Guadeloupe. La directrice du MACTe défie le président de Région !

Le MACTe, un outil culturel majeur dans la tourmente.

Lundi 13 mars, au matin, la directrice du MACTe était convoquée pour rencontrer le président de Région, Ary Chalus, qui est aussi le président du conseil d’administration du MACTe.

Laurella Rinçon n’est pas venue, sans explication. Elle avait, en février 2023, pas plus répondu à une précédente convocation.

« Elle ne s’est pas présentée… Sans aucun motif qui expliquerait son absence. Après avoir consulté le conseil d’administration qui sera rapidement réuni, il y aura une suite… », a sobrement commenté le président Ary Chalus.

Un beau CV

Laurella Rinçon, conservatrice du patrimoine du ministère de la Culture, a été nommée directrice générale du MACTe, à la tête de cette institution culturelle incontournable. Ceci à la demande de Georges Brédent, qui était alors conseiller régional, président de la commission Culture, président du conseil d’administration du MACTe, et d’Ary Chalus, qui, en septembre 2019, s’en félicitait. Un bon choix, selon lui.

Laurella Rinçon avait des atouts apparemment séduisants : Guadeloupéenne, passée par l’Ecole du Louvre et l’Institut national du patrimoine, spécialiste reconnue des collections et cultures d’Afrique de l’Est, des Caraïbes et de l’Océan Indien, avec une mission à l’UNESCO. Et un joli carnet d’adresses…

Rapidement, il apparaissait que Laurella Rinçon avait une idée toute personnelle de la gestion du MACTe et qu’elle n’avait besoin ni du conseil d’administration, ni du financeur, la Région, pour mener sa barque.

Fin juillet 2021, elle était néanmoins débarquée par le conseil d’administration de Georges Brédent qui lui reprochait des tensions avec les salariés (elle en avait licencié plusieurs — une dizaine — depuis son arrivée, d’autres sont partis, dégoûtés, disaient-ils par des décisions qui étaient à l’encontre de ce qui était l’essence même du musée), mais aussi des notes de taxi excessives (Laurella Rinçon n’a pas de permis de conduire), ceci après des dénonciations publiques effectuées par le syndicat CFTC, présent au MACTe.

Licenciée puis réintégrée

Pour sa défense devant le tribunal administratif de Basse-Terre — soutenue par un cercle d’amis influents sur les réseaux sociaux et dans les cercles artistiques — la directrice du MACTe laissait entendre qu’elle avait remis en cause plusieurs prestataires du musée, qui auraient surfacturé leurs services et ajoutait avoir signalé, au procureur de la République de Pointe-à-Pitre, le non-reversement au MACTe de 423 653 euros de billetterie par le Conseil régional entre le 1er août 2019 et le 16 mars 2020.

Le tribunal administratif retoquait la révocation du contrat de Laurella Rinçon. Révocation décidée entre deux élections régionales par un conseil d’administration dont la plupart des membres n’étaient pas élus ou réélus dans leurs collectivités, ce qui leur ôtait tout droit de siéger et encore moins d’agir soulignait le juge administratif.

Laurella Rinçon était réintégrée dans ses fonctions. A son retour, elle retrouvait un MACTe qui n’était administrativement plus que l’ombre de lui-même. Avec moins de salariés pour le faire fonctionner, plus réellement de politique culturelle… Le conseil d’administration trouvait souvent, souhaitant se réunir, portes closes, la directrice était seule à détenir les clés de l’établissement.

En septembre 2022, la direction du Travail demandait non seulement la réintégration de l’ensemble des salariés — une partie avait été réintégrée en juillet — mais encore que ceux-ci soient assurés par la directrice que leur santé physique et mentale soit préservée…

Malheureusement, ces salariés étaient interdits de retrouver leurs bureaux.

Résistance opiniâtre

Pourtant, le ministère de l’Emploi, du Travail et des Solidarités insistait, sommant « Laurella Rinçon et Ary Chalus, ce dernier en qualité de président du Conseil d’administration du MACTe, de prendre toutes les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs. »

Requête restée lettre morte.

Le 20 octobre, le conseil d’administration se réunissait, pour que la directrice « rende des comptes » mais aussi pour faire réintégrer les salariés licenciés indument. Sans effet.

En février 2023, Laurella Rinçon était convoquée pour répondre de « manquements ». Elle n’étairt pas venue. Elle avait envoyé un courrier pour dire qu’elle n’était pas disponible. « Je suis président du MACTe mais je ne connais pas ses déplacements, son fonctionnement… », déplorait Ary Chalus.

Cependant, en janvier 2023, Laurella Rinçon avait invité de nombreuses personnalités du monde artistique (et la presse) pour présenter ses vœux ainsi que son programme pour l’année. Superbe fête sur la terrasse, avec conférence de presse, déclarations tout à fait convaincantes sur sa volonté de réussir son pari : faire du MACTe l’outil culturel essentiel de la Guadeloupe.

Une sorte de dédain

Interrogés par nos soins, des membres du conseil d’administration — et non des moindres — avaient répondu qu’ils n’avaient pas été invités et qu’ils avaient cessé de chercher à comprendre le fonctionnement actuel du MACTe où une directrice est toute puissante et les autorités de tutelle — Etat central, Région — tétanisées…

Plus tard Laurella Rinçon avait fait la couverture de magazines locaux, présentée en majesté, puis était invitée à de nombreuses reprises par des médias à présenter son programme culturel. Elle faisait de même publier des affiches 4X3 sur les actions du MACTe, sachant habilement entretenir son image.

Ce lundi, Laurella Rinçon a une nouvelle fois ignoré la convocation effectuée par voie d’huissier du justice… une deuxième fois. Comme un défi.

« Nous en tirerons toutes les conséquences », a promis Ary Chalus.

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