Grands dossiers : les discussions sont ouvertes entre l’Etat et les collectivités de Guadeloupe

Cette année 2022 marquera peut-être l’histoire mouvementée des relations entre la Guadeloupe (la Martinique et la Guyane aussi, un peu moins la Réunion et Saint-Martin, presque pas Mayotte) et l’Etat. Des discussions vont s’ouvrir entre les collectivités de Guadeloupe et l’Etat sur les grands dossier et l’avenir statutaire.

D’abord, il y a eu cette délégation d’élus qui sont allés rencontrer l’ancien ministre des Outre-mer, le facétieux Sébastien Lecornu, pour lui parler de domiciliation de compétences jusqu’à présent solidement retenues par l’Etat et son pion, le gouvernement.

Qu’a répondu M. Lecornu ? Autonomie ! Du moins que l’Etat (comprendre le chef de l’Etat Emmanuel Macron) était prêt à entendre et pourquoi pas… à accéder à cette demande si elle était formulée plus officiellement.

Stupeur des élus, qui ont vite dit que c’était à eux de décider d’un calendrier. Au cas où l’Elysée aurait eu une de ces toquades… lourdes de conséquences. Mais non, tout s’est calmé très vite et les discussions se sont poursuivies sans public. Et sans tapage, surtout.

L’Appel de Fort-de-France a été entendu

Les signataires de l’Appel. Il manque Guy Losbar qui est associé à la démarche. @CTM

Il y a donc eu, le 17 mai, l’Appel (ou déclaration) de Fort-de-France, un coup bien monté par Serge Letchimy, président de la Collectivité territoriale de la Martinique, qui sait bien qu’à plusieurs on est plus fort. Et surtout, lui a bien entendu les sirènes de l’autonomie siffler à ses oreilles. Douce musique pour un autonomiste chevronné. Il commence d’ailleurs, par des discussions personnelles avec l’Etat, à en tirer des bénéfices pour sa Martinique. Tout en réunissant un congrès des élus et des Martiniquais pour faire un audit et des propositions qui se tiennent.

On signé la déclaration, outre Serge Letchimy, Ary Chalus, président du Conseil régional de la Guadeloupe, Guy Losbar, président du Conseil départemental de la Guadeloupe, Gabriel Serville, président de la Collectivité territoriale de la Guyane, Louis Mussington, président de la Collectivité de Saint-Martin, Huguette Bello, présidente de la Région Réunion, Ben Issa Ousseni, président du Conseil départemental de Mayotte.

Face aux situations « de mal-développement structurel à l’origine d’inégalités de plus en plus criantes qui minent le pacte social », les présidents ont rappelé l’urgence d’ouvrir une nouvelle étape historique pour les territoires d’outre-mer.

Appel entendu par le président de la République, Emmanuel Macron, qui a reçu les élus le 7 septembre et leur a promis qu’ils seraient écoutés. Il a donné pour consigne à la Première ministre, Elisabeth Borne, à Gérard Darmanin, ministre de l’Intérieur et des Outre-mer, à Jean-François Carenco, ministre délégué chargé des Outre-mer, la mission de préparer un calendrier.

Le 12 octobre, les deux ministres, MM. Darmanin et Carenco, ont écrit à Guy Losbar, président du Conseil départemental de la Guadeloupe, pour lui signifier leur accord sur un calendrier (il y a eu des discussions directes entre directeurs de cabinets pour trouver des dates), et une méthode pour faire avancer les grands dossiers… et parler statut au regard des discussions préalables.

Guy Losbar la tête sur les épaules

De longues discussions, pragmatiques, avec le chef de l’Etat.

L’on doit à Guy Losbar cette avancée politique, l’élu ayant choisi plutôt que les grands cris et les déclarations à l’emporte-pièce sans suite qui sont l’apanage des gens peu sûrs d’eux, la discussion raisonnée, d’abord avec le chef de l’Etat lors d’une rencontre en tête-à-tête, puis avec la Première ministre, la présidente de l’Assemblée nationale, Gaëlle Braun-Pivet, et le président du Sénat, Gérard Larcher, enfin les ministres à plusieurs reprises.

Que veut Guy Losbar ? Que l’Etat accepte que les collectivités locales soient des partenaires dans la mise en place des politiques publiques. L’Etat, lourdement impacté lors des dernières élections présidentielle et législatives qui ont vu ses symboles, le président de la république et le gouvernement, brocardés, moqués. Emmanuel Macron battu localement par la candidate du Rassemblement national. Des députés macronistes rejetés.

La méthodologie qui sera retenue — qui a été dévoilée lors de la plénière du 28 octobre par le président Guy Losbar— est celle de préparatifs sur six mois avant la première réunion d’un Conseil interministériel de l’Outre-mer (mars ou avril 2023). Cette réunion sera présidée par la Première ministre Elisabeth Borne. Des premières décisions seront prise alors. Tout ceci prendra du temps.

Déjà, comme l’a dit Guy Losbar, il y aura, localement, une commission mixte Département-Région, le 14 novembre, qui commencera à travailler sur la base des propositions issues de la fameuse plateforme des élus pour une sortie de crise.

Et puis, il faudra plancher sur neuf thèmes bien définis.

Quels sont-ils ? « Le retard indéniable sur les investissements, les questions environnementales, les aides au développement économique dans les territoires, l’ensemble des politiques de l’Etat passées au crible de l’efficacité et de la création de valeur, l’inadaptation des normes, l’insertion des territoires dans leur environnement régional, culture et mémoire, la fiscalité, les institutions. »

« Il ne s’agit pas de redire ce qui a déjà été exposé mais de proposer au travers des huit premiers chantiers les réformes qui garantiront une plus grande efficacité des différentes politiques publiques, avec un véritable souci de différenciation et de responsabilisation de chacun d’entre eux. » C’est ce que dit la lettre à Guy Losbar.

Des discussions et décisions qui vont marquer
durablement l’avenir des Guadeloupéens

Lettre qui poursuit parce qu’il y a un neuvième thème…

« Le 9e chantier, celui des institutions, viendra tirer les conséquences juridiques des propositions élaborées dans les huit premiers chantiers, y compris sur le plan constitutionnel et organique sic ela s’avère nécessaire. »

Régulièrement, en fait chaque mois, il y aura des rencontres qui permettront chaque fois d’étudier à fond deux thèmes, réunions avec les collaborateurs du président Losbar et ceux des ministres afin de travailler sur les problèmes rencontrés et les solutions à trouver, dans le respect du droit.

Pour ce faire, la Direction générale des Outre-mer et ses équipes sont à disposition pour apporter leur expertise.

Ensuite, il y a aura la réunion en présentiel avec la Première ministre ou le ministre de l’Intérieur et des Outre-mer afin d’en venir au gros morceau : les mesures institutionnelles (les délégations — abandons — de certaines compétences de l’Etat aux collectivités, entre autres).

Tout ceci va durablement marquer l’avenir de la Guadeloupe si chacun y met du sien. Sans arrière-pensée autre que l’intérêt général des Guadeloupéens.

André-Jean VIDAL

La lettre de MM. Darmanin et Carenco à Guy Losbar :

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