Mêlant archives et reconstitution, ce documentaire inédit de Martine Delumeau revient sur l’histoire du Bal de la rue Blomet.
L’aventure commence en 1924 près de Montparnasse, dans le 15e arrondissement, au 33, rue Blomet, dans une maison du XVIIIe siècle reconvertie en commerce de vins, puis en cabaret sous le nom de Bal Blomet. Au lendemain de la Grande Guerre, la génération des Années folles, avide de distractions, se passionne pour ce lieu, baptisé Bal Nègre, par Robert Desnos. Les célébrités (Joséphine Baker, Foujita, Ernest Hemingway, Man Ray, Mistinguett…) y croisent des anonymes, des ouvriers côtoient des intellectuels.
Le Bal Blomet devient le creuset d’une nouvelle identité noire où se croisent les créoles de Paris, petits-bourgeois assimilés, travailleurs manuels, intellectuels et révolutionnaires venus danser la biguine en oubliant, le temps d’une parenthèse enchantée, la réalité de leur condition.
Un lieu où la musique abolit les barrières
En 1924, des bals de musique antillaise avaient lieu dans le hangar voisin du 33 rue Blomet, à l’initiative de Jean Rézard des Wouves, candidat martiniquais à la députation dans le 15e arrondissement. L’homme est un piètre orateur, mais il connaît la biguine. Il fait venir des groupes de musiciens antillais et le succès est au rendez-vous.
Martine Delumeau reconstitue la vie dans les Années folles à Paris de trois personnages : Jeanne, une jeune bonne, Arsène, un musicien, et Gaston, étudiant, tous trois d’origine antillaise. Arrivés pleins d’espoirs et de projets, ils affrontent, le jour, la réalité d’une société divisée et colonialiste, avant de se retrouver, la nuit, au bal de la rue Blomet où les morsures de l’exil s’estompent, laissant place à la danse qui abolit les barrières sociales ou raciales, et à la biguine qui les relie à leur île. L’histoire du Bal Blomet raconte des temps contrastés où la communauté antillaise de Paris rêvait que le regard porté sur elle le temps d’une nuit se prolonge au-delà.
Immigration, combats économiques, culturels…
À partir de ce lieu festif, mythique et controversé, où Noirs, Blancs, métis, femmes du monde ou de petite vertu se mêlaient sur des rythmes endiablés, le documentaire part à la recherche du Paris noir et révèle une immigration peu connue, celle des Antillais à Paris dans les années 1920-1930, et les combats économiques, culturels et sociaux qu’ils ont eu à mener avant que la Seconde Guerre mondiale ne les broie.
Reconstituée dans le documentaire par l’orchestre de Thierry Fanfant, bassiste, la biguine est apparue aux Antilles et notamment à Saint-Pierre en Martinique, à la fin du XIXe siècle, quelques décennies après l’abolition de l’esclavage dans les colonies françaises.
Mercredi 14 février, à 22 heures sur Martinique La 1e