Fanon passe en ce moment au cinéma, allez le voir !
Le film Fanon, Jean-Claude Barny, son réalisateur, dit qu’il l’a porté pendant dix ans. Tandis qu’il tournait d’autres longs métrages, le Guadeloupéen n’a jamais oublié la lecture de Peau noire et masque blanc et des Damnés de la terre, lus à la bibliothèque quand il avait une dizaine d’années. Ecrits par un psychiatre martiniquais, médecin chef à Blida en Algérie, pendant la guerre d’indépendance.
Pour le réaliser, il a fait la tournée des bailleurs de fonds, avec Sébastien Onomo, son producteur. Pas simple, chaque fois une sorte de pèlerinage pour convaincre.
A sa sortie en salles le 2 avril, Fanon a fait 23 800 entrées en première semaine. Dans 70 salles françaises. Seulement.
Il y a, en France, 2 184 cinémas, 5 241 salles. Fanon passe aujourd’hui, après que des voix se soient élevées dans 107 salles… seulement. Et à l’Assemblée nationale, grâce à Marcellin Nadeau, député martiniquais, et Elsa Faucillon, députée des Hauts de Seine.
Certaines salles, dont MK2, ont refusé de le diffuser. MK2 c’est huit salles à Paris positionnées dans des sites stratégiques. Le film est daté, paraît-il. Pas en phase avec les centres d’intérêts du public. Et il y a trop de musique. Prétextes !
Amel Lacombe, distributrice du film, s’est fâchée : « Aucune salle d’art et essai de Paris n’en veut ! » Pourtant, l’avant-première à UGC Les Halles, le 27 mars, en plein cœur de la capitale, a fait salle comble.
Jean-Claude Barny y croit : « C’est un combat, nous dit-il. Le cinéma est un lieu où règne le clientélisme, avec des cheftaines… Et là, je sens qu’on a bousculé les lignes, on a brisé la discrimination systémique. Le nombre de spectateurs est déjà plus important que ce que l’on imaginait. Il y a beaucoup de gens qui en entendent parler et qui veulent le voir. On a bousculé les lignes ! »
Ce qui marche, nous dit-on, ce sont les comédies franchouillardes ou américaines. Or…
Fanon, ce n’est pas une comédie. C’est un drame, celui de la colonisation française. Sujet qui semble porteur sur les ondes des radios à longueur d’émission. Mais, les radios et l’utilisation qu’en font les politiques pour flatter un public ciblé, venu du Maghreb ou d’Afrique, ont leur limite.
Les mots et la propagande faciles ne remplacent pas le soutien qu’on voudrait affirmé à un grand film français, Fanon, qui a le courage de dénoncer une période noire de l’histoire de France.
Le film passe en ce moment en Guadeloupe : allez le voir !