Guadeloupe. Couvre-feu : le préfet Lefort veut protéger les mineurs

Le préfet de Région, Xavier Lefort, a signé, le 20 avril, un arrêté instaurant un couvre-feu sur le territoire de Pointe-à-Pitre, élargi à certains quartiers des Abymes (notamment Grand-Camp, Vieux-Bourg… Il a tenu, vu la complexité et la nouveauté du principe, en parler avec les médias.

Xavier Lefort, préfet de Région :

Le préfet de région Xavier Lefort, le préfet en mission François Lalanne, le commissaire général de police Vincent Le Borgne (en poste en Guadeloupe depuis quelques semaines en qualité de chef d’état-major de la police) étaient accompagnés lors d’une conférence de presse tenue en l’Hôtel de police, aux Abymes, aux confins de Pointe-à-Pitre, d’Henry Angélique, 4e maire adjoint de Pointe-à-Pitre, et de Charles-Edouard Leffet, conseiller municipal des Abymes, qui représentaient les maires empêchés.

Dès l’annonce d’un couvre-feu par le ministre de l’Intérieur et des outre-mer lors de son passage en Guadeloupe, à la demande d’Harry Durimel, maire de Pointe-à-Pitre, Eric Jalton avait émis de solides réserves qu’il réitérait encore ce lundi matin, notamment que des jeunes qui pratiquent des sports ou des activités culturelles, le soir, après l’école… puissent avoir l’autorisation d’être dehors après 20 heures.

Charles-Edouard Leffet, conseiller municipal des Abymes en charge de la sécurité :

Pour ce qui est de Pointe-à-Pitre, aucune difficulté, état d’esprit confirmé par Henry Angélique, à mettre en place le couvre-feu. Pour ce qui est des Abymes, le préfet Xavier Lefort a mis tout le monde à l’aise, notamment Charles-Edouard Leffet, émissaire d’Eric Jalton, qui demandait que l’heure de début du couvre-feu soit repoussée à 22 heures : « Nous avons des données précises : les faits de délinquance, y compris ceux commis par ou contre des mineurs, le sont entre 20 et 22 heures principalement. J’entends les réserves du maire des Abymes avec qui j’ai eu une conversation téléphonique ce matin. Mais, comme il s’agit d’un arrêté préfectoral et non d’un arrêté municipal, je fais droit aux chiffres. C’est donc un couvre-feu partiel de 20 heures à 5 heures du matin qui a été pris, concernant les Abymes, pour deux quartiers qui sont contigus au territoire de Pointe-à-Pitre : Grand-Camp et Vieux-Bourg où il se passe beaucoup de choses… » Fermez le ban.

Sur quelles données s’appuient les autorités pour décider de ce couvre-feu soutenu par le ministre de l’Intérieur lui-même qui l’a demandé expressément lors de sa toute récente visite ?

Les chiffres sont mauvais. La délinquance générale explose depuis janvier 2024, celle des mineurs est plus qu’inquiétante.

« Premier constat : la délinquance en Guadeloupe augmente d’une année sur l’autre de 20%. Il s’agit souvent de vols à main armée. Pour ce type de délinquance, la Guadeloupe est troisième sur le plan national. Aux Abymes, la délinquance a augmenté de 25% et de 20% à Pointe-à-Pitre. Deuxième constat : pour ce qui est de la délinquance des mineurs, c’est-à-dire les jeunes de moins de 18 ans, le taux de délinquance est de 16%. Ce qui veut dire que sur 100 délinquants interpelés, il y a 16 mineurs, essentiellement de 15 à 17 ans. 40% des mineurs délinquants sont dans cette tranche. Mais, il y a des mineurs délinquants de 9, 10 ans… », prévient le préfet.

Xavier Lefort, sur le choix des tranches horaires :

« Qu’il n’y ait aucun doute dans l’esprit des uns ou des autres, l’arrêté de couvre-feu a été pris pour protéger les mineurs. Il faut mettre en sécurité les jeunes qui peuvent, s’ils sont dehors, seuls, de nuit, et la nuit tombe à 18 h 23, à 20 heures, c’est nuit noire, être agressés, frappés, volés. 40% des faits de délinquance sont commis entre 20 heures et 22 heures. Si les mineurs sont accompagnés, pas de problème. Si les mineurs, parce qu’ils ont des activités culturelles ou sportives, ne sont pas chez eux passé 20 heures, que leurs parents les accompagnent ou viennent les récupérer au siège de l’association ou au club de sport », précise le préfet Lefort.

Xavier Lefort sur les moyens humains mis en place pour surveiller le couvre-feu :

Pour ce qui est des zones choisies, qui ont intrigué le public : pourquoi pas Lauricisque à Pointe-à-Pitre et pourquoi Grand-Camp ou Vieux-Bourg aux Abymes, le préfet répond : « Quand nous prenons la décision de prendre un arrêté de couvre-feu, ce n’est pas au hasard. Les zones concernées sont des zones où la délinquance est exacerbée. Ce sont des zones où la police est contrainte d’intervenir tout le temps parce qu’il y a une forte délinquance. Des zones où la délinquance des mineurs est importante. Des zones où des mineurs sont nombreux à être victimes de cette délinquance parce qu’ils sont dehors le soir, hors de tout contrôle parental. »

Vincent Le Borgne, commissaire général de police :

ILS ONT DIT

Eric Jalton, maire des Abymes,
président de Cap Excellence :
« Attention de franchir la ligne rouge ! »

« Le préfet viens de m’annoncer qu’il annoncera lors d’une conférence de presse au commissariat de Lafond Les Abymes à midi le périmètre et des nouvelles modalités de la mesure de couvre-feu pour mineur décidé par le ministre de l’Intérieur, tenant compte des réserves que j’ai formulées hier.
Je rappelle que les Français sont favorables à 67 % au couvre-feu pour mineurs, mais entre 23 heures et 5 heures et non dès 20 heures, comme l’a décidé le ministre de l’Intérieur pour Pointe-à-Pitre …
Par ailleurs, les rares expériences tentées en la matière dans l’Hexagone ont été soit retôquées par la justice soit concernaient des mineurs de moins de 15 ans.
Donc, attention de  franchir la ligne rouge des privations de liberté pour une partie de notre jeunesse saine et ne jetons pas le bébé avec l’eau du bain sous couvert de lutte légitime contre la délinquance et pour la sécurité. »

Henry Angélique, 4e maire adjoint en charge
des affaires de sécurité : « Ce couvre-feu
est une bonne démarche de bon sens. »

« Il s’agit d’une mesure forte mais une vraie réponse apportée à un vrai constat : on se rend compte sur le terrain comme il est difficile de faire face à des délinquants de plus en plus jeunes. Il s’agit aussi de protéger les jeunes et leurs familles. Ce couvre-feu est une bonne démarche de bon sens. »

L’arrêté du préfet :

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