Ils sont partis. Un peu (beaucoup) contraints, à bord d’un ATR 72 d’Air Caraïbes, ce mercredi 9 décembre. Ce sont des Haïtiens en situation irrégulière puisqu’il ne détiennent pas de titre de séjour. Mais, ils étaient en Guadeloupe depuis longtemps, étaient en attente de papiers, avaient demandé le droit d’asile… L’association Tèt Kolé, collectif des associations haïtiennes de Guadeloupe, et des avocats ont enclenché les grands moyens : tribunal administratif, Cour européenne des droits de l’Homme, Conseil d’Etat. En vain. Elie Domota a une nouvelle fois interpellé le préfet Alexandre Rochatte qui a signé l’arrêté d’expulsion. Le préfet qui, par le biais d’une communiqué, a souhaité, ici, donner quelques précisions.
« Ce mercredi 9 décembre 2020, vos services ont procédé à l’expulsion de 8 ressortissants haïtiens. Devant un tel acharnement judiciaire et administratif, on aurait pu croire qu’il s’agissait de 8 délinquants notoires. En vérité, les documents et nos informations montrent qu’il s’agit de deux demandeurs d’asile, d’un jeune ayant fait toute sa scolarité (collège, lycée, Bac) en Guadeloupe depuis l’âge de 15 ans et de plusieurs autres personnes ayant des attaches familiales en Guadeloupe, vivant en famille et dans la tranquillité. » Elie Domota prend son ton accusatoire pour s’adresser au préfet Alexandre Rochatte.
« L’UGTG vous demande de lui adresser une copie de tous les documents relatifs aux coûts… »
Elie Domota, secrétaire général de l’UGTG
Il poursuit : « Pour évacuer ces 8 personnes, vous avez affrété un avion ATR de 72 places de la Compagnie Air Caraïbes et mobilisé plusieurs dizaines de fonctionnaires (police, justice, centre de rétention administrative, etc…). »
« Dans ces conditions, en application des articles L 300-1 et suivant du Code des Relations entre le Public et l’Administration, et vous rappelant que le droit d’obtenir communication des documents administratifs n’est subordonné à aucune condition tenant à un intérêt procédural à agir au contentieux (CE, 13 février 2019, n° 420467, Publié), l’UGTG vous demande de lui adresser une copie de tous les documents relatifs aux coûts financiers engendrés par une telle opération :
– Coût de l’affrètement (équipage compris) de l’ATR 72
– Nombre de fonctionnaires mobilisés (justice, police, CRA, escorte, …)
– Coût des séjours au centre de rétention
– Et tout autre document nous permettant d’évaluer ce coût financier. »
Il est fort possible (probable) qu’Elie Domota attende longtemps ces documents…
« A aucun moment cet éloignement n’a concerné des femmes et des enfants… »
La préfecture
« Ce mercredi 9 décembre, 9 ressortissants haïtiens en situation irrégulière, tous des hommes célibataires et sans charge de famille, ont été reconduits », affirme la préfecture.
Elle rappelle « qu’à aucun moment cet éloignement n’a concerné des femmes et des enfants. » C’est pourtant la rumeur qui a circulé tout le week-end.
« L’opération, dit encore la préfecture, s’est déroulée sous le contrôle étroit du juge, dans le strict respect des règles de droits et procédures.
Ainsi, par décision du mardi 8 décembre, le tribunal administratif de Basse-Terre a reconnu la légalité de ce vol, tout comme la Cour Européenne des droits de l’Homme, saisie par les intéressés, par décision du mercredi 9 décembre 2020. De plus, toutes les précautions ont été prises pour garantir la sécurité sanitaire des personnes éloignées, en lien avec les autorités haïtiennes, qui ont autorisé le vol. »
« Par ailleurs, précise la préfecture, préalablement à l’éloignement, les services préfectoraux ont procédé à un examen individuel de situation, notamment au regard de la vie privée et familiale, du droit d’asile. L’assistance d’un avocat et d’un interprète a été systématiquement proposée ainsi que la possibilité de communiquer avec le consulat général d’Haïti ou tout autre personne. Enfin, pour ceux qui le souhaitaient, la possibilité de solliciter une aide au retour auprès de Office Français de l’immigration et de l’intégration (OFII) a été proposée. »