Que se passe-t-il dans les hauteurs de la Sarde, à Capesterre Belle-Eau ? Damien Frair, planteur de bananiers, est avec une dizaine d’autres cultivateurs sous un manguier, vendredi en fin de matinée.
« Depuis que Fiona est passée, nous ne pouvons plus travailler normalement, aller dans nos exploitations, évacuer vers le centre d’empotage les conteneurs de bananes. Nous perdons 40 à 60 tonnes chaque semaine… »
Damien Frair :
Il désigne, plus loin, un trou dans la route, une crevasse d’une vingtaine de mètres de large avec, de part et d’autre d’une levée de terre, ce qui reste de la route, un ravin d’une centaine de mètres où toute la route et toute la terre ont dégringolé, d’un coup, sous l’effet des eaux.
Guy Losbar, président du Conseil départemental, conduit là par Jean-Philippe Courtois, maire de Capesterre Belle-Eau, regarde le trou. Sur le côté gauche, une sorte de petit pont d’un mètre de large, du tuff, permet le passage d’un homme à la fois.
Un technicien de SOGETRAS, interrogé, donne l’assurance que d’ici une semaine, la route sera rétablie à cet endroit-là. Les élus regardent le technicien et le ravin. Ils veulent bien le croire mais, les porte-conteneurs de bananes, camion et conteneur, pourront-ils passer là. Vingt tonnes tout de même, ça pèse sur une route fragilisée.
La petite troupe, élus, administratifs du Département, techniciens, journalistes empruntent le petit pont. Il y a quelques rires coincés. De l’autre côté, quelques pick-up et voitures attendent. Ce sont les véhicules qui étaient dans les hangars des exploitations au moment du passage de la tempête tropicale. Ils servent à faire le va-et-vient entre les exploitations et le trou…
Olivier Behary, la trentaine, nous conduit. Sur la gauche de la route, à deux cents mètres, il y a une série de bâtiments près d’une falaise, falaise dont une grande partie s’est écroulée. On s’étonne et on conjoncture sur la destinée de bâtiments au bord du ravin… « C’est ma porcherie… », dit-il d’un air triste.
C’est là que ce jeune éleveur abrite 600 porcs actuellement, un millier habituellement. Pour lui, c’est un calvaire depuis le passage de Fiona et la coupure de la route. Heureusement, il a deux silos qui étaient pleins de nourriture pour les animaux. Là, il épuise ses dernières réserves, il faudra transporter les sacs d’aliments à dos d’homme sur une partie de la route… en attendant que celle-ci soit réparée.
Le pire pour lui, c’est d’avoir près d’une centaine de porcs prêts à l’abattage et de ne pouvoir les évacuer vers l’abattoir. Donc, il les nourrit, ce qui lui fait non seulement un manque de rentrée d’argent mais une dépense supplémentaire.
Olivier Behary :
La route n’est plus praticable, les voitures sont stationnées au bord de la route, la troupe s’avance et là encore, une partie de la route s’est effondrée dans le ravin. Il reste une voie pas très solide. Il semble qu’elle soit réparable. Le technicien de la SOGETRAS explique que la côté gauche de la route sera renforcée et appuyé sur une levée de terre… Les fentes dans la route à plusieurs endroits ne donnent pas confiance. Vivement que les hommes de l’art interviennent.
Un désastre économique
Les planteurs de bananiers, sur cette zone là — mais Damien Frair nous dit qu’il y a plusieurs zones qui ont les mêmes problèmes de voies coupées, voies goudronnées mais aussi voies entre les exploitations ou pour traverser les exploitations — ne peuvent évacuer leurs bananes faute d’accès pour les porte-conteneurs. La largeur de ceux-ci, leur poids rend les choses pas aisées.
L’idée est émise par un planteur d’utiliser les anciennes camionnettes découvertes pour transporter les bananes jusqu’à une zone où elles pourraient être mises en conteneurs. Mais, pour cela, il faudrait installer des hangars provisoires pour des ateliers de triage, de lavage, de mise en boite… Un travail de Titan.
Une porcherie modèle en danger
Une visite est décidée chez Olivier Béhary, le porcher : ses installations sont propres, malgré les difficultés d’évacuer du lisier qu’habituellement un spécialiste vient embarquer. La merde et la pisse de porc, ça sent. Mais ça peut devenir difficile à supporter quand on ne peut pas l’évacuer. Question sanitaire, ça peut devenir limite.
Et Olivier Béhary a une réputation à soutenir. Là, il a une centaine de porcs à transporter à l’abattoir, mais il ne peut pas le faire. Ça fait trois semaines que ça dure. Il a hâte que la route soit rétablie. Les femelles ont mis bas. Le petits tètent, les mâles grognent dans leurs cages, les petits porcs à l’engraissement prennent du poids, ceux qui sont à maturité attendent le couteau du boucher… Quand la route sera rétablie.
En attendant l’éleveur courageux d-fait avec les moyens du bord…
Une coalition Région, Département Etat
pour venir en aide aux agriculteurs-éleveurs
Guy Losbar veut rassurer les planteurs de bananiers et l’éleveur. Pas simple devant un tel désastre. En fait, il en appelle à toutes les bonnes volontés, Etat, Région, pour venir avec le Département au secours des sinistrés de l’agriculture. Seule une solidarité conjointe permettra de passer le cap difficile.