PAR DIDIER DESTOUCHES*
L’université des Antilles est un indispensable et puissant levier de développement territorial mais pas seulement. Elle est aussi une forte matrice d’épanouissement intellectuel, culturel, et social pour la jeunesse et pour la population.
L’université des Antilles est un établissement public d’enseignement supérieur et de recherche mais également un opérateur économique qui brasse des financements considérables en matière de recherche scientifique.
Pendant quelques années, un sombre ballet de conflits et de rivalités autour du financement mais aussi de son mode de gouvernance a gangréné peu à peu son image prestigieuse auprès de l’opinion publique mais également et surtout la complémentarité (pas seulement symbolique ) entre les deux pôles territoriaux de Guadeloupe et de Martinique.
Vaille que vaille, l’université avait tout de même réussi à effectuer un virage de gouvernance vers l’autonomie des pôles, par l’action du législateur et suite aux débats parfois houleux qu’elle a connu en son sein.
A l’époque, bien que ne faisant pas l’unanimité, ce principe donnait un appel d’air pour un fonctionnement politique plus souple et surtout aboutissait à la mise en place par le législateur de véritables critères de distribution des subsides octroyés par l’Etat (nombre d’étudiants et de personnels notamment).
La présidence de l’illustre gynécologue obstétricien, le professeur Eustaze Janky, a eu le grand mérite de consolider le fonctionnement central comme polaire de l’université grâce à un bel effort de règlementation interne, de toilettage des statuts et d’orthodoxie rigoureuse dans la gestion budgétaire de l’établissement.
De nombreuses situations problématiques telles que le paiement en retard des vacations, l’amélioration du cadre de vie étudiante, le redéploiement des crédits de recherche ont pu être réglées où sont en voie de l’être.
La qualité de cette présidence et de son équipe (et qui n’a pas toujours été un long fleuve tranquille) pose la question de l’avenir de l’institution à l’heure de l’imminente élection d’une nouvelle équipe à la tête de l’université.
La communauté universitaire des Antilles est désormais dans le moment du rassemblement et de la convergence vers le but de développer les projets dont nos deux îles ont besoin et de consolider notre collaboration avec les institutions locales.
L’heure est venue de déployer encore plus notre effort de production, de valorisation et de vulgarisation de travaux scientifiques et surtout de prendre ensemble soin du bien-être et du devenir professionnel de nos étudiants. Notre université doit aussi ouvrir les ailes de son attractivité en investissant dans la mise en place de formations nouvelles et adaptées dans le domaine de la culture, de la mer mais aussi du sport; car ce sont des incontournables de notre présence lumineuse au monde.
La très grande majorité du personnel de l’université des Antilles aspire de son côté à un vivre ensemble et à une vraie concorde politique de ses représentants qui, au-delà de la défense légitime des intérêts de leur pôle respectif, doivent avant tout apprendre à penser Antilles chaque fois qu’ils siègent aux différents conseils centraux.
C’est la clé de la sortie de cette culture du conflit qui n’a que trop démoli une partie de ce qui se construisait à grand peine depuis des décennies.
La communauté des enseignants chercheurs aspire à de la confiance mutuelle et pas à de la défiance réciproque. Comme beaucoup d’autres acteurs publics, nous universitaires, sommes conscients de ce que la société attend de nous. Elle attend de l’exemplarité et de l’excellence à tous niveaux. Une excellence qui de par son rôle est dans l’ADN même de l’université.
Aujourd’hui nous mesurons l’incroyable parcours accompli par nos pères et nos pairs dans l’inlassable construction d’un puissant phare de connaissance, de réflexions, de progrès et de formation qui illumine toute la Caraïbe et bien au-delà. Nos formations en sciences, en ingénierie, en langues appliquées, en économie et en droit sont reconnues sur le plan international tant nous accueillons chaque année de plus en plus d’étudiants de la Caraïbe, d’Europe, et des Amériques.
Notre recherche en mathématiques, en droit des collectivités, en économie du travail, en physique de l’air et en biochimie est foisonnante et récompensée par de nombreux prix et nombreuses publications nationales et internationales.
Cette dynamique doit être multipliée par un effort constant dans l’amélioration de la conduite des projets et des dossiers de recherche. La contribution des collectivités locales en ce domaine doit être renforcée et mieux accompagnée.
En réalisant et maintenant l’unité des territoires de l’université, le prochain président ou la prochaine présidente de l’université pourra impulser ce salutaire effort de construction d’un pôle mondial de la recherche d’excellence dans la zone Amérique.
Profitons de tous nos atouts et osons le langage de la fraternité et de la confiance dans le cadre d’une alliance que nous avons voulue dès les origines et que nous avons fait évoluer pour qu’elle dure. Et que l’oeuvre commune du progrès, du savoir et des consciences soit accomplie dans la paix et la concorde entre les deux pôles; tout en étant le flambeau permanent que nous sommes voués à brandir ensemble.
*Maître de conférence à l’université des Antilles, ancien vice-président du Pôle Guadeloupe et ancien vice-doyen de la faculté des sciences juridiques et politiques.