La morgue du CHU de Pointe-à-Pitre voit affluer un nombre croissant de morts. Une activité hors du commun à l’image du taux de contamination à la Covid-19 en Guadeloupe. Les deux conteneurs réfrigérés installés pour prendre le relais étant eux aussi saturés, un troisième conteneur sera mis à disposition prochainement.
Aux couloirs des Urgences engorgés de patients Covid allongés sur les brancards, aux véhicules du Samu, des sapeurs-pompiers et ambulances en file indienne en attendant d’accéder aux Urgences, succède aujourd’hui une autre réalité à laquelle la Guadeloupe doit faire face.
« Le nombre de décès est monté d’un coup la semaine dernière, explique le Dr Tania Foucan, médecin hygiéniste et médecin légiste, vice-présidente de la Commission médicale d’établissement au CHU de Pointe-à-Pitre. Jusqu’au jeudi 12 août, nous avions deux à trois morts Covid par jour. Depuis vendredi, le nombre de décès est monté de manière exponentielle. »
Une combinaison explosive
C’est l’affligeante conséquence d’une situation épidémique préoccupante qu’enregistre la Guadeloupe. Tous les indicateurs sont au rouge écarlate. Les transports Covid du Samu et des sapeurs-pompiers s’enchaînent, les médecins de ville sont pris d’assaut, les laboratoires sont submergés par le volume de tests à analyser, le système hospitalier est saturé… Et pourtant. La courbe des contaminations à la Covid-19 n’en finit pas de grimper en flèche. Une combinaison explosive qui emporte de nombreuses vies sur son passage.
« Malgré le faible taux de vaccination en Guadeloupe, on ne s’attendait pas à voir de tels niveaux de contaminations. Mais, il y a aussi de la colère. On a beau avoir martelé que les gestes barrières étaient extrêmement importants, ils n’ont pas été respectés dans plein de situations et c’est dommage. Il faut absolument que chacun respecte les gestes barrières pour que le niveau de contamination redescende. »
Une épreuve pour les soignants
En attendant, la morgue du CHU de Pointe-à-Pitre continuera de pousser les murs. Des hommes et des femmes, en première ligne depuis mars 2020, continueront de s’atteler à la tâche quotidiennement avec des moyens matériels qui ne sont pas extensibles, mais qu’on parvient malgré tout à augmenter. Des hommes et des femmes assisteront, impuissants, à cette hécatombe. Et pourtant.
« Cette augmentation du nombre de décès impacte notre quotidien à la morgue, poursuit le Dr Foucan. Nous avons dû prendre des renforts pour que les agents du service mortuaire puissent rendre les corps aux familles rapidement pour les inhumations. Ceci, en continuant d’assurer l’activité médico-légale pour les autopsies hors Covid. »
Même pour des professionnels habitués à côtoyer la mort, ces décès en cascades ne laissent pas insensibles. « Humainement, c’est extrêmement difficile de voir autant de personnes décédées, autant de familles endeuillées, confie Tania Foucan. Ce ne sont pas des choses qu’on peut raconter en rentrant chez soi : ce sont des moments extrêmement difficiles… Il faut que chacun prenne conscience que la vaccination reste la seule solution à ce jour en plus du respect des gestes barrières. »
En attendant, le CHU de Pointe-à-Pitre a mis en place une cellule d’urgences médico-psychologiques, en soutien aux psychologues du travail.
Cécilia Larney