Politique. Outre-mer, l’ombre de Mélenchon a plané sur les urnes et Le Pen a raflé une mise de papier

Ce n’est pas un vote pour Marine Le Pen mais contre Emmanuel Macron qu’ont manifesté, lors de ce second tour de la présidentielle Guadeloupéens, Martiniquais, Guyanais, Réunionnais… Du moins, les observateurs attentifs ne veut pas le croire.

La détestation d’Emmanuel Macron qui est tangible, manifestée dans ces votes, est liée à sa politique publique permanente du « ça passe ou ça casse. » Un peu sur les hauteurs : je sais pour vous…

Et ça a beaucoup cassé, d’où les gilets jaunes dans l’Hexagone. Relayés en Guadeloupe tous les samedis par la télévision publique avec une rare complaisance. Les quelques timides manifestations locales, souvenez-vous, ont rassemblé quelques dizaines de Guadeloupéens. Mais le germe était là.

Il y a eu surtout le travail de sape mené, localement, par les syndicats, les mouvements nationalistes, tout le temps de la crise sanitaire. Renforcée par la vaccination obligatoire des soignants. Ce travail de sape a été le même partout Outre-mer. Moins dans l’Hexagone où la vaccination est mieux passée.

Nous ne dirons pas que tous ceux qui ont refusé le vaccin ont voté Le Pen, mais certainement 50 à 70% d’entre eux. Les autres ont voté blanc, ont mis deux bulletins ou ont mis le bulletin d’Emmanuel Macron déchiré pour être sûr que ce serait… n vote nul. Ou alors ils sont allés défiler contre la vaccination en communes. 

Qu’ont fait les mélenchonistes du premier tour ? Ils sont allés se balader… ou ont voté Le Pen, simplement pour casser le système Macron, le système tout simplement. 

Ensuite, il y a eu les posts sur les réseaux sociaux : c’était nettement des prises de position contre Emmanuel Macron, pour Jean-Luc Mélenchon et, à la disparition de celui-ci, en faveur de Marine Le Pen. On a ainsi pu lire des Vive Marine ! écrits sans honte par des nationalistes patentés.

Les arguments de ces personnes ? Macron c’est la dictature, Macron c’est moins de libertés… Macron c’est la précarité… Choses dites par des hommes et des femmes de chez nous qui sont très souvent fonctionnaires, donc qui perçoivent un salaire fixe, 40% de plus que leurs homologues de l’Hexagone, qui ont la garantie de l’emploi. Qui ne connaissent pas la précarité… et qui ne connaissent pas ceux qui souffrent dans certains quartiers. 

Choses dites par des Guadeloupéens qui peuvent s’exprimer en toute liberté, y compris dans la rue sans trop de risques… il y a des pays où il y a des dictatures, de droite comme de gauche, où l’on tire sur les foules. A Cuba, une seule manifestation, en juillet dernier, pour la liberté de penser, contre la précarité, a mis en prison des centaines de Cubains. Certains en sont morts.

Des élus qui doivent se bouger

Quels enseignements doivent en tirer les élus qui ont parrainé le candidat Macron, qui l’ont ensuite soutenu du bout des lèvres — cherchez la logique —, puis en catastrophe, cette semaine, quand ils ont enfin compris que l’heure était grave, à coups de meetings sans préparation ?

D’abord qu’ils devraient se poser de temps en temps pour analyser la situation du pays. Ils ne le font pas assez. Cela fait des semaines que les éditorialistes, ceux qui réfléchissent un peu, ont dit, écrit qu’on allait avoir une déferlante Le Pen. Aucune réaction. 

Ensuite, ils devraient passer de la parole aux actes… et pour cela motiver leurs administrations pour que leurs décisions de politiques publiques soient effectivement appliquées sur le terrain. Ce qui n’est pas toujours fait dans les temps. En Guadeloupe, les administrations sont passives et plus enclines à se perpétuer qu’à faire preuve d’ambition pour le pays. 

Si les élus détestent Macron mais veulent jouer le jeu de Macron pour avoir l’oreille de l’administration à Paris et ici, il va falloir en assumer les conséquences aux législatives.

Le peuple a voté Marine le Pen à 70%… Dans certaines communes, des maires qui sont pourtant actifs, ont vu leurs concitoyens voter massivement Le Pen. Aux Abymes, le mélenchoniste d’occasion — il n’a voulu ni de la peste ni du choléra — Eric Jalton a pris 12 000 suffrages lepénistes dans les dents. Lui qui n’a jamais remporté l’élection avec plus de 11 000 suffrages ! Et pourtant, c’est un maire actif, apprécié. Il a d’ailleurs admis que le vote est libre et qu’il faudrait, quoiqu’il advienne, en assumer les conséquences. Depuis, il doit souffler un peu… quoiqu’il en dise.

Les conséquences de ce vote Le Pen seront certainement moindre localement puisqu’il n’y a pas de machine de guerre politique lepéniste en Guadeloupe. Reste le vote mélenchoniste que certains peuvent capitaliser.

La France Insoumise va tenter le coup et présenter Nadège Montout, infirmière de profession, militante syndicale et citoyenne engagée (notamment infirmière sapeur-pompier volontaire). Le PS la soutiendra.

Dans la première circonscription, si le poulain d’Eric Jalton, qui a appelé à voter Mélenchon au premier tour, se revendique lui aussi de Mélenchon contre Olivier Serva qui a joué longtemps au député du président avant de s’en éloigner au gré de l’actualité de la rue… alors, Alix Nabajoth peut avoir sa chance. 

Dans cette élection-ci, il y a fort à parier qu’on aura oublié le pis aller qu’a représenté le vote Le Pen pour se recentrer sur les fondamentaux. Avec peut-être, à la clé, quelques surprises.

André-Jean VIDAL

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