Samedi 26 mars, les élus guyanais se sont réunis en congrès sous la présidence de Gabriel Serville. En débat, le statut.
Dans un courrier adressé au Premier ministre, le 27 février 2020, Rodolphe Alexandre, alors président de la CTG, souhaitait que le statut de la Guyane tel qu’il devait, selon lui, être revu, « s’inscrive dans l’article 73 d’un point de vue régalien, mais s’oriente vers l’article 74, sans pour autant perdre notre substance financière. ».
Gabriel Serville, qui lui a succédé, a repris la même idée…
En fait il s’agit, dans la tête des élus guyanais, d’un statut sui generis, propre à la Guyane, du jamais vu ailleurs sur le territoire national : la liberté de faire ce que les élus guyanais pensent bon pour le pays, en récupérant des compétences de l’Etat, tout en continuant de percevoir des aides de celui-ci dans leurs nouveaux domaines de compétences, ceci en toute liberté quant à leur utilisation.
Il s’agit, ici, non d’un cynisme qui ne dit pas son nom mais d’une réalité : la Guyane est un territoire à part dans l’ensemble français parce qu’il est un territoire amazonien, un territoire d’Amérique du Sud. Avec des spécificités indéniables et l’impression que les lois de la République ne sont pas toujours bien adaptées, ce qui expliquerait l’impression — n’est-ce qu’une impression ? — de retard de développement perceptible en parcourant la Guyane.
Que dit l’article 73, qu’ont choisi certaines régions d’Outre-mer ?
L’article 73 reconnaît aux départements et régions d’outre-mer le droit d’adapter les lois et règlements en vigueur à leurs caractéristiques particulières et de définir des règles normatives dans des matières relevant du domaine de la loi.
Cet article 73 encadre différentes collectivités aux formes institutionnelles variées : les deux Département-Région d’Outre-mer que sont la Guadeloupe et La Réunion, les deux collectivités uniques que sont la Guyane et la Martinique, et un département à assemblée délibérante unique, Mayotte.
En Guyane, depuis la consultation du 24 janvier 2010, il y a une collectivité unique, mise en place par la loi du 27 juillet 2011 qui a créé la collectivité territoriale de Guyane (CTG), changement de statut devenu effectif seulement en mars 2015.
L’article 74 concerne diverses réalités statutaires, qui sont appelées Collectivités d’Outre-Mer (COM), à l’image de Wallis-et-Futuna, territoire administré par l’Etat, mais dont la monarchie locale est reconnue, ou encore Saint-Barthélemy et Saint-Martin en COM dotées d’autonomie. Saint-Pierre-et-Miquelon par contre est une COM qui n’est pas dotée d’autonomie. Il y a aussi la Polynésie française, COM avec une autonomie large puisque reconnue comme Pays d’Outre-mer.
L’article 74 est ainsi rédigé : « Les collectivités d’outre-mer régies par le présent article ont un statut qui tient compte des intérêts propres de chacune d’elles au sein de la République.
Ce statut est défini par une loi organique, adoptée après avis de l’assemblée délibérante, qui fixe :
- les conditions dans lesquelles les lois et règlements y sont applicables ;
- les compétences de cette collectivité ; sous réserve de celles déjà exercées par elle, le transfert de compétences de l’Etat ne peut porter sur les matières énumérées au quatrième alinéa de l’article 73, précisées et complétées, le cas échéant, par la loi organique ;
- les règles d’organisation et de fonctionnement des institutions de la collectivité et le régime électoral de son assemblée délibérante ;
- les conditions dans lesquelles ses institutions sont consultées sur les projets et propositions de loi et les projets d’ordonnance ou de décret comportant des dispositions particulières à la collectivité, ainsi que sur la ratification ou l’approbation d’engagements internationaux conclus dans les matières relevant de sa compétence.
La loi organique peut également déterminer, pour celles de ces collectivités qui sont dotées de l’autonomie, les conditions dans lesquelles :
- le Conseil d’Etat exerce un contrôle juridictionnel spécifique sur certaines catégories d’actes de l’assemblée délibérante intervenant au titre des compétences qu’elle exerce dans le domaine de la loi ;
- l’assemblée délibérante peut modifier une loi promulguée postérieurement à l’entrée en vigueur du statut de la collectivité, lorsque le Conseil constitutionnel, saisi notamment par les autorités de la collectivité, a constaté que la loi était intervenue dans le domaine de compétence de cette collectivité ;
- des mesures justifiées par les nécessités locales peuvent être prises par la collectivité en faveur de sa population, en matière d’accès à l’emploi, de droit d’établissement pour l’exercice d’une activité professionnelle ou de protection du patrimoine foncier ;
- la collectivité peut participer, sous le contrôle de l’Etat, à l’exercice des compétences qu’il conserve, dans le respect des garanties accordées sur l’ensemble du territoire national pour l’exercice des libertés publiques.
Les autres modalités de l’organisation particulière des collectivités relevant du présent article sont définies et modifiées par la loi après consultation de leur assemblée délibérante. »
Gabriel Serville a évoqué ce Congrès des élus, il y a quelques semaines, au micro de nos confrères de Guyane la 1ère : « Nous allons préciser les choses, en disant très clairement que nous considérons que la Guyane doit être clairement identifiée à part entière dans la Constitution française et qu’elle soit dotée d’un vrai statut d’autonomie. »
Les débats se sont tenus hier pour préciser ce cadre et reprendront après les élections présidentielle et législatives…