Réunion avec les filières viande : Région et Département veulent faire avancer le débat

Il s’agit pour les élus d’obtenir un sursaut de la filière viande.

Les deux présidents de collectivités majeures, Ary Chalus et Guy Losbar, ont souhaité rencontrer rapidement les représentants des filières viande de l’archipel.
Ceux-ci se sont réunis à la chambre d’agriculture mardi 27 juillet.
Le grand regret des filières c’est de ne pas pouvoir alimenter le marché local. 
La filière volaille couvre 4% du marché, la bovine 24%, la filière porcine, la plus prometteuse, 28% et la caprine est confidentielle.

Cette première réunion — car les deux présidents ont promis de revenir — était consacrée à la filière bovine. Le souhait de faire avancer le débat est évident.

« On importe 15 000 tonnes
de viande congelée chaque année »

Franck Desalme, présdient de l’iguavie

Patrick Sellin, président de la Chambre d’agriculture, flanqué des deux présidents et de leurs vice-présidents en charge du secteur agriculture, a souhaité que chacun s’exprime afin que la problématique soit définie.

Après un court résumé de leurs préoccupations, Guy Losbard de voir les professions — producteurs, abattoirs, bouchers-charcutiers — animées d’une même volonté : produire et consommer local, Ary Chalus, de faire en sorte que les producteurs aient des produits de qualité, les abattoirs qu’ils aient du matériel efficient, les bouchers-charcutiers qu’ils soient bien formés ainsi que la relève, la parole était donnée aux filières.

Franck Desalme, président de l’Iguavie, faisait le constat d’une importation effrénée de viandes congelées, plus de 15 000 tonnes chaque année, ce qui prouve qu’il y a un véritable marché pour une viande de qualité, celle qui serait produite ici et vendue fraîche. Pour ceux qui douteraient de l’écoulement de la viande locale, il citait les importations par des professionnels, dont KFC qui importe, chaque année, 1 500 tonnes de viande de poulet !

Franck Desalme :


Firmin Lodin, président de Cap’Viande soulignait que la volonté des producteurs est là mais qu’il faut soutenir les filières et surtout, fédérer les volontés, harmoniser les filières. « La volonté est là », répétait-il.

Firmin Lodin :



Madelaine Pagesy, gérante de la SICA Peba, commerce de gros de viandes de boucherie, soulignait les difficultés en basse-Terre de certains éleveurs qui sont dans des zones chlordéconées. Mais, elle se voulait positive en soulignant une réelle volonté de fédérer constatée dans les discussions avec les producteurs. 

« Le produit doit être
qualitatif et régulier »

René lada, président du syndicat
des bouchers-charcutiers


René Lada préside le Syndicat des bouchers charcutiers
il s’agit pour ce professionnel, de répondre aux besoins de la population qui souhaite une viande saine, fraîche, goûteuse dans son assiette. E Les bouchers, disait-il, ont un souhait de régularité dans leur approvisionnement en viande locale. Ils veulent une viande conforme aux normes, et regrette qu’on lui amène des carcasses qui sont difficilement exploitables. »
Il résumait son raisonnement : « Le produit doit être qualitatif et régulier. »
Trois difficultés à son gré : l’équipement des boucheries, la formation, la création de nouvelles boucheries-charcuteries. « Nous avons des jeunes formés, mais ils finissent au rayon boucherie des grandes surfaces. »

Jacques Crozilhac est le créateur de Sélections Créoles. C’est un éleveur qualitatif et c’est tout à son honneur.
Que veut-il ? Une augmentation de la production, comme ses collègues des filières. Son groupement a 79 adhérents et 700 vaches créoles. Sélections Créoles fait de l’insémination : « Nous inséminons toutes sortes de vaches, en dehors des vaches créoles », précisait-il. 
Son souci, qui doit être celui de la profession c’est comment augmenter le cheptel de 10% par an. « C’est faisable ! », lançait-il ? 
Mais, pour cela, il faut des soutiens financiers pour acheter des semences et enrichir le cheptel. 
« Avoir 50 reproducteurs par an, ce n’est pas assez », déplorait-il.
Des problèmes qui impactent les élevages : la mortalité importante et la contamination des bovins (le vecteur, la tique sénégalaise).
« Nous avons une expérience de décontamination des bovins. Nous avons élaboré un test avec l’université de Lorraine. Je pense qu’il faut diffuser cette technique. »

« Passer de l’amateurisme au professionnalisme
avec les apports de techniciens. »

CAMILLE PELAGE, VICE-PRÉSIDENT DE LA RÉGION


Gérard Blombou, directeur de l’abattoir du Moule, expliquait que cet abattoir n’est pas à l’équilibre puisqu’il y a une chute de la production bovine, donc de l’abattage. Tant et si bien que chaque année le Conseil départemental doit verser une aide à l’équilibre, de 400 000 euros il y a deux ans, de 600 000 euros cette année… 
Or, cet équipement doit être rentable.

L’un après l’autre, chaque représentant de filière a présenté les problèmes rencontrés.
Photos AJV

« Il faut, disait-il, mettre à plat les problèmes des filières et rechercher ensemble des solutions pérennes. Et surtout faire en sorte que la production augmente. »

Autre expertise, celle de Camille Pelage. Il est vice-président de la Région, mais surtout de Marie-Galante. « On l’oublie, mais il y a un abattoir à Marie-Galante. Il est fermé. » Triste constat. 
« Il est fermé, cet abattoir, mais il y a des engagements de la Chambre d’agriculture et de la Région pour qu’on trouve des solutions pour le rouvrir. »
La rentabilité d’un abattoir sur une aussi petite île ? Camille Pelage a l’argument : « On vient du continent pour chercher des bêtes. L’élevage est là. Il faut le fédérer, il faut un abattoir qui fonctionne. »
Pour l’élu, il faut s’entendre sur les critères du marché et valoriser la viande locale. 
Ce qui passe par une labellisation de la viande fraîche locale et sa promotion. 
« Autre problème, poursuivait Camille Pelage, pas seulement marie-galantais : l’abattage clandestin. Il faut l’éliminer. Ensuite, il faut lutter contre les nuisibles que sont la tique sénégalaise et les chiens errants. Enfin, il faut faire une mutation des comportements : passer de l’amateurisme au professionnalisme avec les apports de techniciens. »

Harry Archimède est directeur à l’Inrae. Il est directeur de recherche en zootechnie, nutrition des ruminants. C’est un technicien éprouvé qui parle. Il parle alimentation des bovins, alimentation qui doit être produite sur place pour éviter d’abonder le bilan carbone. L’alimentation des bovins, qui pètent beaucoup et altèrent la couche d’ozone avec leurs émissions de gaz, doit être adaptée pour qu’ile émettent moins de gaz… 
Enfin, comme la zone de Basse-Terre est celle qui est la plus favorable à l’élevage des bovins puisque en herbe toute l’année (pluies abondantes sur le versant au vent) et qu’il y a de la chlordécone dans les sols, il faut adapter des techniques. Celles-ci existent. C’est de stratégie sanitaire dont parle Harry Archimède.

On l’aura compris : Région, Département et professionnels sont décidés. Le combat sera long et difficile. 

André-Jean VIDAL

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