Dans le cadre de la surveillance renforcée des vaccins contre le Covid-19, des représentants des associations de patients et de professionnels de santé ont été réunis pour un point de situation sur les troubles menstruels déclarés après la vaccination. Une publication de l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM).
Ces échanges ont permis d’identifier plusieurs pistes d’actions afin de renforcer l’information des femmes comme celle des professionnels de santé concernés. L’importance de la déclaration de ces troubles, quand ils persistent, a également été réaffirmée.
Les troubles menstruels déclarés après la vaccination par un vaccin à ARNm font l’objet d’une surveillance attentive au niveau national (ANSM/CRPV) et européen (EMA) depuis leur détection. L’ANSM établi fin 2021, en lien avec le Collège national des gynécologues et obstétriciens français (CNGOF) et les CRPV, des conduites à tenir à destination des femmes et des professionnels de santé. Ces conduites à tenir sont rappelées ci-dessous.
Conduite à tenir pour les femmes concernées
Les troubles du cycle (aussi appelés anomalies du cycle) sont des irrégularités du cycle menstruel. Ils peuvent affecter à la fois la fréquence et l’intensité des saignements : les règles peuvent être irrégulières, douloureuses (dysménorrhée), trop abondantes ou trop prolongées (ménorragie) ou absentes (aménorrhée). Il est également possible que des saignements surviennent entre deux cycles (métrorragie).
Si vous ressentez des effets inhabituels, des douleurs anormales, que votre cycle menstruel est bouleversé, et que ces troubles persistent, l’ANSM invite :
- à consulter son médecin. Il pourra écouter et, si nécessaire, procéder à des examens complémentaires.
- à déclarer sur le portail du ministère chargé de la Santé : signalement.social-sante.gouv.fr ou se rapprocher d’un professionnel de santé.
Conduite à tenir pour les professionnels de santé
Devant tout symptôme de troubles menstruels évoqué par une patiente et selon votre connaissance de son historique médical :
- Si la patiente prend un traitement hormonal : vérifiez qu’il n’y a pas eu de mauvaise observance ou des vomissements qui pourraient être à l’origine d’une interruption de la prise du traitement ;
- Si la patiente ne prend pas de traitement hormonal ou s’il n’y pas eu d’interruption de traitement :
- vérifiez qu’il ne s’agit pas d’une symptomatologie aigüe ;
- vérifiez l’absence de grossesse (retard de règles, saignements itératifs) ;
- gardez en tête la possibilité que la patiente développe une maladie gynécologique (syndrome des ovaires polykystiques, hyperprolactinémie, adénomyose, etc.) de manière concomitante à la vaccination. Si les symptômes persistent le mois suivant, il est nécessaire de lancer des investigations et d’envisager une telle pathologie sous-jacente.
- Si vous observez des effets indésirables graves ou inattendus : déclarez sur le portail du ministère chargé de la Santé : signalement.social-sante.gouv.fr.
Dans le contexte de la réévaluation européenne en cours et des témoignages de patientes, nous avons réuni en visioconférence nos parties prenantes pour échanger sur ces troubles menstruels : France Assos Santé, Endomind, EndoFrance, le collectif Ouestmoncycle, des centres régionaux de pharmacovigilance (CRPV), la Fédération nationale des collèges de gynécologie médicale (FNCGM), le collège national des enseignants de Gynécologie médicale (CNEGM), le Conseil national de l’Ordre des sages-femmes (CNOSF) et le Collège de la médecine générale (CMG).
Au cours de cette réunion, les associations de patientes et le collectif ont ainsi pu relayer des témoignages de femmes décrivant des anomalies du cycle menstruel, entrainant parfois une répercussion sévère sur leur qualité de vie. Les troubles menstruels les plus fréquemment décrits dans ces témoignages sont :
- Des saignements anormalement longs pendant les règles ou en dehors de règles (ménorragie ou ménométrorragies), ou au contraire une absence de règles pendant plusieurs mois (aménorhée) ;
- Des douleurs pelviennes importantes, ou abdominales ;
- Chez les femmes atteintes d’endométriose : une réactivation de leurs symptômes douloureux alors que la maladie était bien contrôlée jusqu’ici ;
- Chez les femmes ménopausées, des saignements anormaux ;
- Dans certains cas, les saignements anormaux en quantité et en durée ont conduit à des hystérectomies.
Les professionnels de santé ont expliqué qu’ils voyaient en pratique peu de cas graves de troubles menstruels et qu’il était difficile de les analyser car ils étaient souvent peu documentés. Dans leur expérience, la majorité des troubles menstruels observés étaient généralement non graves, de courte durée et spontanément résolutifs.
Les CRPV ont ensuite présenté les données de pharmacovigilance des vaccins contre le Covid-19.
Au 28 avril 2022, les CRPV ont analysé 9 381 déclarations de troubles du cycle rapportées avec le vaccin Comirnaty, et 1 557 avec le vaccin Spikevax. La majorité de ces déclarations ont été réalisées par les patientes directement.
A cette date, 58 millions de personnes, tous sexes confondus, avaient été vaccinées avec le vaccin Comirnaty et 12 millions de personnes avec le vaccin Spikevax.
Ces évènements indésirables restent le plus souvent « non graves » et se manifestent généralement de deux façons : par des saignements anormaux (métrorragies, ménorragies), et par des retards de règles ou aménorrhées. Ces cas peuvent survenir aussi bien après la première injection qu’après la deuxième ou la dose de rappel.
A ce stade, l’analyse de ces événements chez les femmes atteintes d’endométriose n’a pas permis de mettre en évidence une aggravation de la symptomatologie existante ou le déclenchement d’une endométriose non connue jusqu’à présent.
En parallèle, le comité de pharmacovigilance (PRAC) de l’EMA réévalue actuellement le lien entre ces troubles menstruels et les vaccins Spikevax et Comirnaty. Dans ses premières conclusions rendues au mois de juin 2022, le PRAC a conclu que les preuves étaient insuffisantes à ce stade pour établir le lien entre les vaccins ARN et les cas d’absence de menstruation. Néanmoins, le comité poursuivra la surveillance de cet effet indésirable. Concernant les saignements menstruels abondants, le comité a conclu à la nécessité de poursuivre l’évaluation.
A ce jour, les données disponibles ne permettent pas de décrire le mécanisme de survenue de ces troubles du cycle menstruel. Plusieurs hypothèses sont néanmoins émises :
La réactogénicité (fièvre, maux de tête, nausées, etc.) provoquée par la vaccination. Celle-ci pourrait en effet, comme lors d’une infection, influer sur les hormones impliquées dans le cycle menstruel ;
Un stress ou une anxiété importante, engendré par l’acte de vaccination et/ou le contexte de pandémie. En effet, stress et anxiété sont des facteurs connus de perturbation de l’axe hypothalamo-hypophyso-ovarien qui régule le bon déroulement du cycle menstruel ;
Facteurs autres : maladie gynécologique sous-jacente, grossesse, traitement contraceptif, etc.
L’ANSM continue ses actions avec les parties prenantes afin de faciliter le recueil des effets indésirables graves et renforcer l’information à destination des femmes concernées et des professionnels de santé.
Elle invite les professionnels de santé à déclarer les troubles menstruels graves post-vaccination, conformément à leur obligation légale de signalement des effets indésirables s’agissant des médecins, dentistes, sages-femmes et des pharmaciens.
Elle encourage également les autres professionnels de santé et les femmes concernées à procéder directement à une déclaration via le portail des signalements de pharmacovigilance : signalement.social-sante.gouv.fr.
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