L’extraordinaire épopée de la musique latino à New York, qui a porté les revendications identitaires sur des rythmes endiablés.
Des gangs du « barrio », le Spanish Harlem, au succès planétaire de la salsa, et de West Side Story au remake de Spielberg, bientôt à l’affiche, la musique latino à New York a porté les revendications identitaires sur des rythmes endiablés.
Quand, en 1961, West Side Story déferle sur les écrans après avoir conquis Broadway, c’est toute la communauté portoricaine de New York, ostracisée et privée de rêve américain, qui accède dans la fièvre à la visibilité. Du Spanish Harlem au Bronx, où sévissent la misère, la drogue et les gangs, la musique et la danse latinos vont alors porter la révolution identitaire, le « barrio » s’embrasant et ondulant aux rythmes afro-caribéens, emmené par « le roi des timbales », Tito Puente.
Tout le monde se rue au mythique Palladium
Bientôt métissés de soul, de jazz et de blues des voisins noirs, qui partagent souffrances et stigmates du racisme, les genres se multiplient : mambo, rumba, cha-cha-cha, merengue, boogaloo… Tous les hispaniques d’Amérique centrale et du Sud rejoignent alors le mouvement, tandis que la foule (et Marlon Brando) se rue dans les clubs, dont le mythique Palladium à l’allure Art déco.
Les revendications politiques émergent bientôt avec les Young Lords, frères d’âmes des Black Panthers, qui mettent le feu aux poubelles du « barrio »pour protester contre son insalubrité.
Musique hybride, la salsa devient un business mondial
À l’aube des années 1970, la vague salsa, musique hybride par excellence, submerge la planète, à travers l’épopée du légendaire label Fania All-Stars et de ses icônes : le tromboniste Willie Colón, le génial percussionniste Ray Barretto, les chanteurs Rubén Blades et Héctor Lavoe ou encore l’impériale diva Celia Cruz.
Sortie du ghetto, la salsa devient un business mondial, avant de décliner et d’essaimer à travers des genres héritiers, dont le reggaeton dans les années 2000.
Musique et droits civiques
Retraçant, au fil de riches archives, souvent méconnues, et de réjouissants entretiens avec artistes et spécialistes, cette histoire « caliente » et celle de ses figures, ce documentaire montre combien ces rythmes envoûtants ont servi d’instruments pour faire valoir les droits civiques d’une immense communauté hispanique dans une Amérique qui les niait.
Par leur créativité, ces talents à l’extraordinaire popularité ont ainsi affirmé une identité culturelle multiple et largement contribué à l’intégration de la diaspora victime de violence sociale, métamorphosant l’orgueilleuse Big Apple en flamboyante Nueva York.
Sur Arte, dimanche 6 août, à 11 heures.