement, par exemple, dire qu’il faut une préférence locale dans les entreprises retenues, dans les emplois… »
« Il faut s’affirmer, comme le disait Lucette Michaux-Chevry dans la Déclaration de Basse-Terre ! Il faut pouvoir défendre que l’idée de compétence locale doit être le cœur de notre modèle dans les relations que nous voulons avoir avec l’Etat. »
Sylvie Gustave-dit-Duflo, vice-présidente de la Région, invite « à ne pas rester immobiles. »
La thématique de la fusion de la Région et du Département est lancée : quelles nouvelles institutions ?
Jean-Philippe Courtois, premier vice-président du Département : « L’adaptation permettra de répondre de manière efficace aux besoins spécifiques du territoire. »
Pour ce faire, il faut des pouvoirs normatifs et des institutions. Institutions qui tiennent compte des réalités de l’archipel. Un autre cadre juridique permettra avec l’adaptation des normes d’être au plus près des spécificités d’une Guadeloupe prête à aborder l’avenir. « Changer, ça fait peur, mais il faut poser les bases d’nne société guadeloupéenne plus juste et plus responsable. »
Fred Réno, professeur de science politique, explique que « la collectivité unique n’est pas l’addition des deux collectivités que sont la Région et le Département. C’est une fusion. »
Fred Réno a interviewé des personnalités politiques, mais aussi les maires de Guadeloupe. Presque tous, trente sauf trois, sont pour un changement.
Pourquoi ? Parce qu’ils estiment que leurs dossiers seraient mieux considérés s’il n’y avait qu’une collectivité. Ils soutiennent, à juste raison, que les compétences exclusives de la Région et du Département ne tiennent pas toujours et que l’économie, vaste sujet, par exemple, est de la compétence de la Région mais que des actions du Département touchent à cette compétence. Ils font remarquer, et ils ont raison, que le braconnage n’est pas exclusif de l’une ou l’autre collectivité. Il faut asseoir ou conforter son leadership. C’est humain. De ce leadership vient que l’une ou l’autre collectivité, dit un maire, soutient plus certaines communes.
Mais, quoiqu’ils soient pragmatiques et vont chercher des équipements là où on veut bien les leur donner, les maires sont favorables à une seule collectivité. « Même lorsque l’on considère que les exécutifs sont amis ou du même parti, il existe toujours une dualité pour qu’une collectivité soit plus en vue que l’autre. Mécaniquement des frictions se créent et d’ailleurs on en a l’exemple dans cette fameuse gestion commune, le pacte de gouvernance », a dit un maire.
Une seule collectivité, moins de frictions de personnalités ? En tout cas, les maires passent outre cette personnalisation et restent dans le concret. Le concret c’est la constitution des dossiers de financement quand le sujet concerne autant l’une que l’autre collectivité majeure. Une route, par exemple, communale, avec une route départementale et une route nationale au croisement… Qui est compétent ?
Faire la loi à la place de Paris Ces maires qui veulent du changement, une collectivité unique, veulent que celle-ci ait des compétences élargies. Les compétences de la Région et du Département, certes, mais aussi la possibilité de faire des lois parce que, disent-ils, les lois « françaises » ne sont pas toujours applicables en l’état ici. Ces fameuses spécificités qui font rire ailleurs et qui sont si précieuses ici. Elles sont évoquées par les élus dans toutes les discussions avec les ministres et les fonctionnaires de l’administration centrale.
Ceux-ci répondent que, depuis la décentralisation (il y a 40 ans) et les lois et règlements qui ont suivi, les collectivités ont de plus en plus des possibilités d’adaptation par les habilitations et les dérogations. Qu’ils utilisent déjà ce qu’ils ont…
Que veulent les maires ? Fred Réno : « Le pouvoir normatif souhaité s’exercerait pleinement dans les domaines de compétences de la collectivité, notamment en matière d’urbanisme, d’environnement et de gestion du littoral, d’énergie et de culture. Quelques maires ont manifesté le souhait de partager l’éducation et la santé avec l’État. En matière de santé, les services déconcentrés comme l’ARS devrait réserver une place plus importante à la collectivité dans l’administration de l’agence régionale. La situation sanitaire des îles du sud pourrait s’en trouver améliorée. Mais c’est la possibilité d’avoir un statut fiscal autonome qui a été plébiscité par les exécutifs communaux. Il ne s’agirait pas nécessairement de créer de nouvelles contraintes pour la population mais de récupérer une partie des prélèvements obligatoires de l’État comme la taxe sur les jeux de hasard. Ce statut fiscal reposerait aussi sur un octroi de mer repensé. La protection d’une production locale à développer et le soutien aux collectivités locales resteraient ses principaux objectifs… »
Julien Mérion, docteur en droit public, met en scène le devenir des intercommunalités, ceci après un rappel historique. Cinq intercommunalités et une communauté de communes, à Marie-Galante.
Que disent les experts ? Il y a six EPCI : CAPEX, CANGT, CARL, CANBT, CAGSC, CCMG.
CAPEX ou Cap Excellence, c’est le cœur du sujet. Cap Excellence est, selon l’analyse faite dans l’étude du CAGI, « d’abord un construit reposant sur des fondements les plus divers, parmi lesquels la viabilité économique du territoire, sa taille démographique, ses ressources techniques et administratives, sa capacité à influencer le développement du reste de la Guadeloupe, sa capacité à peser face aux collectivités régionale, départementale et à l’État ».
Le maire des Abymes, président de Cap Excellence, défend cette centralité. Il est favorable au regroupement des autres EPCI (Grande-Terre et Basse-Terre) qui constituerait les deux ailes du papillon, tandis que le centre en serait selon son expression « le corps ». On pourrait même, toujours selon lui, envisager une extension vers Morne-À-L’eau et Petit-Bourg dans l’hypothèse du regroupement.
On le voit, l’idée de trois EPCI est lancée, rationnelle puisqu’elle supprimerait les EPCI intermédiaires qui alourdissent le shcmilblik.
Guy Losbar reprend la main pour proposer quatre résolutions aux votes.
Première résolution, présentée par Jean-Philippe Courtois : la différenciation et la domiciliation locale des pouvoirs de décision dans certaines matières eu égard à ce qu’est la Guadeloupe (culture, traditions, etc.) : proposition d’un pouvoir normatif en matière d’aménagement du territoire, d’urbanisme, du droit du littoral, des ressources halieutiques, du transport routier et maritime, de la voirie, etc., du tourisme, de l’environnement, de l’énergie, du droit du travail, de la préférence locale à l’emploi à compétence égale, de l’emploi des étrangers, etc. La Région et le Département doivent voter dans les quinze jours.
Deuxième résolution, présentée par Marie-Luce Penchard : cadre plus adapté aux spécificités de la Guadeloupe : Justice, garantie de la sécurité, défense, monnaie, nationalité restent à l’Etat; l’éducation, la coopération régionale, c’est la Guadeloupe en partage avec l’Etat. Le local, c’est tout ce qui a été vu dans la première résolution.
Troisième résolution, présentée par Maryse Etzol : la collectivité unique avec une assemblée de 60 membres qui élit le président. Cette collectivité récupère les compétences de la Région et du Département.
Quatrième résolution présentée par Jean-Claude Nelson, conseiller régional : drapeau, hymne et devise seront choisis après concours.
Toutes ces résolutions devront être votées dans les 15 jours par les deux collectivités, Département et Région, dans les mêmes termes.
Ary Chalus, avant le vote, veut dire quelques mots pour dire qu’il n’était pas d’accord au départ avec certains points. « Nous sommes tombés d’accord sur certaines choses aujourd’hui… Je regrette que certaines personnes qui ont contribué aux travaux de la commission ad hoc soient parties du Congrès. Ce que nous allons voter, ce sont des propositions au gouvernement. C’est un début, nous allons continuer les travaux… » Donc, il vote les résolutions.
Les résolutions sont toutes votées à l’unanimité.