Chlrodécone. « La vie de la population antillaise asservie à l’intérêt de grandes familles », accuse Me Lèguevaques

Le Tribunal administratif de Paris a décidé, le 24 juin, de refuser l’indemnisation de 1 300 victimes de la chlordécone tout en reconnaissant la faute de l’Etat. Me Christophe Lèguevaques, avocat des parties civiles, se veut néanmoins optimiste pour la suite du combat judiciaire.

La décision du TA incriminant l’Etat dans le dossier chlordécone vous satisfait-elle ?

C’est une décision qui comprend deux parties.

La première partie reconnaît la responsabilité de l’Etat pour « négligence fautive ». Cela constitue une avancée significative qui peut avoir de l’importance dans d’autres dossiers, notamment le dossier pénal. C’est la première fois qu’une juridiction française reconnaît la faute de l’Etat dans le dossier du chlordecone. 

Mais la deuxième partie est insuffisante car le tribunal a refusé d’indemniser les victimes. C’est d’autant plus incompréhensible que, dans le dossier de l ‘amiante, la Cour de cassation a dit qu’il suffit de démontrer l’exposition à ce produit dangereux pour pouvoir réclamer l’indemnisation du préjudice moral d’anxiété.

Dans le dossier Levothyrox, nous avions connu le même problème mais nous avons finalement gagné devant la cour d’appel et la Cour de cassation.

Je suis confiant pour la suite, le combat continue.

Le préjudice moral est-il patent et indemnisable ? Sur quels fondements ?

En reconnaissant que l’état a commis des négligences fautives lors de la délivrance des autorisations temporaires d’utilisation du chlordecone, le tribunal administratif révèle un fait nouveau dont les juges d’instruction devront tenir compte dans le dossier pénal. Cela pourrait permettre de contester la prescription.

J’espère en discuter avec les avocats qui suivent ce dossier depuis le début, du moins ceux qui ne sont pas jaloux de cette avancée.

Trente ans après la première plainte on a le sentiment que rien n’a bougé

30 ans après c’est long, trop long. Cela dépasse la durée de la procédure amiante (17 ans) et cela peut conduire la CEDH (Cour européenne des droits de l’homme) à condamner la France en raison de la durée excessive de la procédure. Il faudrait que dans ces dossiers politico sanitaires, le gouvernement mette à disposition des moyens importants comme dans le dossier des attentats du 13 novembre.

C’est quand même la vie de toute la population antillaise qui a été asservie au culte de l’argent roi et de l’intérêt des grandes familles. La République doit protéger tous ses enfants et sanctionner férocement tous les profiteurs.

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